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Actualité judiciaire

  • Justice & Habitat indigne

    Colloque

    "Justice & Habitat indigne"

     

    Mardi 1er décembre 2015 - 9h00 - 17h00
    Faculté des Lettres et de Sciences Humaines / salle B001 - 20 rue Duquesne / 29200 Brest

     

    Ce colloque, organisé par la Fondation Abbé Pierre, son agence régionale de Bretagne et les associations de la Maison de la consommation et de l’environnement, a pour objectif de sensibiliser les acteurs du monde de la justice, du logement et de l’habitat, sur la nécessité de mieux faire respecter les droits des locataires et occupants en les rendant effectifs par le travail de chacun.

     

    Intervention personnelle sur "État des lieux de l’habitat indigne" et participation à la table ronde "Pour un meilleur accès à la justice civile et pénale".

     

    Programme : Invitation colloque justice et habitat indigne.pdf

  • Le recours aux autorités militaires pour lutter contre la criminalité

    Conférence du jeudi 19 novembre 2015
    Université Aïn Shams, Le Caire, Egypte

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    L'intitulé de mon intervention :
    "Le recours aux autorités militaires pour lutter contre la criminalité"

  • Proposition de loi relative à l’atténuation de la responsabilité pénale en cas d’altération du discernement

    Le 12 janvier 2011, la Présidence du Sénat a enregistré une proposition de loi relative, selon son intitulé, à l’atténuation de responsabilité applicable aux personnes atteintes d’un trouble mental ayant altéré leur discernement au moment des faits (Proposition de loi n° 217 session 2010-2011).  Ce texte fait suite au dépôt en juillet 2010 d’une précédente proposition déposée par MM. Les Sénateurs Jean-René LECERF, Gilbert BARBIER et Mme la Sénatrice Christiane DEMONTES (Proposition de loi n° 649 session 2009-2010) ; permettant de prendre en considération les travaux contenu dans un important rapport du groupe de travail mené conjointement par la commission des lois et la commission des affaires sociales sur la prise en charge des personnes atteintes de troubles mentaux ayant commis des infractions ; rapport intitulé « Prison et troubles mentaux : comment remédier aux dérives du système français ? » (Rapport d’information n° 434 session 2009-2010).

    Le droit pénal français prévoit que seule la personne douée de discernement, lors de l’accomplissement de l’acte délictueux, peut être tenue pour responsable. Il existe dès lors une cause dite de non-imputabilité en raison de l’existence d’un trouble psychique ou neuropsychique. Il n’est pas possible d’imputer un acte à un individu n’étant pas en mesure de le comprendre. L’individu ne possède pas, dans ce cas, d’une volonté dans l’accomplissement de son acte puisqu’il ne le comprend pas.

    L’Ancien Code Pénal prenait déjà en compte cette situation. L’article 64 de l’Ancien code disposait que « Il n’y a ni crime ni délit, lorsque le prévenu était en état de démence au temps de l’action, ou lorsqu’il a été contraint par une force à laquelle il n’a pu résister ». La seconde partie de cet article concerne une seconde cause de non-imputabilité : la contrainte. Pour cette cause, reprise aussi par le nouveau Code pénal, l’individu ne possède aucune volonté sur l’acte qu’il réalise (tout comme pour le trouble), à la différence qu’il le comprend (mais ne peut s’y opposer).

    Si l’Ancien Code pénal parle de démence, le Nouveau Code pénal reprend cette cause subjective de non-responsabilité à l’article 122-1, en renvoyant à la notion de trouble psychique et neuropsychique :

    « N’est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes.

    La personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes demeure punissable ; toutefois, la juridiction tient compte de cette circonstance lorsqu'elle détermine la peine et en fixe le régime ».

    Notons tout d’abord que cette rédaction n’a pas encore fait l’objet de modification depuis cette rédaction du Nouveau Code pénal. S’agissant de l’évolution de la terminologie, de la démence au trouble, elle permet d’englober toutes les formes d’aliénation mentale qui enlève à l’individu le contrôle de ses actes. La nouvelle expression semble plus adéquate en renvoyant à l’idée de « facultés mentales ». Cela concerne les maladies qui atteignent le développement des facultés mentales (crétinisme, idiotie, imbécillité, débilité, faiblesse d’esprit) comme les maladies qui les affaiblissent (folie). Par contre, les maladies de la volonté sont exclues : kleptomanie, pyromanie, neurasthénie, psychasthénie... Le juge fera alors appel à des experts pour prendre sa décision.

    Puis, il s’agit de bien reprendre la distinction entre les deux alinéas de cet article. Il existe une importance fondamentale entre les termes « aboli » et « altéré ».  Pour effectuer une brève présentation… lorsque le discernement est aboli (prévision du 1er alinéa), il a totalement disparu. Dans ce cas, la responsabilité est de facto exclue. Il faut cependant que l’on retrouve les deux conditions : un trouble suffisamment grave pour abolir le discernement ou le contrôle des actes ; abolition contemporaine à l’acte délictueux. La personne pourra seulement voir sa responsabilité civile engagée pour réparer le dommage causé, comme le prévoit l’article 414-3 du Code Civil (Ancien article 489-1 du Code Civil) : « Celui qui a causé un dommage à autrui alors qu'il était sous l'empire d'un trouble mental n'en est pas moins obligé à réparation ». Bien sûr, la personne ne sera pas forcément remise en liberté pour autant : elle pourra faire l’objet d’une hospitalisation d’office, selon des procédures prévues.

    Le second alinéa parle d’altération. C’est à cet alinéa que renvoie le nouveau texte. Dans ce cas, le discernement n’a pas totalement disparu. Sous l’Ancien Code pénal, on a alors pu parler de « demi-fous » pour les caractériser. Cela renvoie aux maniaques, névrosés, pervers… Ces individus bénéficiaient alors d’une atténuation de responsabilité. Le juge tenait compte de cet état pour déterminer la peine. L’article du Nouveau Code pénal souligne que l’individu demeure punissable. Toutefois, le juge peut en tenir compte pour la détermination de la peine et de son régime. La Cour de Cassation est venue préciser que cette prise en compte n’était qu’une faculté pour le juge, indiquant que l’article ne prévoit pas dans ce cas de cause légale de diminution (Par exemple : Cass. Crim. 5 sept. 1995 : Bull. Crim. n° 270 ou Cass. Crim. 31 mars 1999 : Bull. Crim. n° 66). Pire, comme la personne constitue une menace, cette altération des facultés devient en pratique une cause d’aggravation des peines. Ce constat est largement démontré par le rapport d’information n° 434 cité ci-dessus. Dès lors, des critiques ont pu être soulevées sur cette situation aboutissant à emprisonner dans des établissements pénitentiaires des personnes souffrant de troubles, sans pour autant bénéficier de soins adéquates. D’ailleurs, le rapport accompagnant la proposition de loi faisant l’objet de cet article constate que « près de 10% des personnes détenues souffriraient de troubles psychiatriques graves » !  (Rapport du Sénat n° 216 session 2010-2011, présenté par M. Jean-Pierre MICHEL, p : 7).

    Cette proposition de loi veut répondre à ce paradoxe qui entraîne une irresponsabilité pour les graves troubles mais une éventuelle prise en compte des troubles moins sévères, prise en compte aboutissant bien souvent à une plus lourde peine. Pour reprendre les propres termes du rapport sur l’objectif de cette proposition : « La présente proposition de loi tente de répondre à cette préoccupation : elle reconnaît de manière explicite l’altération du discernement comme un facteur d’atténuation de la peine tout en renforçant les garanties concernant l’obligation de soins pendant et après la détention ».

     

    Pour cela, elle propose que l’article 122-1 du Code pénal envisage expressément une réduction de peine privative de liberté. Selon la nouvelle rédaction proposée, « la peine privative de liberté encourue est réduite du tiers. En outre, la juridiction tient compte de cette circonstance pour fixer le régime de la peine. Lorsque le sursis à exécution avec mise à l’épreuve de tout ou partie de la peine a été ordonné, cette mesure est assortie de l’obligation visée par le 3° de l’article 132-45 après avis médical et sauf décision contraire de la juridiction ». Sur le fondement de cet article 132-45 du Code pénal, la juridiction de condamnation ou le juge d’application des peines peut imposer spécialement au condamné l’observation de certaines obligations, en l’espèce, « se soumettre à des mesures d'examen médical, de traitement ou de soins, même sous le régime de l'hospitalisation ».

     

    Les autres articles de la proposition de loi se veulent plus stricts quant à la conduite à tenir par l’individu concerné. Celui-ci se doit de respecter les soins qui lui sont proposés. Le refus de soins pourra alors être pris en compte lors de l’application de sa peine. En vertu de l’article 721 du Code de procédure pénale, chaque condamné bénéficie d'un crédit de réduction de peine. Cet article définit les modalités de cette réduction. La proposition de loi prévoit la possibilité pour le juge de l’application des peines de ne pas appliquer le régime des réductions de peine de l’article 721 du Code de Procédure pénale lorsque l’individu « refuse les soins qui lui sont proposés ». Pour la même raison, il paraît logique que les réductions de peine supplémentaires envisagées à l’article 721-1 du même code soient aussi écartées. Compte tenu que ces dernières réductions concernent les condamnés qui manifestent des efforts sérieux de réadaptation, il va de soit que le condamné refusant les soins qui lui sont proposés, n’entre pas dans cette catégorie (article 2 de la proposition).  

     

    Le troisième et dernier article de la proposition propose l’introduction d’un nouvel article 706-136-1 dans le Code de procédure pénale, ainsi rédigé : « Art. 706-136-1. - Le juge de l'application des peines peut ordonner, à la libération d'une personne condamnée dans les circonstances mentionnées au second alinéa de l'article 122-1 du code pénal, une obligation de soins ainsi que les mesures de sûreté visées à l'article 706-136 pendant une durée qu'il fixe et qui ne peut excéder dix ans en matière correctionnelle et vingt ans si les faits commis constituent un crime ou un délit puni de dix ans d'emprisonnement. Les deux derniers alinéas de l'article 706-136 sont applicables ». Avec cet article, elle permet un suivi médical de l’individu après sa libération et la prise de mesures de sûreté. S’agissant de ces mesures de sûreté, ce sont celles qui étaient déjà prévues lors de la prise d’un arrêt ou d’un jugement de déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental : Interdiction d'entrer en relation avec la victime de l'infraction ou certaines personnes ou catégories de personnes, et notamment les mineurs, spécialement désignées ;  Interdiction de paraître dans tout lieu spécialement désigné ; Interdiction de détenir ou de porter une arme ;  Interdiction d'exercer une activité professionnelle ou bénévole spécialement désignée, dans l'exercice de laquelle ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise ou impliquant un contact habituel avec les mineurs, sans faire préalablement l'objet d'un examen psychiatrique déclarant la personne apte à exercer cette activité ; Suspension du permis de conduire ; Annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis. Cet article permet donc d’imposer un encadrement et un suivi par les soins de l’individu remis en liberté.

    Par cette proposition, on observe une véritable volonté de prendre en compte la situation mentale de l’individu dont le discernement a été altéré lors d’un fait infractionnel. Il est mis l’accent sur la nécessaire prise en compte de cet état mental pour y remédier, notamment par des soins. Par contre, l’individu peut se voir en quelque sorte « imposer » ces soins, au risque de perdre le bénéfice des réductions de peine voire d’être condamné à une nouvelle condamnation. Rappelons que la méconnaissance des mesures de sûreté prévues à l’article 706-136 est punie de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende… sous réserve de l’article 122-1 du Code pénal. Ce propre renvoi à cet article de départ permet de bien mettre l’accent sur l’importance des moyens qui seront mis en place, conjointement à cette proposition de loi, tant pour l’accès aux soins que pour le suivi des personnes concernées… Sans de véritables moyens, ces individus souffrant de troubles resteront confrontés à un système judiciaire aveugle à leur situation. Pour seule illustration en rapport avec cette proposition de loi : comment réagir quand l’individu n’est pas mentalement capable de comprendre l’importance et l’intérêt des soins ? Cela aboutira à un emprisonnement plus long, sans pour autant avoir un accès aux soins adéquats ; puis, à une libération en espérant un rétablissement ou en attendant un évènement plus dramatique. A contrario, le magistrat est partagé entre adoucir le quantum de la peine sur le fondement de la maladie et le réel risque de remettre en liberté plus rapidement une personne dangereuse. D’ailleurs, on peut dès lors logiquement se poser la question de savoir si ces individus doivent réellement dépendre du système judiciaire et pénitentiaire ; où si leur place ne devrait pas être, au même titre que les personnes déclarées irresponsables pénalement, dans des structures hospitalières adaptées. On en revient à un problème récurrent : un problème budgétaire en raison d’un manque de structures, un manque de places, un coût élevé pour la société, etc.

    Avant toute chose, il faut attendre l’adoption définitive de ce texte. Le Sénat a adopté cette proposition sous la référence textuelle n° 51, le 25 janvier 2011. Le texte est actuellement en première lecture devant l’Assemblée Nationale (Proposition de loi n° 3110).

     

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    Obs. sur le trouble mental.pdf

  • Observations sur la décision du Conseil Constitutionnel relative à l’interdiction du mariage homosexuel

    Cet article se veut être une simple et concise présentation de la décision du Conseil des Sages du 28 janvier 2011…

    Nous avions évoqué, en décembre 2010, la transmission d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’interdiction du mariage entre personnes de même sexe (http://fxrd.blogspirit.com/media/01/00/1155611248.pdf).

    Par l’introduction de cette QPC, le Conseil Constitutionnel devait répondre aux interrogations d’une non-conformité de cette interdiction avec des dispositions du bloc de constitutionnalité. Les dispositions en cause étaient les articles 75 dernier alinéa et 144 du Code Civil.

    Article 75 alinéa 6 C.Civ. : « Il recevra de chaque partie, l'une après l'autre, la déclaration qu'elles veulent se prendre pour mari et femme ; il prononcera, au nom de la loi, qu'elles sont unies par le mariage, et il en dressera acte sur-le-champ ».

    Article 144 C.Civ. : « L'homme et la femme ne peuvent contracter mariage avant dix-huit ans révolus ».

    On remarque que ces articles portent mention d’une éventuelle restriction du mariage à l’homme et la femme, entendu comme l’union d’un homme avec une femme. Une telle lecture exclut de facto les mariages entre personnes de même sexe.

    Cette saisine du Conseil Constitutionnel visait à faire déclarer ces dispositions inconstitutionnelles, ce qui aurait entraîné leur nécessaire abrogation… et par voie de conséquence, une ouverture du mariage à tous les couples. A l’appui de cette inconstitutionnalité, Mme Corinne C. et autres avançaient une contradiction avec l’article 66 de la Constitution, la liberté du mariage, le droit de mener une vie familiale et le principe d’égalité devant la loi.

    Le Conseil Constitutionnel a, tour à tour, écarté les contradictions soulevées pour marquer la constitutionnalité des dispositions sur le mariage.  

    S’agissant de l’article 66 de la Constitution, « Nul ne peut être arbitrairement détenu. L’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi », le Conseil Constitutionnel indique qu’il n’est pas applicable au mariage. Les dispositions invoquées ne portent aucune atteinte à la liberté individuelle.

    Sur la liberté du mariage, il rappelle que le législateur peut définir les conditions pour pouvoir se marier, en vertu de l’article 34 de la Constitution, et dans le respect des exigences de caractère constitutionnel.

    A la possible contradiction avec le droit de mener une vie familiale normale, le Conseil Constitutionnel souligne que le mariage n’est pas une condition imposée à la mise en œuvre de ce droit. Les personnes de même sexe peuvent mener une vie familiale normale sous les autres régimes juridiques du couple existants (concubinage et PACS).

    Dernière contradiction soutenue, le principe d’égalité. Le Conseil rappelle que le principe d’égalité ne s’oppose pas à ce que le législateur propose une différence de traitement dès lors que les situations sont différentes ou en s’appuyant sur des raisons d’intérêt général. Une atteinte au principe d’égalité implique donc une différence de traitement de personnes placées dans la même situation. Or, les couples de même sexe et les couples de sexe différent crée deux situations distinctes, pouvant être traitées selon des règles différentes.

    Suite à ces développements, le Conseil Constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution les dispositions critiquées du Code Civil. 

    Si l’on peut déplorer les conséquences de cette décision, il paraît difficile de remettre en cause les justifications apportées par le Conseil Constitutionnel. La seule critique pourrait se rapporter à la différence de traitement que justifie la différence de sexe dans le couple. L’existence de cette différence qui implique une différence de traitement, pouvant être discutable, semblait être une porte ouverte à une décision contraire.

    Bien que nous ne soyons pas surpris d’une telle décision et sans développer plus en avant celle-ci, nous nous bornerons à établir deux observations :

    -           Le Conseil Constitutionnel a, à de multiples reprises dans cette présente décision, souligné l’implication du législateur dans l’institution de ces dispositions, et de façon plus générale, dans l’institution du mariage tel qu’il se définit en droit français. D’ailleurs, il ne manque pas de souligner à la fin de sa décision « qu'il n'appartient pas au Conseil constitutionnel de substituer son appréciation à celle du législateur sur la prise en compte, en cette matière, de cette différence de situation ». Le Conseil Constitutionnel rappelle donc sa fonction de garant de la Constitution qui se distingue de celle du législateur. Il souligne donc, par voie de conséquence, qu’une modification dépend entièrement de l’appréciation du législateur. Peut-on y voir pour autant un appel du pied au législateur ? Une telle affirmation reste très discutable, bien que l’on ne puisse contester la volonté du Conseil de rappeler, à plusieurs reprises dans le corps de sa décision, la responsabilité du législateur en la matière.

    -          Cette décision rappelle les arrêts de la Cour Européenne des Droits de l’Homme qui renvoient aux autorités nationales, mieux placées, pour apprécier et règlementer l’exercice du droit au mariage. La Cour refuse de déclarer une obligation aux Etats de reconnaître le mariage homosexuel. Récemment, la CEDH effectue ce rappel dans son arrêt Schalk et Kopf c/ Autriche du 24 juin 2010 (30141/04). Pour justifier cette position, la Cour explique qu’il n’existe pas, à l’heure actuelle, de consensus européen en la matière. Une telle interprétation reste donc soumise à une possible évolution.

    La consécration d’un mariage entre personnes de même sexe, en France, reste suspendue à une réforme législative opérée par le Parlement. Cette solution semble la plus rapide dans le temps. Cette question fera certainement son apparition dans les futurs débats politiques préparant aux prochaines élections présidentielles. Dans le cas contraire, il faudra attendre que la Cour Européenne considère qu’un consensus existe au niveau européen pour l’amener à modifier sa jurisprudence.   

     

     

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    Le mariage homosexuel.pdf

     

    Décision intégrale du Conseil Constitutionnel n° 2010-92 QPC du 28 janvier 2011

    Les extraits en gras, soulignés ou surlignés l’ont été par nos soins pour mettre en exergue les éléments importants. 

     

    Mme Corinne C. et autre [Interdiction du mariage entre personnes de même sexe]

    Le Conseil constitutionnel a été saisi le 16 novembre 2010 par la Cour de cassation (première chambre civile, arrêt n° 1088 du 16 novembre 2010), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par Mmes Corinne C. et Sophie H., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des articles 75 et 144 du code civil.

    LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

    Vu la Constitution ;

    Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

    Vu le code civil ;

    Vu l'arrêt n° 05-16627 de la Cour de cassation (première chambre civile) du 13 mars 2007 ;

    Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;

    Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 8 décembre 2010 ;

    Vu les observations produites pour les requérantes par Me Emmanuel Ludot, avocat au barreau de Reims, enregistrées le 14 décembre 2010 ;

    Vu les observations en interventions produites pour l'Association SOS Homophobie et l'Association des parents et futurs parents gays et lesbiens par Me Caroline Mécary, avocat au barreau de Paris, enregistrées le 14 décembre 2010 ;

    Vu les pièces produites et jointes au dossier ;

    Me Ludot pour les requérantes, Me Mécary pour les associations intervenantes et M. Thierry-Xavier Girardot, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 18 janvier 2011 ;

    Le rapporteur ayant été entendu ;

    1. Considérant qu'aux termes de l'article 75 du code civil : « Le jour désigné par les parties, après le délai de publication, l'officier de l'état civil, à la mairie, en présence d'au moins deux témoins, ou de quatre au plus, parents ou non des parties, fera lecture aux futurs époux des articles 212, 213 (alinéas 1er et 2), 214 (alinéa 1er) et 215 (alinéa 1er) du présent code. Il sera également fait lecture de l'article 371-1.
    « Toutefois, en cas d'empêchement grave, le procureur de la République du lieu du mariage pourra requérir l'officier de l'état civil de se transporter au domicile ou à la résidence de l'une des parties pour célébrer le mariage. En cas de péril imminent de mort de l'un des futurs époux, l'officier de l'état civil pourra s'y transporter avant toute réquisition ou autorisation du procureur de la République, auquel il devra ensuite, dans le plus bref délai, faire part de la nécessité de cette célébration hors de la maison commune.
    « Mention en sera faite dans l'acte de mariage.
    « L'officier de l'état civil interpellera les futurs époux, et, s'ils sont mineurs, leurs ascendants présents à la célébration et autorisant le mariage, d'avoir à déclarer s'il a été fait un contrat de mariage et, dans le cas de l'affirmative, la date de ce contrat, ainsi que les nom et lieu de résidence du notaire qui l'aura reçu.
    « Si les pièces produites par l'un des futurs époux ne concordent point entre elles quant aux prénoms ou quant à l'orthographe des noms, il interpellera celui qu'elles concernent, et s'il est mineur, ses plus proches ascendants présents à la célébration, d'avoir à déclarer que le défaut de concordance résulte d'une omission ou d'une erreur.
    « Il recevra de chaque partie, l'une après l'autre, la déclaration qu'elles veulent se prendre pour mari et femme ; il prononcera, au nom de la loi, qu'elles sont unies par le mariage, et il en dressera acte sur-le-champ » ;

    2. Considérant qu'aux termes de l'article 144 du même code : « L'homme et la femme ne peuvent contracter mariage avant dix-huit ans révolus » ;

    3. Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le dernier alinéa de l'article 75 du code civil et sur son article 144 ; que ces dispositions doivent être regardées comme figurant au nombre des dispositions législatives dont il résulte, comme la Cour de cassation l'a rappelé dans l'arrêt du 13 mars 2007 susvisé, « que, selon la loi française, le mariage est l'union d'un homme et d'une femme » ;

    4. Considérant que, selon les requérantes, l'interdiction du mariage entre personnes du même sexe et l'absence de toute faculté de dérogation judiciaire portent atteinte à l'article 66 de la Constitution et à la liberté du mariage ; que les associations intervenantes soutiennent, en outre, que sont méconnus le droit de mener une vie familiale normale et l'égalité devant la loi ;

    5. Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la Constitution, la loi fixe les règles concernant « l'état et la capacité des personnes, les régimes matrimoniaux, les successions et libéralités » ; qu'il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, d'adopter des dispositions nouvelles dont il lui appartient d'apprécier l'opportunité et de modifier des textes antérieurs ou d'abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d'autres dispositions, dès lors que, dans l'exercice de ce pouvoir, il ne prive pas de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel ; que l'article 61-1 de la Constitution, à l'instar de l'article 61, ne confère pas au Conseil constitutionnel un pouvoir général d'appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement ; que cet article lui donne seulement compétence pour se prononcer sur la conformité d'une disposition législative aux droits et libertés que la Constitution garantit ;

    6. Considérant, en premier lieu, que l'article 66 de la Constitution prohibe la détention arbitraire et confie à l'autorité judiciaire, dans les conditions prévues par la loi, la protection de la liberté individuelle ; que la liberté du mariage, composante de la liberté personnelle, résulte des articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; que les dispositions contestées n'affectent pas la liberté individuelle ; que, dès lors, le grief tiré de la violation de l'article 66 de la Constitution est inopérant ;

    7. Considérant, en second lieu, que la liberté du mariage ne restreint pas la compétence que le législateur tient de l'article 34 de la Constitution pour fixer les conditions du mariage dès lors que, dans l'exercice de cette compétence, il ne prive pas de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel ;

    8. Considérant, d'une part, que
    le droit de mener une vie familiale normale résulte du dixième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 qui dispose : « La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement » ; que le dernier alinéa de l'article 75 et l'article 144 du code civil ne font pas obstacle à la liberté des couples de même sexe de vivre en concubinage dans les conditions définies par l'article 515-8 de ce code ou de bénéficier du cadre juridique du pacte civil de solidarité régi par ses articles 515-1 et suivants ; que le droit de mener une vie familiale normale n'implique pas le droit de se marier pour les couples de même sexe ; que, par suite, les dispositions critiquées ne portent pas atteinte au droit de mener une vie familiale normale ;

    9. Considérant, d'autre part, que l'article 6 de la Déclaration de 1789 dispose que la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » ; que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ; qu'en maintenant le principe selon lequel le mariage est l'union d'un homme et d'une femme, le législateur a, dans l'exercice de la compétence que lui attribue l'article 34 de la Constitution, estimé que la différence de situation entre les couples de même sexe et les couples composés d'un homme et d'une femme peut justifier une différence de traitement quant aux règles du droit de la famille ; qu'il n'appartient pas au Conseil constitutionnel de substituer son appréciation à celle du législateur sur la prise en compte, en cette matière, de cette différence de situation ; que, par suite, le grief tiré de la violation de l'article 6 de la Déclaration de 1789 doit être écarté ;

    10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le grief tiré de l'atteinte à la liberté du mariage doit être écarté ;

    11. Considérant que les dispositions contestées ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit,

    DÉCIDE :

    Article 1er.° Le dernier alinéa de l'article 75 et l'article 144 du code civil sont conformes à la Constitution.

    Article 2.° La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.

    Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 27 janvier 2011 où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Guy CANIVET, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, MM. Hubert HAENEL et Pierre STEINMETZ.

    Rendu public le 28 janvier 2011.

     

  • Etre homo en France en 2010

    Ces dernières semaines, l’actualité journalistique suit, avec un intérêt particulier, l’évolution du mariage homosexuel en Californie après l’adoption de la « Proposition 8 » entraînant son interdiction. Le combat politique, judiciaire et militant pour permettre de reconnaître le mariage entre personnes de même sexe prend une dimension médiatique importante, notamment par le soutien de nombreuses personnalités…

    Récemment, l’Amérique Latine s’ouvre aussi sur ce débat social et juridique… Mexico, capitale du Mexique, a reconnu ces unions en décembre 2009. En juillet 2010, l’Argentine devient le premier pays d’Amérique Latine à reconnaître une telle union. Le vote du Sénat, retransmis à la télévision, est qualifié d’historique. La comparaison est notamment faite avec la religion majoritaire du pays : plus de 90% des argentins revendiquent être catholique…

    Les débats sur ce sujet restent encore très limités dans les pays d’Afrique (légalisé uniquement en Afrique du Sud), au Moyen-Orient ou en Asie.

    En Europe, l’évolution vers la reconnaissance de ces unions et l’égalité de l’ensemble des citoyens s’opère. Ces mariages sont autorisés en Belgique, en Espagne, au Pays-Bas, en Suède, en Norvège … S’agissant de la France, fière de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789 dont l’article 1er énonce que « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune. » : le mariage homosexuel est interdit. D’ailleurs, le risque d’une telle ouverture judiciaire avait été rapidement stoppé par une réforme législative. Sur ce débat du mariage entre personnes de même sexe, une nouvelle intervention devrait intervenir prochainement suite à l’introduction d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) auprès du Conseil Constitutionnel, saisi le 16 novembre 2010 (Affaire 2010-92 QPC). Cette institution, appelée couramment le « Conseil des Sages », devra se prononcer sur la possible inconstitutionnalité des dispositions concernant le mariage (articles 75 et 144 du Code civil). Plus précisément, le Conseil devra déterminer si ces dispositions limitent ou non « la liberté individuelle d’un citoyen français de contracter mariage avec une personne du même sexe ». La Cour de Cassation a estimé qu’il était justifié de renvoyer la question au Conseil (http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/root/bank_mm/decisions/201092qpc/201092qpc_saisinecass.pdf). Nous restons dans l’attente de la décision du Conseil prochainement, sachant que le Conseil possède un délai de 3 mois pour la rendre.

    Pourtant, l’homosexualité ne se résume pas au seul débat sur le mariage. Certes, ce débat reste le plus ancré dans l’opinion publique et politique actuellement. Pourtant, on pourrait aussi s’attarder sur l’homoparentalité ou l’adoption par les couples gays, qui semblent des thèmes encore plus sensibles. Sur ce point, on peut souligner que la Cour de Cassation vient de franchir un pas considérable dans la reconnaissance de l’homoparentalité, dans son arrêt du 8 juillet 2010 (Pourvoi n° 08-21740 ; http://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/premiere_chambre_civile_568/791_8_16916.html). Dans cette affaire, une femme de nationalité française et une femme de nationalité américaine, vivant aux Etats-Unis, ont passé une convention de vie commune (« domestic partnership »). La femme de nationalité américaine a accouché, suite à une insémination par donneur anonyme, d’un enfant nommé Anna, né le 8 mars 1999. Par décision du 10 juin 1999, la Cour supérieure du Comté de Dekalb (Etat de Georgie) a prononcé l'adoption par la femme de nationalité française d’Anna. L'acte de naissance de l'enfant mentionne la femme de nationalité américaine comme mère et la femme de nationalité française comme « parent », l'une et l'autre exerçant l'autorité parentale sur l'enfant. Alors que l’exéquatur de ce jugement est refusé par les juridictions du fond françaises, la Cour de Cassation casse et annule ces décisions au motif que le refus d'exequatur fondé sur la contrariété à l'ordre public international français de la décision étrangère suppose que celle-ci comporte des dispositions qui heurtent des principes essentiels du droit français. Or, la Haute Cour considère que la décision qui partage l'autorité parentale entre la mère et l'adoptante d'un enfant n’heurte pas ces principes essentiels. La Cour opère un mouvement de consécration de l’homoparentalité… Toutefois, il faut souligner que cette affaire concerne un couple binational, qui demande la reconnaissance d’une décision étrangère... Le même jour, la même Cour a été confrontée à une affaire où deux femmes françaises pacsées vivant en couple, avec un enfant mis au monde puis reconnu par l’une d’elle, présentèrent une demande conjointe de délégation d’autorité parentale (Pourvoi n° 09-12623 ;  http://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/premiere_chambre_civile_568/703_8_16930.html). Si les juges du premier degré accèdent à cette demande, la Cour d’Appel infirme cette décision. Les femmes se pourvoient alors en cassation. Leur demande est rejetée, la Cour précisant que « si l'article 377, alinéa 1er, du code civil ne s'oppose pas à ce qu'une mère seule titulaire de l'autorité parentale en délègue tout ou partie de l'exercice à la femme avec laquelle elle vit en union stable et continue, c'est à la condition que les circonstances l'exigent et que la mesure soit conforme à l'intérêt supérieur de l'enfant ». Dès lors, les femmes n’ont pas apporté en l’espèce la preuve de la nécessité d’une telle délégation. Bien que l’on puisse considérer que cette décision n’effectue qu’une lecture stricte de l’article 377 du Code civil, on peut regretter que la Haute Cour n’ait pas fait preuve d’audace pour franchir – à nouveau – un pas, un petit pas aux conséquences notables… Aujourd’hui, les couples homoparentales sont de plus en plus nombreux, mais restent dans des situations juridiques précaires, pouvant mettre en péril les intérêts de l’enfant. Ne pouvait-on pas penser que les circonstances l’exigeaient ?

    En plus de ces difficultés juridiques et politiques, il semble nécessaire d’avoir aussi une réflexion sur la reconnaissance sociale. A ce titre, la Marche des fiertés gay ou Gaypride vise à sensibiliser l’opinion publique sur la nécessaire évolution sociale vers une acceptation des différences. On peut lire certains détracteurs indiquer l’inutilité de ces journées… A  titre de réponse, on peut déjà indiquer, comme le souligne justement Apollon dans son témoignage (ci-dessous), l’inexistence du terme « hétérophobie », mais une existence du terme et une réalité de l’ « homophobie ». Si l’existence du terme « hétérophobie » peut être discutée, il est cependant indéniable qu’il ne revêt pas une réalité dans son sens strict visant une haine contre les hétérosexuels (et heureusement !). Au contraire, les exemples pratiques d’homophobie ne manquent pas (malheureusement !). Même à l’occasion des défilés, ces actes existent. Je me suis étonné de lire qu’en marge de la Gaypride de Lyon, plusieurs jeunes filles revenant de la marche avaient fait l’objet d’insultes et de violences physiques. D’ailleurs, rouées de coups un samedi après-midi en pleine rue, les passants et commerçants étaient restés seulement spectateurs ! De même, le cortège de la marche organisée à Biarritz recevait, cette année 2010 et pour une deuxième année consécutive, le jet d’œufs …  

    Actuellement, l’homophobie a été largement et malheureusement médiatisée suite aux déclarations d’un groupe de rap, ainsi que l’étude des paroles de nombreuses de leurs chansons. Bien que l’on constate une annulation de plusieurs de leurs concerts, on peut quoiqu’il en soit déplorer une telle attitude discriminatoire.  

    En juillet 2005, j’écrivais sur ce blog : « Exemple de discrimination sociale. Un homosexuel voulant donner son sang se verra refuser cette possibilité de don car on estime qu'une personne homosexuelle est une personne à risque au même titre qu'une personne ayant de nombreux partenaires » (http://fxrd.blogspirit.com/archive/2005/07/01/la-france-et-le-souvenir-du-pays-des-droits-de-l-homme-le-ca.html ). Aujourd’hui, en novembre 2010, on peut lire sur le site de l’Etablissement Français du sang : « Si vous êtes un homme et que vous avez (ou avez eu) des relations sexuelles avec un autre homme, vous ne pouvez pas donnez votre sang » (http://www.dondusang.net/rewrite/article/1142/les-contre-indications-au-don-du-sang/les-contre-indications-au-don-de-sang.htm?idRubrique=531). Que faut-il penser de cette stigmatisation insultante ?

    A contrario, la lutte contre l’homophobie possède le soutien de personnages médiatiques indéniables. On peut citer l’action de Daniel RADCLIFFE, le célèbre acteur d’Harry Potter, apportant une aide financière à une association aidant de jeunes homosexuels. De même, il est possible de rapporter l’intervention forte de MADONNA : « Torturer des adolescents parce qu'ils sont homosexuels, c'est intolérable. C'est comme lyncher les Noirs ou Hitler qui extermine les Juifs ».

    Face aux déclarations de certaines personnalités politiques et médiatiques aux relents homophobes, peut-on s’étonner que le taux de suicide soit plus élevé chez les jeunes homosexuels ? Que pensez des propos de certains hommes politiques, notamment en raison du lien particulier avec la liberté d’expression (http://fxrd.blogspirit.com/media/02/02/1987609405.pdf). Comment aborder son homosexualité en France aujourd’hui, notamment lorsque l’on est une jeune adolescente ou un jeune adolescent, qui ne comprend pas forcément sa différence ? Il est nécessaire de faire face à ses parents, sa famille, ses amis … ses propres convictions morales, politiques, religieuses… Or, il faut encore répéter que les discours et attitudes de certains hommes politiques, des personnes médiatisées comme l’appréhension par différents religieux ne facilitent pas cette compréhension.

    Je me suis alors demandé comment on pouvait ressentir cette différence dans notre pays. J’ai demandé le témoignage de quelques personnes, de jeunes homosexuels…  Je leur ai simplement demandé d’exposer leur propre homosexualité en quelques mots : acceptation personnelle de leur différence, révélation à leur entourage, acceptation de cet entourage, difficultés rencontrées, leur vie religieuse, leur vie politique, leurs attentes personnelles pour le futur.

    On peut trouver ci-dessous six témoignages. Je tiens à remercier sincèrement les personnes qui m’ont transmis leur témoignage. Il va de soit que d’autres témoignages peuvent, bien évidemment, être ajoutés à la suite ou en commentaire !

    Avant de laisser place à ces commentaires, je souhaite simplement effectuer une remarque. Au final, à la lecture de ces témoignages, on constate que les espérances et les peurs restent les mêmes que pour tout adolescent ou jeune personne : être accepté socialement, trouver l’amour et fonder un foyer...

     

    Apollon (17ans –  Le Havre) :  

     

    "... L'homophobie est pour moi un terme qui ne devrait en aucun cas exister dans notre vocabulaire. En effet, tout mot, ici-bas, à son opposé, son contraire : "Oui" & "Non"; "Bruit" & "Silence"... Avez-vous déjà entendu le terme "Hétérophobie" ? Non ? Moi non plus, pour preuve, il n'est même pas recensé dans le dictionnaire ! D'où provient cette haine qui nourrit la plupart des gens de cette Terre ?! C'est une bonne question qui est resté en partit sans réponse depuis des années, malgré les campagnes publicitaires prônant le respect de l'homosexualité. L'inculcation de ces valeurs anti-homosexuelles par les générations passées, l'incitation à la haine de la différence, tant de choses qui ravivent l'homophobie, puisqu'il ne faut pas l'oublier, la différence fait peur à l'Homme, qui la ressent comme une menace. Certains ont la chance d'avoir eu un coming-out tranquille, sans problème comme se fut mon cas lorsque j'ai révélé mon homosexualité à mes parents sur un coup de sang. J'ai la chance d'avoir des parents très ouverts d'esprit, mais ce n'est pas le cas de tout le monde. Ceux qui n'ont pas cette chance sont obligé de se cacher, de mentir à leur entourage, et à fortiori, de se mentir eux-mêmes sur leur véritable nature, pour leur venir en aide, des refuges existent ! J'aborde maintenant le terme du Mariage homosexuel, en quoi cela peut-il gêner les autres, de voir deux femmes ou deux hommes s'unir "pour la vie" comme le ferait un homme et une femme. Cette prohibition du mariage gay est en partie diffusée par l'église, qui refuse catégoriquement ce "type de mariage" comme il le nomme, alors que je pensais (toujours d'après eux) que "le Mariage est un acte universel scellé dans la maison de dieu"... Vive les religions qui sont un peu toutes semblables à ce niveau là: Chrétienne, Orthodoxe, Musulmane... A ma connaissance, seule une religion l'accepte, la Wicca. Ne vous fiez pas à son nom, aux "on dit.." de Wikipédia, la Wicca est tout d'abord une religion qui prône la nature et qui prône également la possibilité envisageable que les énergies puissent être actionnées par la pensée. Bref, ceci n'est pas un débat sur les religions. Passons à l'adoption d'enfants par les couples homosexuels, voulant moi-même adopter avec mon compagnon, je remets de plus en plus en question cet acte autorisé dans certains pays. Je pense que pour le bon développement de l'enfant, le présence totale d'une mère est indispensable, ne serait-ce que vis à vis des autres enfants qui se disent "normaux" d'avoir une mère et un père et qui jugeraient "anormaux" des enfants n'ayant pas de père ou n'ayant pas de mère. Il en va du bon moral de l'enfant et de sa crédibilité face au monde extérieur qui est sans pitié, bien que je ne doute pas un seul instant que deux parents de même sexe puissent donner tout l'amour nécessaire à un enfant. Un jour peut-être les mœurs et les préjugés des sociétés contemporaines évolueront avec leurs époques. En tout cas je l'espère, j'espère du plus profond de mon être que les gens arrêteront de cataloguer l'homosexualité comme ils le font à notre époque, avec leurs regards tueurs, leurs critiques acerbes et leurs commérages douteux. Il ne faut en aucun cas se laisser marcher sur les pieds, soyez fier de qui vous êtes, soyez fier de votre drapeau. Lorsqu'on me demande " Mais comment as-tu su que tu étais gay ? " je réponds : " De la même manière que tu as su que tu étais hétéro". Et les insultes me direz-vous, faites comme moi, prenez les avec philosophie, vous allez voir au début c'est un peu dur, mais à la longue cela devient un reflexe. Ainsi si un "Sale PD" vous est adressé, répondez avec fermeté "Le terme exacte est Homosexuel espèce d'ignare!"

     

     

    Victor (18 ans – Toulouse – Enfance au sud de Tarbes) :

    Donc pour ma part j’ai su que j’étais gay dans la période de ma classe de 4ième, soit vers… mes 13ans.

    Pour moi c’était naturel, je n’avais pas à m’inquiéter, j’étais (et je suis ^^) attiré par les garçons, comme les autres peuvent être attirés par les filles. Je n’étais pas choqué ni apeuré de ma différence tout simplement parce que je l’acceptais, elle faisait partie de moi.

    L’acceptant, j’ai ainsi pu le confier à d’autres personnes qui m’entouraient. Ca a d’abord été ma sœur qui l’a su, puis ma cousine. C’était les deux seuls membres de ma famille à le savoir au début. Par la suite ce sont bien-sur les personnes étant aussi gay, lesbienne ou bi qui savaient pour ma sexualité et enfin les nouveaux amis que je me faisais après mes 14ans. Mes anciens amis eux ne le savent pas (ils s’en doutent peut être) à cause de leur mentalité pas toujours… ouvertes (coin assez homophobe pour mon enfance donc ça ne facilite pas l’acceptation tel qu’on est avec cette différence ^^) j’ai préféré ne pas leur divulguer.
    Ma famille n’est pas au courant dans sa totalité. Effectivement ma sœur et une de mes cousines le savent. Je n’ai pas voulu révéler mon attirance sexuelle à certains de mes amis vu que de bouche à oreille, cela peut arriver jusqu’à mes grands parents ou oncles/tantes. Ne voulant pas forcément les choquer de ce côté, je reste le Victor qu’ils connaissent depuis longtemps, mais qui n’est pas le vrai malheureusement pour eux…

    Je présume que vous avez du remarquer que jusqu’à présent j’ai parlé de ma famille, sans mentionner mes parents. Ils sont l’entre deux, ils sont au courant oui, mais avec quelques mois de retard vis-à-vis de ma cousine et ma sœur. La révélation n’a pas été des plus… sereine. Ils l’ont bien pris oui, mais quelques jours après l’avoir su en fait. L’histoire depuis son début : mon père se posait de plus en plus de question sur moi, comme quoi je demandais de plus en plus de sortir, que je ne ramenais pas et que je ne parlais pas de fille à la maison… Vient une après midi, où j’étais seul chez moi avec mon père, il me demande de venir le voir pour qu’on parle (mauvais signe ça). La discussion commence direct sur ces questions qu’il se posait, jusqu’à ce qu’il pose enfin la question qui le tracasse le plus : « tu aimes les garçons oui ou non ? ». Ne voulant pas mentir une énième fois, je dis la vérité. Résultats, dans l’heure qui suivit je prenais ma voiture avec toutes mes affaires. Je rappelle que tout ceci c’est passé sans la présence de ma mère. Quelques heures plus tard, ma mère qui me téléphone en larme et me demande ce que je fais… Amusant en y repensant mais bon ^^. Il devait être 9h du soir alors que mes parents me demandaient de revenir à la maison. Mon père avait juste réagit de la mauvaise manière sur l’instant. Maintenant ils l’acceptent bien, mon père me pose des questions sur mon copain par exemple. Pour eux ça leur importe que je sois avec une fille ou un garçon tant que c’est ce que je veux et que je suis heureux.
    Mais il y a une chose qui m’a marqué et me marquera toujours, je suis rentré à la maison comme si de rien n’était. Mais jamais je n’ai eu d’excuse de mon père pour son attitude… Il est bon de savoir que sa famille nous aime, mais certaines choses peuvent faire mal au cœur quand on ne pense pas à tout…

    Enfin bon, tout ceci ne m’a pas empêché d’avoir des relations sentimentales avec différents garçons. Même si la plupart du temps c’était des relations à distance. Le plus difficile ce n’est pas de trouver un garçon, c’est de trouver le bon garçon. Les sentiments homosexuels sont les mêmes que ceux éprouvés entre hétérosexuels, la seule différence c’est qu’on n’a pas forcément les mêmes facilités à se reconnaitre en homo, d’où des rencontres moins évidentes. Après la difficulté de trouver le bon garçon, c’est de le garder… Les relations à distance ne sont pas toujours faciles à tenir d’une part. D’autre part on ne va pas dire que mes premières relations sentimentales aient été les meilleures espérées. Etant considéré d’avantage par mon physique que par mon esprit, les sentiments étaient vite mis à la trappe. Ce qui menait au résultat de rupture sans lendemain. Mais voila, c’est quand on s’y attend le moins que le bonheur nous souris. Je peux paraître jeune et insouciant, mais pour moi j’ai rencontré finalement l’homme qui sait le plus me combler. Celui qui m’a fait connaître le véritable amour, celui qui se confie à moi pour la moindre chose…  Juste 4mois qu’on est ensemble, et j’espère bien d’avantage, sans limite.

    Forcément quand on commence à connaître les relations sérieuses, on se pose certaines questions. Penser à l’adoption, au mariage gay… Je suis pour les deux, tous simplement parce que les homosexuels peuvent autant servir de parents que les hétérosexuels, ils peuvent fournir amour et éducation à leurs enfants, ainsi que leur apporter un équilibre. Ce n’est pas deux parents homosexuels qui vont perturber un enfant, c’est deux adultes qui ne jouent pas leur rôle de parent qui peuvent entrainer une perte de l’équilibre chez l’enfant. Qu’on ne remette pas en question l’aptitude de deux hommes ou deux femmes à élever un enfant dans de bonnes conditions, tant que la volonté de s’occuper d’enfants et l’amour familial sont la, cela en fait des parents comme les autres.

    L’autre question qui crée tant de polémiques : le mariage gay. Pourquoi s’opposer à l’union de deux personnes du même sexe ? Le mariage est juste la preuve de leur amour. Je ne vois pas pourquoi nous interdire cet acte… Du point de vue de la religion je le comprends, un mariage religieux n’est pas forcément la meilleure chose à envisager, vu que la différence des tendances sexuelles n’est pas forcément si bien vue que ça… Mais le mariage civil est lui la preuve de l’amour que l’Etat approuverai, il n’y a rien qui puisse s’opposer à cette union. Le pacs est une bonne chose oui, mais ce n’est pas suffisant il me semble. Le seul obstacle du mariage gay c’est la vision que les autres peuvent en avoir, une homophobie autorisée si on peut dire… Homophobie parfois trop présente, révélatrice d’une étroitesse d’esprit et d’un manque de jugement… La naïveté et le manque de considération. Un exemple, ma famille (mes grands parents notamment) me connaissent très bien en tant que « pseudo-hétéro », or s’ils venaient à apprendre mon homosexualité, leur attitude pourrait totalement changer de celle qu’ils avaient précédemment. Or je n’aurai pas changé, ce serait juste leur vision qui serait modifiée. Le problème ne viendrait pas de moi, mais du regard qu’ils porteraient sur cette différence. Je serais pourtant le même.

    L’homosexualité n’est pas une tare, ni une maladie.

    Être blond, roux ou brun nous rend-t-il si différent que ça ?

    Pourquoi la différence de sexualité donnerait elle une si grande différence que ça ?

    Si chacun s’occupait de soit avant de s’occuper des autres, il y aurait peut être moins d’intolérances…

     

     

    Thibaut (23 ans – Lille – Montréal) :

    Ce qui n’en finit pas de m’étonner, ce sont les certitudes avec lesquelles certaines personnes abordent l’homosexualité. Nous sommes homosexuels mais ils sauraient, mieux que nous, ce que c’est que d’être homo. Je suis gay et j’ai vécu la difficulté à s’assumer malgré l’homophobie ambiante dans laquelle j’ai évolué. Et malgré tout, je suis pleinement épanoui.

    J’ai pris conscience à 10 ans que j’étais attiré par les garçons. Je ne l’ai bien sûr pas choisi ; croyant, je priais en vain pour ne pas ressembler aux homosexuels que je connaissais : ceux de La Cage aux Folles, la « tantouze » de la scolarité de mon école, maniéré, habillé en cuir et vêtements moulants, cheveux épars blonds peroxydés, bagues et bracelets...

    J’ai souffert. Non du fait d’être homosexuel mais bien à cause des moqueries de mes camarades de classe, comme lors de ce voyage scolaire où, sous la porte de ma chambre d’hôtel, j’ai retrouvé un préservatif publicitaire pour un téléphone rose gay, accompagné d’un billet d’insultes et de références au SIDA. Ou encore à cause des remarques blessantes de mes parents qui, lorsqu’ils ont découvert mon homosexualité en fouillant dans ma correspondance, voulaient me « soigner » et m’ont menacé de me couper les vivres – j’ai menacé de porter plainte en retour car je ne voulais pas me laisser faire. Sans oublier les références de ma mère à Christian Vanneste, « cet homme charmant », et des sermons religieux de mon père sur le « vrai sens de la vie enseigné par la Bible ».

    Oui, on peut être gay, heureux et épanoui. Etudier loin de chez moi m’a permis de nouer des amitiés sincères et de pouvoir rencontrer des garçons sans avoir à me cacher de mes parents. Finis les mensonges, je pouvais enfin vivre sans avoir un jouer un autre.

    A 20 ans, je suis parti à Montréal pour mes études. J’y ai rencontré, un soir de janvier, un Français. Le coup de foudre. Réciproque. Nous projetions de nous installer ensemble, là où nous nous étions rencontrés. Aujourd’hui, c’est chose faite. Car au Québec, l’homosexualité est mieux acceptée qu’en France. Pas de débats ineptes sur les homosexuels fossoyeurs de l’humanité. Des interventions pour combattre l’homophobie ont lieu en milieu scolaire et on ne parle pas de « propagande gay ».

    Je commence seulement, six ans après, à avoir des relations apaisées avec mes parents, qui voient bien qu’au final je suis heureux, que ma relation est stable. J’espère un jour pouvoir me marier, à l’étranger s’il le faut, peut-être avoir un enfant. Même si je regrette de ne pas avoir profité pleinement de mon adolescence, d’avoir des histoires amoureuses, j’ose espérer que les jeunes d’aujourd’hui peuvent profiter de la vie, sans crainte d’être jugé, y compris et surtout dans les banlieues où l’homosexualité est encore taboue.

     

    Marco (22 ans – Paris) :

    Pour ma part, j'ai réalisé en 5e (donc vers 12 ans) que les filles ne m'excitaient pas (en revanche je ne trainais principalement des nanas ;-) ). Intérieurement, il n'y a jamais eu le moindre doute, ou une non acceptation, whatever you call it... c'était clair pour moi : seuls les mecs m'excitent.  L'emploi du verbe "exciter" est volontaire : je suis né avec internet et quand je tapais gay sur internet, ce n'est pas le monde des bisounours qui apparaissait ! A cet âge c'est principalement le sexe que je voyais avant l'affection : je m'imaginais coucher avec des mecs mais vivre avec.... l'idée ne m'était pas encore venue je crois ! 

    Si intérieurement c'était clair très tôt, les "révélations" ont été beaucoup plus tardives... A 18 ans, je quittais le cocon familiale avec une idée en tête : "les parents seront loin, je vais enfin pouvoir essayer" ! Les premiers au courant de mon homosexualité furent donc les visiteurs de rezog et  mes premiers mecs à 18 ans! J'étais alors dans une ville que je connaissais mal (j'y étais uniquement pour mes études) sans "vrais amis" : difficile donc de glisser au milieu de la conversation "au fait, je suis gay", surtout quand on est dans des classes a majorité masculines et pas forcément très ouverte. Quant aux amis de lycées… je n'ai jamais eu le courage d'aborder le sujet, encore à ce jour.

    A 19 ans, je rechangeais de ville, nouvelle rentrée, nouvelles personnes : le cadre idéal pour enfin s'affirmer ! J'ai fini par réussir a le glisser au milieu d'une conversation a une amie et tout mon groupe d'ami d'école a rapidement eu l'information et l'a accepté tel quel, sans problème et sans poser de questions. 

    Aujourd'hui à 22 ans, personne dans ma famille n'est au courant. Ce n'est pas une question de religion, de milieu intégriste... là, c'est juste du courage qu'il me manque : n'étant pas sûr à 100% de leur réaction, je ne veux pas prendre de risque temps que je dépends financièrement de mes parents. Je reste le gentil fils studieux qui préfère son ordinateur aux nanas (qu'ils sont naïfs quand même !). L'annonce pourrait se faire très vite si je trouvais vraiment mon mec (pour que je considère vraiment un gars comme mon homme, qu'il ait le droit a des "je t'aime" il faut vraiment que ca soit le bon, je ne suis pas quelqu'un qui m'emballe trop vite de ce côté !). Sans doute car ce que je redoute est le regard que la famille pourrait me porter : je préfère le pack «je suis gay et voilà mon copain-gendre-idéal» plutôt que juste «je suis gay» et qu'ils se fassent des films en imaginant ma vie sexuelle.

    Enfin, les coucheries ont parfois du bon : même si on ne rencontre pas son futur mari, on rencontre parfois des gens qui deviennent de très bons amis qui m'ont permis de découvrir la "vie social gay". Je ne me voyais absolument pas en boite gay (voire boite tout court) ou tout autre lieu "social" gay à 18 ans. Aujourd'hui, grâce aux gayfriends, je me retrouve a faire des brunchs gay le dimanche, je fini par (presque) prendre gout aux boites de nuit, jusqu'à finir en hôtel "hétéro friendly" cet été à Barcelone!

    En bref, je vis tout ça plutôt bien, il y a seulement le "secret" vis a vis de ma famille que j'ai de plus en plus de mal a assumer : les vacances en hotel gay, ca commence a devenir dur de trouver des excuses valables! 

    Petite note de fierté : j'ai réussi à caser en juin dans le train, a un copain de collège que j'y ai croisé,  à la question "t'as une copine ?"  "Non, ca serait plutot un copain". J'étais fier de moi !

    Et il reste quand même un point noir (non, pas un qui s'en va avec du Biactol) : le mode de rencontre. Quand on est gay on ne peut pas draguer normalement. J'aimerais bien moi pouvoir draguer mes camarades de promo ! Mais non, les seules moyens de rencontrer quelqu'un c'est internet, les boites ou se taper les ex de ses potes gay ! On ne découvre donc rarement les gens sous leur vrai visage et ca, ca m'énerve ! 

    Désolé, lecteur, pour cette écriture maladroite mais rédiger correctement n'est pas vraiment dans mes cordes et je n'ai pas la patience pour passer des heures a faire un beau texte :)



    Jeanne (18 ans – Toulouse) :

    Aimer les filles est très ressent chez moi. Enfin, j'ai toujours su qu'une partie de moi était attirée par les filles, mais je réprimais ce sentiment. La première fois où j'ai remis en question mon penchant sexuel c'était en troisième. A l'époque je pensais que l'homosexualité n'était pas un bonne idée à cause de mes amis qui s'insultait parfois en utilisant des mots  « sale PD » ou « brouteuse de chatte » qui ne valorise pas du tout les homosexuels. Alors forcément, ça ne donne pas envie de l'être. J'ai donc continué à réprimer ce sentiment pendant mes années lycées. Et c'est lors d'un voyage que j'ai effectué seul au mois de septembre que les premières expériences homosexuelles sont arrivées puisqu'avant je n'étais sortie qu'avec des garçons. Je m'étais dis que c'était le moment ou jamais, que là-bas je ne serai pas jugé par mes amis ou ma famille. Pouvoir enfin être qui je suis vraiment m'a tellement plu qu'une fois retournée en France j'ai décidé d'assumer qui j'étais, mais petit à petit. J'en ai parlé d'abord à un de mes amis les plus proches. Pour moi il était plus facile d'en parler d'abord à un garçon, car je pense que les filles peuvent le prendre mal, se croyant « trahies ». Il l'a très bien pris, pour lui ça ne changeait strictement rien à notre amitié. Puis ma grande sœur avait remarqué un changement en moi, c'est elle qui est venu m'en parler directement. Elle a posé la question, je lui ai donc répondu et tout raconté. Entre autres je lui dis que pour moi ça ne faisait aucune différence avec qui je sortais tant qu'il ou qu'elle me plaisait. Elle me dit qu'une de ses amies était lesbienne aussi, qu'elle ne trouvait rien de mal à cela et que ma mère était du même avis. Je sais pertinemment qu'un jour ou l'autre elle ira le raconter à ma mère, et ça ne me dérange pas. Pour le moment je ne ressens pas le besoin de le dire à mes parents, par contre j'aimerai mettre tout mes amis au courant, ce qui résulte déjà plus difficile mais pas insurmontable.

     

    Moïse (24 ans – Toulouse) :

    Bonjour à tous je vais vous donner en quelques lignes mon vécu de la découverte de mon homosexualité, de ma vie et de mes espérances pour la vie future.

     

    Donc pour ma part j'ai su que j'étais gay au collège en 4ème, bien-sûr au début cela m'a effrayé mais faisant le point sur mes conquêtes féminines qui étais de 0 je me suis dit voilà j'aime les garçons au lieu des filles, pourquoi aller contre nature je suis gay et j'assume ce que je suis.

     

    Mais ayant grandi dans une famille religieuse j'ai du me cacher et jouer double jeu, car je savais que s’ils l'apprenaient je me retrouverai à la rue en moins de deux. J'ai continué à vivre ainsi, mes amis étaient au courant de mon homosexualité, j'avais un soutien. Ma première relation s'est passée avec mon meilleur ami, cela a duré 4 mois mais voyant que cela gâchait notre amitié nous avons arrêté notre relation et sommes aujourd'hui toujours les meilleurs amis. La difficulté en tant que gay c'est de rencontrer d'autres gays, bien sur il y a les sites de rencontre mais la plupart recherchent des plans sexe et non du sérieux. Puis il a fallu attendre l'âge de mes 16 ans pour rencontrer le véritable amour, le beau prince que tout le monde attend était la devant mes yeux son prénom était Thomas. J'avais enfin trouvé le garçon qu'il me fallait, il m'a fait découvrir les joies et le bonheur de l'amour, notre relation a duré 2 ans et demi avant le drame. Cela s'est passé le 13 mai 2004, nous avions décidé d'annoncer à nos parents notre homosexualité et que nous avions envisagé d'habiter ensemble, mais avant cela nous avons décidé d'aller au cinéma pour se détendre avant la confrontation ultime. Malheureusement sur le chemin du retour, un chauffard nous a coupé la route, la voiture a fait plusieurs tonneaux avant de finir par s’écraser contre la barrière de sécurité. Mon premier réflexe a été de voir comment Thomas allait puis voyant qu'il était dans un état grave je préviens aussitôt les secours. M’extirpant de la voiture ainsi que lui, une fois à l’extérieur je l'ai serré dans mes bras, le réconfortant, lui disant de rester prêt de moi. Mais cela n'a pas suffit il décéda 5 min avant que les secours arrivent, mais avant de partir rejoindre les anges il m'a dit ces dernières paroles «écoute bébé je vais bientôt fermer les yeux de cette terre sache que je t'aime et t'aimerai toujours et la où je pars je veillerai sur toi et t'enverrai quelqu'un pour combler ton cœur je t'aime mon homme» sur ces dernières paroles je l'embrassa et il rendit son dernier souffle. (en écrivant ces quelques lignes je n'ai pu m’empêcher de pleurer car il est au fond de mon cœur à jamais).

     

    A partir de ce jour ma vie n'a plus été la même, j'ai vécu l'enfer pendant 5 longues années, j'ai tenté de me suicider à la suite de la mort de Thomas chez ma meilleur amie Émilie qui me transporta aux urgences. Bien sur à ce moment la je cachais tout à mes parents, l'année d'après ma meilleure amie décéda à son tour dans un accident de voiture, puis tout s'enchaina. J'ai du arrêter mes études pour élever mes 4 petits frères car mes grands parents sont tombés malade, ma mère a du s'en occuper donc il fallait quelqu’un pour les emmener à l’école, les faire manger, faire les devoirs...

    Pendant ces années j'étais seul à combattre sans aucun soutient voyant le couple de mes parents à la rupture, mes grands parents malades... J’étais plus bas que terre mais garder le sourire pour leur montrer qu'ils pouvaient compter sur leur fils ainé. Mon grand-père décéda le premier en septembre 2007 et ma grand-mère en aout 2008. A partir de ce jour ma vie reprenais des couleurs si on peut dire, j'ai trouvé un boulot en mai 2009, des nouveaux amis et retrouvé ma vraie personnalité que j'avais dut mettre de coté pendant ces années.

    A partir de la je reprenais ma vie en main, sortant de plus en plus j'étais enfin moi même puis un soir mon père et moi nous nous sommes disputés car à son goût je sortais beaucoup trop, j'avais changé que je devais faire attention à ne pas tomber dans les pièges du diable (je vous rappelle que je suis né dans une famille très croyante ^^). Commençant à en avoir assez, j'ai décidé de me faire muter sur Bordeaux pour vivre enfin ma vie pleinement. Mais malheureusement tout ne s'est pas passé comme prévu. En juin dernier j'ai rencontré celui qui allait devenir mon petit copain, la promesse était enfin accomplie et j'ai donc décidé d'annoncer à mes parents mon homosexualité mais la vie en n'a voulu autrement. Un de mes frères leur a dit à ma place et depuis ce jour mon père m'a renié ainsi que deux de mes petits frères. Ma mère a eu du mal à l'accepter, ce qui est normal, mais maintenant c'est comme si de rien n’était. Ainsi que mon petit frère de 11ans que j'adore plus que tout et qui a gardé le secret depuis le début. Je me rappelle de notre conversation, j'étais sur mon pc entrain de tchater sur msn et matant des photos de garçon émoboy car ils me fascinaient, mon petit frère me demanda qu'est ce que c’était, je lui ai donc répondu. Il compris à la place homo-boy... ^^ et la il me dit «tu aime pas les garçons j’espère» avec un petit sourire et je lui ai répondu «qu'est ce que ça changerait entre nous?» et la il m'a répondu «fais ce que tu veux, pour moi tu seras toujours mon frère».

     

    Enfin pour vous dire que la vie n'est jamais comme on le veut, maintenant je vis ma vie avec celui qui est mien, celui que j'aime sans limite, qui comble mon cœur. Cela va faire bientôt 5 mois que nous somme réunit et que nous vivons notre amour librement. Certes nous sommes confrontés parfois au regard des autres quand nous nous tenons la main en pleine rue en se baladant ou quand  on s'embrasse, mais jusqu'à aujourd'hui nous n'avons eu aucun problème (si ce n'est quelques sourires narquois).

    Bien sur en tant que couple nous avons parlé de mariage, d'adoption...

    Personnellement je suis pour les deux. Pourquoi nous refuser le droit de nous marier, nous nous aimons et sommes capables d'élever des enfants aussi bien qu'un couple hétéro.

    Pourquoi on nous refuse ces droits? Certes sur le plan religieux ceci n'est pas acceptable mais sur le plan civil cela concrétiserait notre amour en nous unissant par le mariage. Pour ce qui est d'élever un enfant quelle différence y a-t-il? Que ce soit deux hommes ou deux femmes cela ne change rien, nous sommes capables d'aimer et d'assumer notre rôle de parents.

     

    La France a un sacré retard sur des pays comme l’Espagne, les Pays Bas, la Norvège, la Suède et d'autres que j'oublie.

    L'homosexualité n'est pas une maladie, ni contre nature, ni une tare ou un pêché. Nous sommes ce que nous sommes, gay et fier de l’être tant que ces droits ne nous seront pas attribués, je continuerai à prouver que nous sommes comme chaque être humain sur cette terre, c'est à dire des personnes normales.

     

     

    POUR OBTENIR CE DOCUMENT EN FORMAT PDF :

    Etre homo en France en 2010....pdf

     

     

     

  • Le lapsus de Mme Rachida DATI devenant une affaire stigmatisant certains « dysfonctionnements » de notre « justice » ?

    Sur les faits …

     

    Fin septembre 2010, Mme Rachida DATI voit son intervention dans l’émission « Dimanche +» de Canal + largement médiatisée suite à un lapsus. Au lieu de parler d’ « inflation », l’ancienne Ministre de la Justice – Garde des Sceaux parle de « fellation ». La vidéo fait rapidement le « buzz » sur Internet, tout comme dans les autres médias…

     

    Ce lapsus aurait pu s’ajouter aux nombreux autres, notamment de la classe politique, et disparaître noyé par les suivants… ces derniers étant de plus en plus rapportés médiatiquement. Pourtant, ce lapsus de Mme Rachida DATI va refaire parler de lui ! Un individu d’une quarantaine d’année, habitant Bourg-de-Péage (Drôme), trouve amusant d’envoyer un courriel à Mme Rachida DATI au Parlement Européen. Dans ce mail, il lui propose une petite « inflation ». Si l’on peut éventuellement penser à une plaisanterie, le mail va déclencher les mécanismes les plus coercitifs d’une procédure pénale : garde à vue, perquisition, saisies, contrôle judiciaire et jugement...

     

     

    Sur le plan juridique …

    L’individu s’est donc retrouvé en garde à vue pour outrage à personne chargée d’une fonction publique. Selon l’article 433-5 du Code pénal : « Constituent un outrage puni de 7500 euros d'amende les paroles, gestes ou menaces, les écrits ou images de toute nature non rendus publics ou l'envoi d'objets quelconques adressés à une personne chargée d'une mission de service public, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de sa mission, et de nature à porter atteinte à sa dignité ou au respect dû à la fonction dont elle est investie. Lorsqu'il est adressé à une personne dépositaire de l'autorité publique, l'outrage est puni de six mois d'emprisonnement et de 7500 euros d'amende. Lorsqu'il est adressé à une personne chargée d'une mission de service public et que les faits ont été commis à l'intérieur d'un établissement scolaire ou éducatif, ou, à l'occasion des entrées ou sorties des élèves, aux abords d'un tel établissement, l'outrage est puni de six mois d'emprisonnement et de 7500 euros d'amende. Lorsqu'il est commis en réunion, l'outrage prévu au premier alinéa est puni de six mois d'emprisonnement et de 7500 euros d'amende, et l'outrage prévu au deuxième alinéa est puni d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende ».

    Mme Rachida DATI possède un mandat électif au titre de sa fonction de députée européenne. Elle bénéficie donc de la protection de cet article. S’agissant des comportements visés, on peut lire que peut constituer l’infraction, les paroles, gestes, menaces, etc., ainsi que les écrits. Un mail permet la communication d’un message, la forme de la communication important peu : ici, à travers Internet. Le message a été adressé à la personne qui est visée, donc ce point ne lève pas de difficulté (incrimination restant possible si l’on sait que la personne en aura connaissance, bien que l’on ne l’adresse pas directement, mais sans pertinence en l’espèce).  

    L’article précise que le message doit ensuite porté atteinte à la dignité de la personne ou au respect dû à la fonction dont elle est investie. Peu importe le résultat obtenu, c’est-à-dire l’impact sur la victime, l’infraction est purement formelle : on condamne l’outrage en tant que tel. Selon l’arrêt de la Cour de Cassation du 18 janvier 1956, l’outrage par parole et par écrit se réalise par l’emploi de termes ou de propos grossiers, injurieux, insultants, des invectives ou des expressions méprisantes, déshonorantes pour la qualité de la personne ou la fonction (Crim. 18 janv. 1956 : Bull. Crim. n° 73). On peut penser que la proposition indécente de l’individu puisse être insultante.

    Toutefois, le message doit être en lien de causalité avec la fonction exercée par la personne. Selon la Cour de Cassation, encourt la cassation l’arrêt de condamnation qui ne précise pas les circonstances établissant que les faits d’outrage avaient trait à la fonction ou à la qualité de la personne outragée, qu’ils avaient été commis dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice desdites fonctions (Crim. 22 mars 1966 : Bull. Crim. n° 107). Par exemple, il a été jugé que l’infraction n’était pas constituée dès lors que l’injure vise la vie privée d’un personnage public, attachant le propos à la seule personne non à la fonction (Crim. 22 mars 1966 : Bull. Crim. n° 107). Ce point sera à discuter. L’avocat de l’individu a d’ailleurs précisé que son client « lui a écrit sur ce mail car c'était le seul moyen de la joindre. Il ne s'adressait qu'à Rachida Dati en tant que personne ». Il y a lieu de penser que c’est le point le plus litigieux en l’espèce. Sauf à prouver que l’individu visait Mme Rachida DATI en tant que députée européenne, on peut plutôt penser que le message fait suite au seul lapsus, indépendamment de toute fonction ; mais plutôt en tant que personne médiatisée. L’individu n’aurait-il pas écrit un message similaire si une actrice de cinéma, une présentatrice… avait effectuée un lapsus similaire ? … sachant qu’une telle personne n’aurait pas bénéficiée de cette protection.

    Sur l’élément moral de l’infraction, il faut que la personne ait connaissance de la qualité de la personne. Il sera difficile de prouver en l’espèce le contraire ! Cependant, il faut que la personne ait eu conscience du caractère outrageant de ses propos et de ses gestes (Crim. 24 juillet 1931 : Bull. Crim. n° 214). C’est donc une infraction intentionnelle. Le mobile n’étant jamais pris en compte en droit pénal (en théorie et exception faite des faits justificatifs ou actes de terrorisme), on ne peut admettre aucune excuse, y compris la plaisanterie… Une telle défense n’apparait donc pas appropriée.

    Sur la répression, l’outrage est puni de 6 mois d’emprisonnement et de 7 500 € d’amende lorsqu’il est effectué à l’encontre d’une personne dépositaire de l’autorité publique.

     

    D’un point de vue citoyen…

    Que pourrait-être le point de vue d’un citoyen lambda ?

     

    L’individu a été placé en garde à vue. Celle-ci va durer 48 heures. Son appartement a été perquisitionné et son ordinateur saisi. Nous sommes dans une période où le mécanisme de la garde à vue est largement critiqué. Particulièrement remis en cause, on critique des mises en garde à vue qui apparaissent bien souvent non justifiées pour les faits en cause. On dénonce donc une utilisation excessive de cette mesure de contrainte. En l’espèce, on peut raisonnablement s’interroger sur la nécessité d’une telle mesure et plus particulièrement sur la durée de cette mesure de contrainte !

                L’individu a été placé sous contrôle judiciaire et s’est vu interdire d’entrer en contact avec la victime.

     

                Compte tenu des moyens mis en œuvre pour résoudre une telle affaire, on peut penser que le débat sur l’existence d’une « justice à deux vitesses » soit relancé. Qui n’a pas subi des propos injurieux sur des forums… Qui ne reçoit pas des masses de mail constituant du spamming, des tentatives d’escroquerie… Pire, la mise en œuvre de tels moyens est-elle toujours observée dans des affaires de destruction de biens, de vols voire de violences sur personnes… Il va de soit que toutes les infractions doivent permettre de connaître un volet pénal : poursuite, jugement, condamnation. Cependant, ceci reste purement théorique. Il est évident que les affaires de faible gravité ne connaissent que très rarement un déclenchement pénal. On peut se demander si ces petites infractions ne concernent pas qu’une élite plus protégée.  

    L’individu comparaîtra début décembre. Reste à connaître le jugement qui sera adopté.

  • La Cour de Justice de la République

    En avril 2010, la Cour de Justice de la République rend son arrêt pour des poursuites à l'encontre de M. Charles PASQUA. Il est alors poursuivi pour des affaires de malversation qui se seraient déroulés lorsqu'il était Ministre de l'Intérieur (Casino d'Annemasse, GEC-Alsthom et Sofremi). Sixième ministres à comparaître devant cette juridiction, il est alors condamné pour complicité d'abus de biens sociaux et de recel à un an d'emprisonnement avec sursis.  

    A la suite de cette dernière affaire et compte tenu du nombre réduit d'affaires que cette juridiction connaît, on soulève la possibilité de la mettre en sommeil. Depuis sa création en 1993, elle n'a eu à connaître que de très peu d'affaires : la mise en cause de M. Laurent FABIUS, Mme Georgina DUFOIX et M. Edmond HERVE dans l'affaire du sang contaminé où seul Edmond HERVE sera condamné mais avec dispense de peine ; M. Michel GILLIBERT pour des faits d'escroquerie condamné à trois ans avec sursis ; Mme Ségolène ROYAL relaxée pour des faits de diffamation.

    La récente affaire dite « Affaire Woerth-Bettencourt » qui implique notamment le Ministre du Travail, M. Eric Woerth, relance l'intérêt pour cette institution. Il se pourrait donc que cette juridiction spéciale fasse l'objet d'une saisie. Dans ce cas, M. WOERTH serait le septième ministre à comparaître devant la Cour de Justice de la République.

    Assez méconnu, il semblait intéressant de revenir brièvement sur cette institution particulière de notre système judiciaire.

    Au sein des juridictions répressives de l'ordre judiciaire, la Cour de Justice de la République (CJR) est une juridiction d'exception qui se caractérise par son caractère politique. En effet, elle est compétente pour connaître des crimes et des délits commis par les membres du gouvernement dans l'exercice de leurs fonctions.

    Cette institution a été créée par la loi constitutionnelle n° 93-952 du 27 juillet 1993 qui introduit deux articles dans la Constitution. Aujourd'hui, on peut lire au Titre X de la Constitution, Titre intitulé « De la responsabilité pénale des membres du Gouvernement (articles 68-1 à 68-3) », trois articles ainsi rédigés :

    « Art. 68-1. - Les membres du gouvernement sont pénalement responsables des actes accomplis dans l'exercice de leurs fonctions et qualifiés crimes ou délits au moment où ils ont été commis.

    Ils sont jugés par la Cour de justice de la République.

    La Cour de justice de la République est liée par la définition des crimes et délits ainsi que par la détermination des peines telles qu'elles résultent de la loi.

    Art. 68-2. - La Cour de justice de la République comprend quinze juges : douze parlementaires élus, en leur sein et en nombre égal, par l'Assemblée Nationale et par le Sénat après chaque renouvellement général ou partiel de ces assemblées et trois magistrats du siège à la Cour de cassation, dont l'un préside la Cour de justice de la République.

    Toute personne qui se prétend lésée par un crime ou un délit commis par un membre du gouvernement dans l'exercice de ses fonctions peut porter plainte auprès d'une commission des requêtes.

    Cette commission ordonne soit le classement de la procédure, soit sa transmission au procureur général près la Cour de cassation aux fins de saisine de la Cour de justice de la République.

    Le procureur général près la Cour de cassation peut aussi saisir d'office la Cour de justice de la République sur avis conforme de la commission des requêtes.

    Une loi organique détermine les conditions d'application du présent article.

    Art. 68-3. - Les dispositions du présent titre sont applicables aux faits commis avant son entrée en vigueur. ».

    Notons simplement qu'avant cette réforme, les ministres étaient responsables pénalement devant la Haute Cour de Justice, compétence désormais limitée au seul chef de l'Etat. Le fonctionnement de cette Haute Cour avait suscité des critiques, ce qui a alors entrainé cette révision aboutissant à une Haute Cour de Justice et une Cour de Justice de la République. Nous allons donc nous attacher au fonctionnement de cette dernière.

    •1)     Instruction devant la CJR

    La CJR possède deux commissions : une commission des requêtes et une commission d'instruction.

    •a)     La Commission des requêtes :

    Cette commission est composée de sept membres titulaires et de sept membres suppléants. Ils sont désignés pour une durée de cinq années par leur juridiction d'appartenance. Sur ces sept membres, on retrouve trois conseillers à la Cour de Cassation dont l'un exerce des fonctions de président, deux conseillers d'Etat et deux conseillers-maîtres à la Cour des comptes.

    Cette commission apprécie si la plainte déposée contre le ministre doit faire l'objet de poursuite. La décision prise par cette commission n'est pas soumise à un recours. En cas de classement, l'affaire s'arrête donc à ce premier stade. Au contraire, la commission peut qualifier les faits et renvoyer au Procureur Général de la Cour de Cassation. Ce dernier va saisir la commission d'instruction par un réquisitoire visant le ministre (ou secrétaire d'Etat) en question.

    Notons que le Procureur Général de la Cour de Cassation peut saisir d'office la Commission d'instruction, mais il doit avoir obtenu l'avis conforme de la Commission des requêtes.

    •b)     La Commission d'instruction :

    Cette commission est composée de trois membres titulaires et de trois membres suppléants désignés parmi les magistrats de la Cour de Cassation. Ils sont en place pour une durée de trois ans. Un des membres doit avoir des fonctions de président.

    Cette commission procède à l'instruction de façon collégiale. Elle effectuera l'ensemble des actes dans le respect des principes de la procédure pénale. Elle devra notamment respecter les droits de la défense comme le secret de l'instruction...

    Notons qu'à l'image de la procédure pénale de droit commun, si la commission d'instruction souhaite instruire sur de nouveaux faits, elle devra obtenir un réquisitoire du Procureur Général, qui le délivrera après l'avis conforme de la Commission des requêtes. Par contre, sur les faits dont elle est saisie, la Commission d'instruction n'est pas tenue par la qualification proposée et peut requalifier.

    De plus, on remarque que la constitution de partie civile devant cette juridiction n'est pas recevable, alors que la personne qui se croit victime d'un crime ou délit peut porter plainte devant la Commission des requêtes.

    A la fin de l'instruction, la Commission d'instruction transmet l'affaire au Procureur Général de la Cour de Cassation. Celui-ci va alors prendre ses réquisitions. Le mis en examen a un délai de vingt jours pour soulever des nullités. La Commission d'instruction peut alors prendre deux types de décision : classer l'affaire ou poursuivre. Un pourvoi est possible devant la Cour de Cassation en formation plénière. En cas de poursuite, la juridiction de jugement sera saisie.

    •2)     Jugement devant la CJR

    Il faut exposer sa formation avant d'envisager son fonctionnement.

    •a)     Formation de la CJR

    La formation de jugement est composée de quinze juges :

    • - Douze parlementaires: six députés et six sénateurs, élus par leur assemblée (Assemblée Nationale et Sénat) après chaque renouvellement général ou partiel.
    • - Trois magistrats du siège de la Cour de Cassation, élus par leur Cour. Un de ces magistrats préside la Cour de Justice. Actuellement, la CJR est présidée par M. Henri-Claude LE GALL.

    Un juge peut se récuser ou peut être dans l'impossibilité de juger. Dans ce cas, un suppléant prend sa place.

    Les fonctions de greffiers de la CJR sont effectuées par le Greffier en chef de la Cour de Cassation.
    De même, les fonctions de parquet sont dévolues au Procureur Général près la Cour de Cassation, appuyé par le Premier Avocat Général et de deux avocats généraux.

    •b)      Fonctionnement

    La formation de jugement siège après renvoi d'une procédure par la commission d'instruction. Elle applique alors les règles de la procédure pénale, à l'exception du fait qu'elle procède selon la procédure applicable aux jugements en matière correctionnelle (même en cas de crime).

    Les délibérations peuvent être comparées à celles d'une Cour d'assises. Le vote s'effectue à bulletins secrets à la majorité absolue pour chaque chef d'accusation. Après avoir délibérés sur la culpabilité, le même procédé est utilisé pour délibérer sur la peine.

    L'arrêt doit être motivé. Il est susceptible de faire l'objet d'un pourvoi devant l'Assemblée Plénière de la Cour de Cassation. Si elle casse l'arrêt, l'affaire sera renvoyée devant la CJR autrement formée.     

     

    Il est possible de contacter la Cour de Justice de la République, dont voici les coordonnées :

    Adresse : 21, rue de Constantine 75007 Paris 
    Téléphone : +33 1 44 11 31 00
    Télécopie : +33 1 44 11 31 39
    Courriel : courdejustice.courdecassation@justice.fr

     

  • Laissez les morts reposer en paix !

    A l’image de l’infraction sur le respect de la volonté des morts qui sanctionne les atteintes portées à la liberté des funérailles (Roux-Demare François-Xavier, L’atteinte à la liberté des funérailles, http://fxrd.blogspirit.com/archive/2010/02/17/l-atteinte-a-la-liberte-des-funerailles.html), l’incrimination portant sur les atteintes au respect dû aux morts ne trouvait pas vraiment d’application judiciaire. Cependant, le développement des jeux de rôle organisés dans des cimetières ainsi que la multiplication des profanations de tombes ont malheureusement donnés un nouvel intérêt à cette incrimination. Certes, les jeux de rôle ne donnent pas lieu à la même médiatisation, ni aux mêmes préjudices, que les profanations. Plus particulièrement, on remarque que l’actualité relève désormais régulièrement différentes affaires de profanation de tombes ayant un caractère xénophobes. Le 28 janvier 2010 dans un cimetière de Strasbourg, 18 stèles juives ont été marquées de croix gammées ou d’inscriptions néo-nazies, alors que 13 stèles étaient renversées (Profanation de 18 tombes dans un cimetière juif de Strasbourg, Le Point, 27 janvier 2010 ; Strasbourg : la profanation d’un cimetière juif provoque une vive émotion, La Voix du Nord, 27 janvier 2010 ; Profanation d’un cimetière juif de Strasbourg, Le Monde, 27 janvier 2010).

    Prévue à l’article 360 de l’Ancien Code Pénal, cette incrimination permet de protéger le respect que possède un mort. De la même façon, on se rend aussi compte que le but de cette incrimination est de protéger, par voie de conséquence, la tristesse des vivants qui doivent pouvoir espérer la préservation de ces lieux de recueillement et de rappel d’êtres chers. Cet article était ainsi rédigé : « Sera puni d’un emprisonnement de trois mois à un an, et « de 500 F à 15 000 F » d’amende, quiconque se sera rendu coupable de violation de tombeaux ou de sépultures ; sans préjudice des peines contre les crimes et les délits qui seraient joints à celui-ci ».

    Pour favoriser cette protection, l’article 225-17 du Nouveau Code Pénal reprend cette incrimination, complétant ses dispositions en élargissant le domaine d’application du texte et aggravant la répression lors de la commission de ces actes. Il dispose alors que « Toute atteinte à l'intégrité du cadavre, par quelque moyen que ce soit, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.  La violation ou la profanation, par quelque moyen que ce soit, de tombeaux, de sépultures, d'urnes cinéraires ou de monuments édifiés à la mémoire des morts est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. La peine est portée à deux ans d'emprisonnement et à 30 000 euros d'amende lorsque les infractions définies à l'alinéa précédent ont été accompagnées d'atteinte à l'intégrité du cadavre ».

    Cette incrimination prévoit deux comportements distincts : 

    - Porter atteinte au cadavre : on peut relever trois types de comportements : sexuels, médicaux ou relatif à l’attrait du gain… attouchements, nécrophilie (attirance sexuelle pour les cadavres), expérimentation, prélèvement d’organe, vols d’objets (bijoux par exemple) ou de dents en or.  

    - Porter atteinte aux tombeaux, sépultures, urnes cinéraires ou monuments édifiés à la mémoire des morts. Ce sont donc les atteintes faites au lieu où repose le défunt ; voire les monuments en leur mémoire (sans forcément de dépouilles). On trouve aussi une multitude de comportements : casser un cercueil, une tombe, le tombeau, les stèles… les dégrader par des inscriptions, des dessins… porter atteinte à l’ornement de la tombe en arrachant les fleurs… Toutefois, il faut un véritable comportement positif. Les paroles ne rentrent pas dans le cadre de cette incrimination. On se reportera aux incriminations d’injures et de diffamation pour ce type de comportements. Pourtant, cette solution semble s’imposer « pour des raisons de preuve mais peut être discutée car la « profanation », également visée par le texte d’incrimination, peut se commettre par tout moyen » (DREYER Emmanuel, Droit Pénal Spécial, Ellipses, 2008, p : 24). Dans l’affaire du 28 janvier 2010, c’est ce comportement qui se trouve réalisé : une atteinte aux sépultures. 

    - Notons que la profanation de tombeau accompagnée d’une atteinte au cadavre est punie de 2 ans d’emprisonnement et 30 000 € d’amende.

    On peut reprendre quelques illustrations de la matérialité de cette incrimination : lancer volontairement des pierres dans la fosse devant recevoir les cendres d’un mort (Bordeaux, 9 déc. 1830, S. 1831.2.263) ; enlever et briser le Christ placé sur la poitrine d’un défunt (Paris, 8 juill. 1875, S. 1875.2.292) ; détruire systématiquement les fleurs fraîches et les pots les contenant déposés sur une tombe (Crim. 8 fév. 1977, Bull. Crim. n° 52) ; porter des coups sur la pierre tombale, endommageant le tombeau ainsi que les objets apposés dessus (Paris, 22 nov. 1990, Dr. Pénal 1991.200).  Renverser des stèles et marquer des inscriptions sur des tombes apparaissent comme des exemples-types de la matérialité de cette incrimination.

    S’agissant de l’élément moral, il va de soit que l’auteur doit avoir eu conscience de porter atteinte au respect dû aux morts (Nancy, 16 mars 1967, D. 1971, somm. 212). L’infraction est intentionnelle. Tel ne sera pas le cas d’un corps déterré par une pelleteuse réalisant des travaux (Crim. 3 avr. 1997 : Dr. Pénal 1997, comm. 122) ou le fait d’exhumé un corps sur décision de justice dans le but d’effectuer une autopsie, une exhumation ordonnée par la commune à l’expiration de concessions, pour un transfert de corps ou transformation de caveau (Bayonne, 10 oct. 1974, Gaz. Pal. 1975, 1, Somm. 163).
    L’autorisation de la loi permet de justifier certains actes.
    Pour revenir sur l’affaire citée, l’élément moral ne semble pas posé de difficulté !

    Il convient désormais de parler de l’aggravation en raison du mobile. Comme le souligne la circulaire du 14 mai 1993 (§ 194), « la prise en compte du mobile raciste pour ce type d’infraction témoigne de la volonté du législateur de combattre avec plus de fermeté des agissements particulièrement odieux ».
    Les peines sont augmentées lorsque l’acte est réalisé à raison d’un mobile raciste ou religieux (Article 225-18 du Code Pénal). La peine est de 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende pour la commission de l’un ou l’autre de ces actes, lorsque ces actes sont commis à raison de l’appartenance ou la non-appartenance, vraie ou supposés, des personnes décédées à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée. Ces peines s’élèvent à 5 ans et 75 000 € lorsque les deux comportements se trouvent réalisés dans le même temps.
    La preuve de cette aggravation ressort en général de l’existence des inscriptions racistes, voire dans des hypothèses de profanation de grande ampleur et systématiquement dirigées contre les sépultures de personnes qui appartiennent à la même communauté (Circulaire du 14 mai 1993, préc.).  En l’espèce, le caractère raciste ne fait aucun doute : les inscriptions néo-nazies ne laissent pas de place au doute.

    Pour conclure, les personnes auteur de ces actes encourent une peine de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende.

     

    Cette note fait l'objet d'une publication au sein de la Gazette d'actualité juridique sur le site de la Faculté de Droit Virtuelle de l'Université Jean Moulin Lyon 3, numéro de mars 2010.

  • Etats Généraux du Notariat : communiqué de presse final

    Suite à l'annonce faite sur ce blog de la tenue des Etats Généraux du Notariat ce 28 janvier 2010, je publie aujourd'hui le communiqué de presse du bilan de cette journée, avec l'aimable autorisation de Mme Elodie LARCIS.

    MICHELE ALLIOT - MARIE :

    « une profession unique du droit est illusoire »

     

    Paris, le 29 janvier 2010 - Devant plus de 7200 notaires réunis ce jeudi 28 janvier à Paris au Zénith, Madame Alliot-Marie, Ministre de la Justice et des Libertés a voulu répondre aux inquiétudes exprimées par le notariat à l'occasion de ses Etats généraux. Elle l'a fait dans son discours, mais également en lisant un message adressé aux notaires par le Président de la République.

    Pour la Ministre de la Justice, « proximité, sécurité juridique, accessibilité du droit  sont « les atouts du notariat qui contribuent à la sérénité de notre justice et à la confiance des justiciables ». Cette confiance, a-t-elle dit, « nous oblige à préserver un modèle de droit continental dont vous êtes l'un des piliers. Un modèle que rien ni personne ne remettra en cause tant que j'exercerai les fonctions qui sont les miennes. Cela implique de défendre les intérêts du notariat quand ils sont menacés ». Et pour la Garde des Sceaux qui a fait référence au rapport Darrois, « préserver l'identité du notariat implique de promouvoir le dialogue entre les professions ». Elle a ainsi affirmé « je n'ai nullement l'intention de fusionner les professions, en gommant toute différence entre juristes, au profit d'une illusoire profession unique du droit ».

    Elle a ainsi qualifié « d'équilibré » le projet de loi qu'elle a préparé au cours d'une longue concertation entre représentants du barreau et représentants du notariat et qui prévoit la reconnaissance d'un acte contresigné par avocat. Et la Garde des sceaux a résumé cet équilibre : «les avocats contresignent. Les notaires authentifient. La règle est claire et ne souffrira aucune exception ».

    La Ministre de la Justice a enfin invité les notaires à valoriser les atouts de la profession qu'elle juge « moderne, dynamique et ouverte sur le monde », à conquérir un avenir qui se construira « avec votre passion du droit, votre sens de l'intérêt général et votre amour de la France ».

    Après avoir conclu son propos, Madame Alliot-Marie a lu un message du Président de la République : « L'année qui vient de s'écouler a été une année difficile, votre activité a souffert de la crise » indique-t-il. Saluant le fait que le notariat a « depuis longtemps » pris toute sa part « dans la promotion de notre système juridique », le chef de l'Etat a affirmé que « les professions juridiques française ne peuvent s'offrir le luxe de la division ».  Soulignant que « l'acte authentique est l'un des fondements de notre système de droit », il a indiqué que « il ne revient à personne de le remettre en cause ni de remettre en cause le monopole dont vous disposez. A bien des titres, a-t-il écrit, votre profession est exemplaire. Vous disposez d'un rôle essentiel. Soyez sur de votre force, soyez surs aussi de mon soutien et de ma confiance » concluait ce message du Président de la République.

    Auparavant, le Président du Conseil supérieur du notariat, Jean-Pierre Ferret avait souligné que « les notaires de France ont le sentiment d'une perte de confiance de l'Etat en ses officiers publics ». Un sentiment, qui « s'appuie sur des faits tangibles et répétés » et « est d'autant plus fort que les notaires de France n'ont jamais  manqué de loyauté envers les pouvoirs publics. Vous le savez, le notariat, contrairement à d'autres, n'a jamais appelé à la désobéissance civile »

     Soulignant que ces Etats généraux du notariat avaient pour objectif de « toujours mieux servir leurs clients, le Président du CSN affirmait que : « fort de la confiance renouvelée de l'Etat, le notariat s'engage à poursuivre son adaptation pour toujours répondre avec la même efficacité et sécurité aux attentes des usagers et des pouvoirs publics ». C'est dans cette perspective qu'ont été présentées au cours de la journée les propositions du plan stratégique du notariat : « Projet des notaires de France Horizon 2020 » apportant des réponses concrètes dans le service rendu aux clients (notamment un renforcement du conseil, très attendu par le public), une nouvelle approche dans l'organisation des offices notariaux et des moyens dont ils disposent, par la mutualisation de moyens et de compétences, la mise en œuvre de structures spécialisées et des outils de  pilotage des offices leur permettant une meilleure anticipation. Une volonté exprimée par la signature d'un acte d'avenir par lequel la profession notariale s'engage résolument dans cette voie. Un acte signé devant la Ministre de la Justice sur support électronique.

     

    Contacts presse 

     Agence Hopscotch

    Elsa Pillette Renouard - epillette@hopscotch.fr / 01 58 65 00 30

    Elodie Larcis - elarcis@hopscotch.fr / 01 58 65 00 22

    Conseil supérieur du notariat 

    Nathalie de Saint Blanquat - nathalie.desaintblanquat@notaires.fr / 01 44 90 31 74

  • La Cour de Cassation est-elle homophobe ?

     

    Après le tumulte provoqué par l’arrêt de la Cour de Cassation du 12 novembre 2008, n’ayant d’ailleurs pas fait l’objet d’une publication au bulletin criminel ; il semblait nécessaire de revenir sur cette affaire dite « Affaire Vanneste » suite à des propos contre les homosexuels. Cet article fait l'objet d'une publication sur la Gazette d'Actualité de la Faculté de Droit de l'Université Jean Moulin Lyon 3, d'avril 2009 http://fdv.univ-lyon3.fr/modules/gazette/?numero=78#_ftnref42. Vous pouvez donc le retrouver, mais sous l'intitulé "La Cour de Cassation et l'homophobie". Le titre initial apparaissait trop provoquant. J'ai tenu tout de même à conserver ce titre "La Cour de Cassation est-elle homophobe ?" pour la publication sur ce blog. Pendant les semaines qui ont suivi cette affaire, il m'a semblé que la question qui était posé en filigrane était celle-ci ... Voici cet article dans un format PDF Article_sur_l-Affaire_Vanneste.pdf

     

    « Je n'ai pas dit que l'homosexualité était dangereuse, j'ai dit qu'elle était inférieure à l'hétérosexualité »  … « Mais là, ils ne représentent rien, aucun intérêt social. Pour moi, leur comportement est un comportement sectaire » … « Je critique les comportements, je dis qu'ils sont inférieurs moralement » … Voici quelques morceaux choisis de propos tenus par le Député Christian Vanneste sur le sujet de l’homosexualité[1]. La diffusion de ces propos a donné lieu à l’affaire judiciaire largement médiatisée, et accentuée par des rebondissements !

    Tout commence au début de l’année 2005, lorsque le Député Vanneste tient ces propos rapportés dans différents articles de journaux[2]. Une plainte est déposée contre lui pour injures publiques envers un groupe de personnes à raison de leur orientation sexuelle par l'association Act Up Paris, le Syndicat national des entreprises gaies (SNEG) et l'association SOS Homophobie. Cette poursuite s’appuie sur le fondement de l'article 33, alinéa 4, de la loi du 29 juillet 1881[3] modifié par la loi du 30 décembre 2004[4].Cette dernière loi renforce la lutte contre les propos discriminatoires à caractère sexiste ou homophobe. L’article 33 alinéa 4 de la loi de 1881 dispose que « Sera punie des peines prévues à l’alinéa précédent l’injure commise dans les mêmes conditions envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de leur handicap »[5]. L’alinéa précédent prévoit une peine de 6 mois d’emprisonnement et de 22 500 € d’amende[6]. Dès lors, on peut indiquer quelques éléments de définition de cette incrimination. L’injure publique se définit comme : « toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait est une injure »[7]. Il n’y a alors d’injure punissable qu’autant que les expressions employées rentrent dans cette définition[8]. D’ailleurs, la Cour de Cassation souligne bien que l’incrimination d’injure touche, dans tous les cas, à la liberté d’expression telle que la réglemente la loi du 29 juillet 1881, et il n’importe, au regard des éléments qui les constituent, que les infractions prévues par cette loi soient réprimées par d’autres textes[9]. L’appréciation du caractère outrageant des propos doit s’effectuer en fonction de leur contexte et des nécessités de la discussion[10]. Ces propos doivent créer une atteinte personnelle[11], non être qualifiés d’attaques générales[12]. Ils doivent donc s’adresser à des individus clairement identifiés. De plus, cette injure nécessite un caractère de publicité, faute de quoi on entre dans la définition de la contravention d’injure non publique sanctionné par l’article R. 621-2 du Code Pénal[13]. Concernant l’imputabilité de cette infraction, l’intention de nuire est présumée en matière d’injures[14]. Seule l’excuse de provocation permet de leur ôter le caractère punissable[15], et uniquement dans le cadre des injures envers des particuliers[16]. Appréciée souverainement par les juges du fond[17], la preuve de la provocation doit être rapportée par le prévenu qui prétend en bénéficier[18]. Enfin, il faut préciser que l’injure se distingue de la diffamation par une absence de faits précis, l’injure consistant en une expression outrageante ne renfermant l’imputation d’aucun fait déterminé[19].

    En première instance, le Tribunal Correctionnel de Lille condamne le Député Vanneste à 3 000 € d’amende.Devant la Cour d’appel de Douai en 2007, cette condamnation est confirmée[20]. Les juges d’appel soulignent que « ces propos sont contraires à la dignité des personnes qu'ils visent en considérant que l'homosexualité est une menace pour la survie de l'humanité, même s'il se place d'un point de vue philosophique et sont de nature à inciter à la haine, à la violence ou à la discrimination ; qu'en effet, il s'agit d'une présentation tendancieuse de l'homosexualité qui était de nature à susciter chez les lecteurs des réactions de rejet, Christian Vanneste précisant qu'il y a un modèle social qui est celui du mariage hétérosexuel et de l'éducation des enfants ; que comme l'a relevé le tribunal en stigmatisant le comportement homosexuel comme ne pouvant être qu'exclu ou vécu dans la clandestinité, il a manifesté, de manière outrageante, son intolérance envers les personnes qui ont fait le choix d'une orientation sexuelle ; que, bien plus, souligner l'infériorité morale de l'homosexualité rentre dans le champ d'application de l'article 33 susvisé dès lors que les fondements philosophiques de ce jugement de valeur ne s'inscrivaient pas dans un débat de pensée, mais dans une réponse destinée à être insérée dans un organe de presse s'adressant à un large public qui ne permettait pas de découvrir les fondements et les nuances de la pensée de Christian Vanneste agrégé de philosophie et qui s'exprimait en tant qu'homme politique ».  Le Député Vanneste forme alors un pourvoi en cassation, avec à l’appui trois moyens d’action ; donnant lieu à une réponse de la Cour par l’arrêt du 12 novembre 2008[21].

                Le premier moyen avancé par le demandeur au pourvoi s’appuie sur son statut particulier de parlementaire. Comme tout député de l’Assemblée Nationale, il bénéficie d’une immunité quant aux propos tenus au sein de l’hémicycle[22]. Selon l’article 41 de la loi du 29 juillet 1881, « Ne donneront ouverture à aucune action les discours tenus dans le sein de l'Assemblée nationale ou du Sénat ainsi que les rapports ou toute autre pièce imprimée par ordre de l'une de ces deux assemblées. Ne donnera lieu à aucune action le compte rendu des séances publiques des assemblées visées à l'alinéa ci-dessus fait de bonne foi dans les journaux ». Toutefois, cette disposition ne couvre que les discours prononcés dans l’hémicycle. En l’espèce, les propos sont rapportés en-dehors de l’Assemblée Nationale. Comme moyen au pourvoi, M. Vanneste fait valoir cette immunité et expose le fait que les propos tenus devant le journaliste ne sont que le rappel ou la confirmation de ses propos dans l’hémicycle. Il ne fait alors que confirmer la portée de ses déclarations, peu de temps après les débats parlementaires. La Cour de Cassation écarte logiquement ce moyen en soulignant que les propos de M. Vanneste n’était pas tenu dans l’exercice des fonctions parlementaires, par renvoi aux activités prévues aux titres IV (« Le Parlement ») et V (« Des rapports entre le Parlement et le Gouvernement ») de la Constitution.

                Le second moyen se fonde sur la violation des articles 10 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, 593 du code de procédure pénale. Il soulève le fait que les juges du fond n’aient pas accueilli l’exception d’illégalité de la loi du 30 décembre 2004. Il invoque le droit à la liberté d’expression (ainsi que la liberté d’opinion) protégé par l’imminente convention du Conseil de l’Europe[23]. Il rappelle que ce droit ne peut être limité, selon cette même convention, qu’à raison de restrictions et de sanctions prévues par la loi constituant des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui. Or, selon le Député Vanneste, la loi du 30 décembre 2004 ne répondait pas aux caractéristiques prévues pour restreindre la liberté d’expression. L’adoption de cette loi permet de créer la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (Halde). De plus, elle modifie l'article 33 de la loi du 29 juillet 1881 dans le but de réprimer l'injure en raison de l'orientation sexuelle. Selon le prévenu, cette loi ne répond pas aux conditions d’accessibilité et de prévisibilité suffisante, en visant notamment l’expression « orientation sexuelle » jugée trop vague et imprécise. De même, cette loi n’est pas une mesure nécessaire car elle ne répond pas à un besoin social impérieux (faisant la distinction avec la race, le sexe ou le handicap). Puis, il rapporte le caractère disproportionné de l’interprétation de l’article 33 de cette loi qui ne permet pas d’effectuer des comparaisons entre l’hétérosexualité et l’homosexualité au regard de l’avenir de l’humanité ; tout comme la disproportion des peines de prison ferme pour des injures contre des personnes à raison de leur orientation sexuelle, puisque cela ne relève pas d’un état des personnes (faisant de nouveau une distinction avec les injures à caractère raciste ou antisémite). Enfin, il évoque des mesures créant une inégalité de traitement entre les hétérosexuels et les homosexuels. La Cour de cassation écarte ce moyen puisque la protection offerte par les dispositions de l'article 9 du Code civil[24] et les articles 225-1 et 225-2 du Code pénal[25] ne permettent pas d'interdire des propos injurieux ou diffamatoires envers une personne ou un groupe de personnes à raison de l'orientation sexuelle. La liberté d’expression peut connaître des limites et restrictions nécessaires prévues par la loi.  Tel est le cas en l’espèce, la loi du 30 décembre 2004 s’avère bien nécessaire pour assurer cette protection.

                Sur le dernier moyen, le prévenu fait valoir que la Cour de cassation doit exercer son contrôle sur le sens et la portée des propos litigieux. Ceux-ci (« Il existe un modèle social qui est celui du mariage hétérosexuel et de l'éducation des enfants » ou que face à ce modèle social l'homosexualité doit être qualifiée de « menace pour la survie de l'humanité ») ne constituent que l'expression d'une opinion qui ne dépasse pas les limites admissibles de la liberté d'expression. Dès lors, ces propos ne constituent pas une injure au sens de cette loi. Plus encore, ces diverses expressions sont mesurées, exempts de toute invective et de volonté de blesser. Elles ne visent qu’à nourrir un débat quant à la nécessité d'adopter le texte qui sert de base à l'incrimination. Sous le visa des articles 29 de la loi du 29 juillet 1881 et 10 de la Convention européenne des droits de l'homme, la Cour de Cassation casse et annule, sans renvoi[26], l’arrêt de la Cour d’appel. La Haute juridiction rappelle tout d’abord qu'en matière de presse, il lui appartient d'exercer son contrôle sur le sens et la portée des propos poursuivis[27] ; que les restrictions à la liberté d'expression sont d'interprétation étroite. Puis,  elle souligne que « si les propos litigieux, qui avaient été tenus dans la suite des débats et du vote de la loi du 30 décembre 2004, ont pu heurter la sensibilité de certaines personnes homosexuelles, leur contenu ne dépasse pas les limites de la liberté d'expression, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes et principe ci-dessus susvisés ». Dès lors, le fait d’évoquer « l’infériorité morale de l’homosexualité » dans les suites des débats parlementaires relatifs à une loi entre donc dans le cadre de la liberté d’expression.

                Comme on pouvait s’y attendre, cette décision a soulevé des réactions très partagées. D’un côté, SOS Homophobie indique que « la décision de la Cour de Cassation semble relever d’un autre âge », soulignant une analyse non conforme à l’esprit de la loi du 30 décembre 2004[28]. De même, M. Jean-Luc Roméro, Ancien secrétaire national de l’UMP et Président d’Elus Locaux contre le Sida, partage son étonnement sur cette décision qui ne prend pas compte de la loi pénalisant les propos homophobes voulue par le Président de la République Jacques Chirac. Il s’inquiète d’une hiérarchie entre les propos antisémites et racistes sanctionnés et les propos homophobes inclus dans la liberté d’expression[29]. D’un autre côté, plusieurs applaudissent à cette annonce. M. Philippe Bliger, Avocat Général près de la Cour d’Appel de Paris, se réjouit de cette « formidable nouvelle pour la liberté d’expression, pour la démocratie »[30], annonce sans véritable surprise[31].  

                Dans les revues juridiques, cet arrêt de la Cour de cassation n’a pas provoqué un fleuve d’encre noir… M. Félix Rome, après avoir évoqué une perception possible du sens de l’arrêt malgré « un caractère désespérément sibyllin de sa motivation », ironise en expliquant que cette décision paraît « signifier que des propos simplement stupides, quoique choquants, mais qui ne véhiculent pas un message haineux et outrageant, demeurent dans les limites de la liberté d’expression »[32]. Pour M. Jean Pradel, Professeur émérite de l’Université de Poitiers, bien que l’arrêt n’indique pas si le délit était constitué, il ne semble pas l’être[33]. Les propos tenus par M. Vanneste ne doivent être analysés que comme un jugement de valeur, non comme des injures. De toute façon, M. Pradel rappelle que la place du délit est réduite de par son renvoi à la liberté d’expression d’interprétation étroite[34], laissant plus de place au domaine du permis de dire qu’à celui du non permis de dire. D’ailleurs, il évoque la protection supranationale de cette liberté d’expression que semble respecter l’espèce.

    Sur la consécration supranationale, on peut rappeler que la liberté d’expression fait l’objet d’une large protection textuelle : Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyens[35], Pacte International des Droits Civils et Politiques[36], Convention Européenne des Droits de l’Homme[37] ainsi que sa jurisprudence[38]. La Cour Européenne des Droits de l’Homme rappelle que la liberté d’expression constitue l’un des fondements essentiels d’une société démocratique, l’une des conditions primordiales de son progrès et de l’épanouissement de chacun[39]. Elle est d’ailleurs favorable à une certaine provocation, acceptant une certaine dose d’exagération, voire même de provocation pour la liberté journalistique[40] ; ou accueillant les idées qui heurtent, choquent ou inquiètent l’Etat ou une fraction quelconque de la population[41].    

    Le professeur Pradel conclut que « finalement tout allait dans le sens d’une impossible condamnation de M. Vanneste. Droit européen et droit interne marchent du même pas dans cette affaire. On se félicitera de cet arrêt courageux car la liberté d’exprimer une idée doit inclure celle de critiquer des comportements ». Il ne fait pas de doute que juridiquement l’infraction d’injure publique ne permettait pas d’incriminer les propos du Député Vanneste. Dès lors, il ne paraît pas possible de rejeter la faute sur les magistrats de la Cour de cassation. Pourtant, il aurait été peut-être préférable pour une fois, et ce qui est des plus paradoxaux, que la France connaisse une condamnation par la Cour Européenne des Droits de l’Homme, beaucoup plus justifiable que bien d’autres ! De la même façon, on peut largement rejoindre le fait qu’il est louable de pouvoir critiquer des comportements. Toutefois, il paraît souhaitable d’encadrer cette liberté de critique de façon juste et adéquate. Il me semble que les homosexuels, pour refuser l’expression de « comportement homosexuel », peuvent connaître les critiques ou les caricatures. Pourtant, sommes-nous encore dans le simple cadre de la critique lorsque l’on place des individus au-dessous d’autres… Ou lorsqu’il faut comprendre que les homosexuels sont des sous-hommes. De la même façon, j’aimerais rejoindre M. Vanneste lorsqu’il indique que cette loi du 30 décembre 2004 n’est pas nécessaire. Malheureusement, les propos tenus semblent démontrer le contraire ; pire, montrer ses lacunes ! Si vous risquez d’être condamné pour avoir insulté une personne de « tapette », de « lopette »[42] ou d'expressions plus vulgaires ; vous avez tout le loisir d’évoquer l’infériorité et le risque pour l’humanité que représente l’ensemble des homosexuels. Doit-on alors se réjouir de cette avancée pour la liberté d’expression ? En tout cas, on ne peut pas s’en réjouir pour l’avancée des droits de l’Homme et de l’humanité !



    [1] Voici un extrait plus conséquent des propos du Député : « Est-ce que j'ai appelé à une quelconque violence ? Mes propos ne sont pas discriminatoires car je ne m'en prends pas à une ethnie ou une race mais à un comportement. Je porte un jugement moral que j'ai parfaitement le droit d'émettre. L'homosexualité n'est pas une fatalité. L'homme est libre. C'est un comportement qu'il faut soit quitter, soit assumer. Si on l'assume, ça doit être dans la discrétion et non en s'affichant comme membres d'une communauté réclamant des droits particuliers et une reconnaissance particulière sur le plan social. J'accepte le comportement, je refuse l'identité de groupe. C'est une ineptie de prétendre qu'il y a comportement de groupe. Je précise encore que je n'ai aucune agressivité à leur encontre. Simplement, je considère qu'ils ne forment ni un groupe ni une communauté. Ce sont des comportements individuels qui ne doivent pas jouir d'une reconnaissance à travers les termes intégrés de la loi. Je n'interdis rien, je ne demande aucune stigmatisation, aucune punition. Simplement que ça reste un comportement individuel, le plus discret possible... Je n'ai pas dit que l'homosexualité était dangereuse, j'ai dit qu'elle était inférieure à l'hétérosexualité. Si on la poussait à l'universel, ce serait dangereux pour l'humanité. Il y a un modèle social qui est celui du mariage hétérosexuel et de l'éducation des enfants... S'ils étaient représentants d'un syndicat, je les recevrais volontiers. Mais là, ils ne représentent rien, aucun intérêt social. Pour moi, leur comportement est un comportement sectaire... ».

    [2] Voir l’article paru le 26 janvier 2005 dans le journal « La Voix du Nord » du 26 janvier 2005 ou l’article paru dans le journal « Nord Eclair » du 4 février 2005.

    [3] Loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, JORF du 30 juillet 1881 page 4201.

    [4] Loi n° 2004-1486 du 30 décembre 2004 portant création de la haute autorité de lutte contre les discriminations pour l’égalité, JORF du 31 décembre 2004 texte 3.

    [5] Notons que l’article 32 de la loi de 1881 s’est aussi vu rajouter le même alinéa, article concernant la diffamation publique.

    [6] En cas de diffamation publique, le texte prévoit une peine d’un an d’emprisonnement et d’une amende de 45 000 €.

    [7] Loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, préc., article 29 alinéa 2.

    [8] Crim. 3 mai 1956 : Bull. Crim. n° 344 ; Crim. 12 juin 1956 : Bull. Crim. n° 458. 

    [9] Crim. 5 novembre 1974 : Bull. Crim. n° 312.

    [10] Crim. 4 décembre 1973 : Bull. Crim. n° 448. 

    [11] Crim. 26 mai 1987: Bull. Crim. n° 218 ; Crim. 19 mars 2002 : Bull. Crim. n° 67.

    [12] Crim. 9 avril 1937 : Bull. Crim. n° 68.

    [13] Crim. 22 mai 1974 : Bull. Crim. n° 196 ; Crim. 5 novembre 1974 : Bull. Crim. n° 312 (préc.) ; Crim. 7 mai 1995 : Bull. Crim. n° 119.

    [14] Crim. 18 janvier 1950 : Bull. Crim. n° 23 ; Paris, 2 mars 1995 : Dr. Pén. 1995. 121, obs. Veron. 

    [15] Crim. 10 mai 2006 : D. 2006. 2220, note Dreyer.

    [16] Crim. 15 mars 2005 : Bull. Crim. n° 89 ; Paris, 2 mars 1995 : Dr. Pén. 1995. 121, obs. Véron.

    [17] Crim. 16 juillet 1948 : Bull. Crim. n° 203 ; Crim. 20 juin 1951 : Bull. Crim. n° 178 ; Crim. 4 décembre 1973 : Bull. Crim. n° 448 ; Crim. 15 avril 1959 : Bull. Crim. n° 226.

    [18] Crim. 22 juin 1944 : Bull. Crim. n° 147 ; Crim. 21 janvier 1954 : Bull. Crim. n° 27.

    [19] Crim. 12 juillet 1971 : Bull. Crim. n° 229 ; Crim. 9 octobre 1974 : Bull. Crim. n° 282.

    [20] Cour d’Appel de Douai, 6e chambre, 25 janvier 2007.

    [21] Crim. 12 novembre 2008, Non publié au bulletin, Pourvoi n° 07-83398 (disponible en pièce jointe ou sur http://legifrance.gouv.fr).

    [22] Notons que ce principe est consacré par la Constitution à l’article 26 : « Aucun membre du Parlement ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l'occasion des opinions ou votes émis par lui dans l'exercice de ses fonctions ».

    [23] Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales, Rome, 04/11/1950, Bureau des traités, Série des traités européens n° 5.

    [24] L’article 9 du Code Civil permet d’assurer la protection de la vie privée de toute personne.

    [25] Ces articles incriminent la discrimination définie comme une distinction opérée entre les personnes physiques à raison de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur état de santé, de leur handicap, de leur âge, de leur opinion publique, de leur orientation sexuelle, etc. La discrimination est punie de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende, lorsqu’elle consiste en différents comportements énumérés (refuser la fourniture d’un bien ou d’un service ; entraver l’exercice normal d’une activité économique ; refuser d’embaucher, sanctionner ou licencier ; etc.).

    [26] Il paraît important de souligner cette particularité, puisque la Cour de cassation a jugé qu’il n’était pas nécessaire de saisir une autre Cour d’appel.

    [27] Notons que la Cour de cassation a déjà rappelé cette prérogative à différentes occasions : Crim. 6 mars 1974 (2 arrêts) : Bull. Crim. nos 98 et 99 ; Crim. 20 octobre 1992 : Bull. Crim. n° 329 ; Crim. 14 février 2006 : Bull. Crim. n° 42. 

    [28] Homophobie : la Cour de Cassation annule la condamnation du député Vanneste, Nouvel Observateur, 12 novembre 2008.

    [29] Ibidem.

    [30] ROME Félix, Homos, ça coince…, Recueil Dalloz 2008 p : 2777.

    [31] M. Philippe Bilger est auteur de plusieurs ouvrages en la matière où il défend la liberté d’expression avec force : BILGER Philippe, Le droit de la presse, Que sais-je ?, PUF, 2003, 127 p. ; BILGER Philippe, Plaidoyer pour une presse décriée, Editions Filipacchi, 2001, 124 p. ; BILGER Philippe, J'ai le droit de tout dire, Editions du Rocher, 2007, 341 p.

    [32] ROME Félix, Homos, ça coince…, préc.

    [33] PRADEL Jean, Injure à raison de l’orientation sexuelle et liberté d’expression, Recueil Dalloz 2009 p : 402.

    [34] L’expression utilisée traditionnellement est celle « d’interprétation stricte ». Le renvoi à une « interprétation étroite » semble évoquer une application plus réduite ; soit dans l’espèce, limiter au maximum les cas de limites ou restrictions à la liberté d’expression.

    [35] Article 11.

    [36] Article 19.

    [37] Article 10 (utilisé dans l’espèce).

    [38] CEDH, 29 mars 2001, Thoma c/ Luxembourg ; CEDH, 26 avril 1995, Prager et Oberschlick c/ Autriche ; CEDH, 8 juillet 1986, Lingens c/ Autriche.

    [39] CEDH, 27 avril 1995, Piermont c/ France.

    [40] CEDH, 21 janvier 1999, Fressoz et Roire c/ France.

    [41] CEDH, 7 décembre 1976, Handyside c/ Royaume-Uni ; CEDH, 25 juillet 2001, Perna c/ Italie ; CEDH, 7 novembre 2006, Mamère c/ France.

    [42] Même si la personne n’est d’ailleurs pas homosexuelle (TGI Paris, 8 novembre 1989 : Gaz. Pal. 1990. 1. Somm. 176).