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Procédure pénale française - Page 3

  • Saisie-conservatoire pénale et contrat d'assurance vie - Crim. 30 octobre 2012, n° 12-84.961

    Chers lecteurs,

    Toujours avec la volonté de vous présenter la publication d'articles ou de chroniques déjà parus dans des revues, mais qui n'ont pas fait l'objet d'une telle mise en ligne, voici un commentaire de l'arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 30 octobre 2012 (pourvoi n° 12-84.961) adopté dans le cadre de l'affaire "Bettencourt".

     

    Ce document est proposé dans sa version PDF en cliquant ici : FXRD_ RJA 6 saisie-conservatoire.pdf

     

    Extrait du document :

    L’arrêt de la Cour de cassation du 30 octobre 2012, s’inscrit dans le cadre de l’affaire dite «Bettencourt».
    Liliane Bettencourt avait remis les sommes provenant du rachat d’un contrat d’assurance-vie à François-Marie Banier. Ce dernier a réparti la somme globale sur trois contrats d’assurance sur la vie pour un montant de 27 752 123,91 euros chacun. A la suite de sa mise en examen pour abus de faiblesse et blanchiment, la saisie des sommes susvisées est effectuée. En effet, le juge d’instruction considère ces sommes comme le produit direct des infractions évoquées permettant une confiscation sur le fondement de l’article 131-21 alinéa 5 du code pénal. Il demande la saisie des sommes disponibles sur ces comptes, ordonnant à l’assureur de réaliser un virement à la Caisse des dépôts et consignations au nom de l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC).
    François-Marie Banier interjette appel de cette décision.
    La chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Bordeaux confirme la décision en prononçant la saisie, cette confiscation devant permettre une restitution des sommes à la victime en cas de condamnation. Selon la chambre de l’instruction, le rachat par Liliane Bettencourt de ce contrat pour en verser la somme à François-Marie Banier se présente comme l’un des éléments matériels des faits qualifiés d’abus de faiblesse pouvant donner lieu à une confiscation au titre de l’article 131-21 alinéa 3 du Code pénal. Elle ajoute que ces sommes sont également confiscables comme l’objet du blanchiment au titre de l’article 324-7, 12° du même code. L’objectif de la confiscation est d’éviter la disparition des avoirs détenus par le mis en examen et parer à l’organisation de son insolvabilité.
    François-Marie Banier contestant toute volonté d’organiser une telle insolvabilité, l’affaire est portée devant la Cour de cassation.

    A priori, la question posée à la Cour de cassation ne soulève pas de véritable difficulté. Elle est invitée à répondre à la question de savoir si les sommes figurant sur un contrat d’assurance sur la vie doivent faire l’objet d’une consignation à la Caisse des dépôts et consignations ou auprès de l’AGRASC, ou au contraire si ces sommes doivent rester auprès de l’assureur dans l’attente du jugement au fond. Plus précisément, il s’agit de savoir s’il convient de lire l’article 131-21 du code pénal de façon autonome ou au regard des dispositions spécifiques de l’article 706-155 du code de procédure pénale.

     

    Pour citer ce document :

    « Saisie-conservatoire pénale et contrat d’assurance sur la vie. Obs. sous Cass. Crim. 30 octobre 2012, n° 12-84.961 », Revue Justice Actualités, n° 6/2012, pp. 136-138.

  • LES ECLAIRAGES DE LA COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE SUR LE MANDAT D’ARRET EUROPEEN (A propos de l’arrêt Melloni du 26 février 2013)

    Chers lecteurs,

    Toujours avec la volonté de vous présenter la publication d'articles ou de chroniques déjà parus dans des revues, mais qui n'ont pas fait l'objet d'une telle mise en ligne, voici un nouveau document reproduit ci-dessous ou dans sa version PDF en cliquant ici : FXRD_Melloni.pdf

     

    Pour citer ce document:

    François-Xavier ROUX-DEMARE, « Les éclairages de la Cour de justice de l'Union européenne sur le mandat d'arrêt européen (A propos de l'arrêt Melloni du 26 février 2013) », Revue Justice Actualités, n° 7/2013, pp. 205-208.

     

    Bonne lecture.

     

    LES ÉCLAIRAGES DE LA COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPÉENNE SUR LE MANDAT D’ARRÊT EUROPÉEN

     (A propos de l’arrêt Melloni du 26 février 2013)

     

    Pour parer aux inconvénients de la lourde procédure d’extradition, les Etats de l’Union européenne ont mis en place le mandat d’arrêt européen[1]. Le principe du mécanisme, proche de l’extradition, s’en distingue pourtant foncièrement. Alors que l’extradition entraîne une coopération entre deux Etats, le mandat d’arrêt se présente comme une décision judiciaire directement applicable sur l’ensemble des Etats de l’Union européenne[2]. Si cette procédure illustre l’approfondissement de la confiance mutuelle entre les Etats européens, elle reste sujette à certaines critiques comme l’illustre le problème de la suppression de la double incrimination pour certaines infractions[3].

     

    La procédure est soumise à des modalités précises de mise en œuvre, la décision-cadre prévoyant les motifs de non-exécution par les Etats. Malgré cette précision, des interrogations demeurent. La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), à qui l’évolution des compétences dans le domaine pénal offre l’opportunité d’intervenir plus fréquemment, a répondu à différentes questions transmises par la voie du recours préjudiciel.

     

    Tel est le cas dans cette affaire Melloni ayant donné lieu à un arrêt rendu par la Cour de justice le 26 février 2013[4]. En l’espèce, un ressortissant italien fait l’objet d’une condamnation à 10 ans d’emprisonnement par les autorités judiciaires italiennes pour faillite frauduleuse. L’intéressé ayant pris la fuite, cette condamnation est adoptée par défaut et le parquet italien délivre un mandat d’arrêt européen. M. Melloni est alors arrêté en Espagne. Malgré son opposition, la chambre pénale de l’Audiencia National décide la remise aux autorités italiennes. Pour faire échec à cette décision, M. Melloni présente un « recurso de amparo » devant le Tribunal Constitucional espagnol, c’est-à-dire une plainte constitutionnelle devant permettre la protection de ses droits fondamentaux. Il soulève une atteinte à son droit à un procès équitable protégé par la Constitution espagnole, arguant de sa condamnation par défaut non susceptible de recours et d’une remise par les autorités espagnoles vers un autre Etat sans conditionner celle-ci à une possible contestation de sa condamnation. Le Tribunal Constitucional introduit alors une demande de décision préjudicielle pour savoir si un Etat membre peut refuser l’exécution du mandat sur le fondement de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne pour un motif tiré de la violation des droits fondamentaux de la personne concernée garantis par la Constitution nationale. Il demande ainsi à la Cour d’apprécier l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584 relative au mandat d’arrêt européen[5] modifiée par la décision-cadre 2009/299[6], en vertu duquel les autorités judiciaires de l’Etat d’exécution peuvent « refuser d’exécuter le mandat d’arrêt européen délivré aux fins d’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté, si l’intéressé n’a pas comparu en personne au procès qui a mené à la décision »[7] sauf si le mandat précise que l’intéressé « ayant eu connaissance du procès prévu, a donné mandat à un conseil juridique, qui a été désigné soit par l’intéressé soit par l’Etat, pour le défendre au procès, et a été effectivement défendu par ce conseil pendant le procès »[8]. En l’espèce, M. Melloni avait donné mandat à deux avocats.

     

    Le prononcé de cet arrêt était très attendu, bien évidemment par l’Espagne, mais également par les huit autres Etats ayant présenté des observations[9]. Au-delà, il concerne l’ensemble des Etats mettant en œuvre le mandat d’arrêt européen. En effet, la question revient à s’interroger sur les conséquences d’une différence de protection des droits fondamentaux entre les Etats, lorsque cette protection est plus importante dans l’Etat d’exécution du mandat. Le professeur Henri Labayle pose ainsi la question : « la confiance mutuelle sur laquelle repose cette technique d’entraide répressive justifie-t-elle que l’Etat membre sollicité mette à l’écart sa propre vision de la protection des droits fondamentaux ? »[10]. La Cour de justice répond par l’affirmative à cette question en rappelant « l’objectif assigné à l’Union de devenir un espace de liberté, de sécurité et de justice en se fondant sur le degré de confiance élevé qui doit exister entre les Etats membres ». Elle privilégie l’efficacité du mécanisme alors que « le cœur du juge européen aurait pu pencher en faveur des droits fondamentaux »[11].

     

    La limitation des contrôles par l’Etat d’exécution du mandat via la limitation des motifs de refus de son exécution a pour but de supprimer d’éventuels aléas dans l’application de cette procédure. La Cour rappelle que l’article 4 bis s’oppose à un possible refus d’exécution dans quatre cas énumérés : une information officielle de la tenue du procès, une représentation par un conseil juridique lors du procès, l’absence de contestation d’une décision signifiant le droit à un recours ou la possibilité d’obtenir une nouvelle procédure de jugement après la remise à l’Etat ; dont l’un existe en l’espèce puisque l’intéressé était représenté par ses deux avocats qui bénéficiaient de sa confiance, provoquant son entière connaissance sur la procédure. En l’espèce, elle refuse de considérer toute atteinte au droit à un recours effectif et à un procès équitable, comme une atteinte aux droits de la défense garantis par les articles 47 et 48 §2 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Elle rappelle que le droit de l’accusé de comparaître en personne au procès constitue un élément essentiel du droit à un procès équitable, mais elle souligne que ce droit n’est pour autant pas absolu[12]. Une telle interprétation est en conformité avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme[13].

    S’agissant de l’éventuelle contrariété entre le droit national, constitutionnel en l’espèce, et le droit de l’Union européenne, la Cour rappelle le principe de la primauté du droit de l’Union en citant son ancien et fondamental arrêt du 17 décembre 1970[14]. Elle refuse l’argumentation selon laquelle l’Etat puisse faire valoir des standards plus élevés de protection des droits de l’homme en se prévalant de l’article 53 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Selon elle, une telle analyse est de nature à remettre en cause l’uniformité du standard de protection des droits fondamentaux défini par cette décision-cadre prévoyant le recours au mandat d’arrêt européen, et, par voie de conséquence, à porter atteinte aux principes de confiance et de reconnaissance mutuelles que cet instrument tend à conforter. Finalement, cela compromettrait l’effectivité du mécanisme du mandat. Pire, une solution inverse serait de nature à promouvoir un « forum shopping », c’est-à-dire inviter les délinquants à exploiter les différences entre les systèmes juridictionnels. Ainsi, le délinquant serait incité à choisir l’Etat dans lequel il se réfugie par référence à la protection lui permettant d’empêcher l’application d’un mandat d’arrêt européen. L’avocat général Yves Bot souligne ce risque de création d’un système à géométrie variable dans ses conclusions devant la Cour[15].

     

    La Cour de justice avait le choix entre appliquer strictement les dispositions de la décision-cadre, et contraindre ainsi l’Etat d’exécution à renoncer à ses propres standards de protection fondamentaux, ou faire prévaloir la plus haute protection des droits fondamentaux, au risque de porter atteinte au principe de confiance mutuelle. Elle fait un choix quasi médian en adoptant une lecture stricte de la décision-cadre tout en la justifiant par l’existence d’un standard de protection des droits fondamentaux dans l’Union européenne. La Cour, tout en préservant le mécanisme du mandat d’arrêt européen, rappelle l’existence d’un véritable socle des droits fondamentaux sur lequel s’appuie la coopération pénale entre les Etats européens[16]. Ce même socle justifie de tirer toutes les conséquences des principes d’harmonisation des législations, de reconnaissance des décisions judiciaires et de confiance mutuelle entre les Etats. Compte tenu des enjeux de l’affaire et de la sensibilité de la réponse au regard des droits de l’homme, cette solution apparaît courageuse.

     

    Cet arrêt illustre les questions juridiques que soulève l’utilisation du mandat d’arrêt européen. Des précisions sont régulièrement apportées, tant au niveau national, qu’européen. C’est aujourd’hui l’absence de recours contre la décision de la chambre de l’instruction autorisant, après remise de la personne, l’extension des effets du mandat à d’autres infractions, qui est sur la sellette. La récente, et inédite, question préjudicielle auprès de la Cour de justice transmise par le Conseil constitutionnel français le 4 avril 2013[17] va obliger la Cour de justice à s’interroger sur une éventuelle atteinte au principe d’égalité devant la justice et au droit à un recours juridictionnel effectif. Cette décision de la Cour de justice sera une nouvelle et prochaine occasion de revenir sur les contours de ce mécanisme.

     



    [1] Nous avons eu l’occasion de présenter succinctement cette procédure dans les colonnes de cette revue, François-Xavier Roux-Demare, « L’exécution des décisions fondées sur une harmonisation procédurale par la mise en œuvre de procédures spécifiques », RJA 3/2011 pp. 43 et ss.

    [2] Ministère de la Justice, Les processus de remise des personnes : extradition et mandat d’arrêt européen, Guide méthodologique, DACG/SDJPS/BEPI/FM, mai 2011, 77 p.

    [3] Voir l’exemple de l’affaire Aurore Martin : François-Xavier Roux-Demare, « L’exécution des décisions fondées sur une harmonisation procédurale par la mise en œuvre de procédures spécifiques », préc., p. 48.

    [4] CJUE, arrêt rendu par la grande chambre, Affaire Stefano Melloni c/ Ministerio Fiscal, 26 février 2013, C-399/11.

    [5] UE, Décision-cadre du Conseil du 13 juin 2002 relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre Etats membres (2002/584/JAI), J.O.U.E. L 190, 18 juillet 2002, p. 1.

    [6] UE, Décision-cadre 2009/299/JAI du Conseil du 26 février 2009 portant modification des décisions-cadres 2002/584/JAI, 2005/214/JAI, 2006/783/JAI, 2008/909/JAI et 2008/947/JAI, renforçant les droits procéduraux des personnes et favorisant l’application du principe de reconnaissance mutuelle aux décisions rendues en l’absence de la personne concernée lors du procès, J.O.U.E. n° L 081, 27 mars 2009, p. 24.

    [7] Article 4 bis, §1.

    [8] Article 4 bis, §1, b).

    [9] Allemagne, Autriche, Belgique, Italie, Pays-Bas, Pologne, Portugal et Royaume-Uni.

    [10] Henri Labayle, « Mandat d’arrêt européen et degré de protection des droits fondamentaux, quand la confiance se fait aveugle », 3 mars 2013, [En ligne], Site du Réseau universitaire européen Droit de l’espace de liberté, sécurité et justice, http://www.gdr-elsj.eu, (Page consultée le 16 avril 2013).

    [11] Fabienne GAZIN, « Mandat d’arrêt européen », Europe, n° 4, avril 2013, com. 166.

    [12] CJUE, Affaire Trade Agency, 6 septembre 2012, C-619/10, §52 et §55.

    [13] CEDH, arrêt du 14 juin 2001, Affaire Medenica c/ Suisse, Requête n° 20491/92, §56 à §59 ; CEDH, arrêt du 1er mars 2006, Affaire Sejdovic c/ Italie, Requête n° 56581/00, §84, §86 et §98 ; CEDH, arrêt du 24 avril 2012, Affaire Haralampiev c/ Bulgarie, Requête n° 29648/03, §32 et §33.

    [14] CJCE, Affaire Internationale Handelsgesellschaft, 17 décembre 1970, 11/70, Rec. p. 1125.

    [15] CJUE, Conclusions de l’avocat général M. Yves BOT présentées le 2 octobre 2012, relatives à l’affaire Stefano Melloni c/ Ministerio Fiscal, 26 février 2013, C-399/11, §103 et §120.

    [16] Sur l’existence de ce socle, voir François-Xavier ROUX-DEMARE, De l’entraide pénale à l’Europe pénale, Thèse pour le doctorat de droit présentée à l’Université Jean Moulin Lyon 3, sous la direction de Mme Annie BEZIZ-AYACHE, 2012, dactylographié, tome 1, pp. 235 et ss. (§250 et ss.).

    [17] Cons. const., Décision n° 2013-314P QPC du 4 avril 2013 (M. Jeremy F.).

  • LE DEFAUT DE POSSESSION D’UN ETHYLOTEST : UNE INFRACTION NON SANCTIONNEE ?

    Chers lecteurs,

    Je vous propose la publication d'articles ou de chroniques déjà parus dans des revues, mais qui n'ont pas fait l'objet d'une telle mise en ligne.

    Vous retrouvez le document reproduit ci-dessous mais également dans sa version PDF en cliquant ici : FXRD_Ethylotest.pdf

     

    Pour citer ce document:

    François-Xavier ROUX-DEMARE, « Le défaut de possession d'un éthylotest: une infraction non sanctionnée ? », Revue Justice Actualités, n° 7/2013, pp. 209-210.

     

    Bonne lecture.

     

     

    LE DÉFAUT DE POSSESSION D’UN ÉTHYLOTEST :  UNE INFRACTION NON SANCTIONNÉE ?

    Le 28 février 2012[1] a été adopté un décret introduisant un nouvel article R. 234-7 dans le Code de la route obligeant tous les conducteurs d’un véhicule à posséder un éthylotest. Le défaut de possession de cet éthylotest devait être sanctionné, sur le fondement de l’article R. 233-1 du même code, par l’amende prévue pour les contraventions de la première classe. Pour permettre aux conducteurs de respecter cette nouvelle obligation, l’entrée en vigueur était fixée au 1er juillet 2012. En revanche, la sanction ne devait être effective qu’à partir du 1er novembre 2012. L’adoption de ce décret s’inscrivait ainsi dans la politique de lutte contre l’insécurité routière.

     

    Un nouveau décret a été adopté le 29 octobre 2012 pour reporter l’entrée en vigueur de la sanction au 1er mars 2013[2]. La notice de ce texte justifie ce délai supplémentaire de quatre mois en expliquant qu’il doit permettre aux forces de police et de gendarmerie de continuer à sensibiliser les conducteurs et à les informer de leurs obligations. Il doit en réalité essentiellement permettre de parer aux difficultés d’approvisionnement en éthylotests ne permettant pas aux conducteurs de se conformer à l’obligation légale.

     

    Cette contravention aurait pu être introduite sans soulever d’intérêt particulier. Cependant, le dernier chapitre de cette contravention va soulever des interrogations. Un décret du 28 février 2013[3], à la veille de l’entrée en vigueur de la sanction, est venu supprimer cette dernière à compter du 1er mars 2013, tout en maintenant l’obligation de possession d’un éthylotest. La suppression de la sanction n’est pas une surprise en soi puisque le Conseil national de la sécurité routière (CNSR) avait recommandé le maintien de cette obligation de détention sans sanction[4] et le ministre de l’Intérieur Emmanuel VALLS ayant de son côté annoncé l’absence de sanction lors d’un entretien pour un journal quotidien[5]. Cette suppression appelle toutefois deux observations principales.

     

    En premier lieu, l’introduction de cette obligation soulève une nouvelle fois la critique quant à la réflexion et au processus d’adoption des normes pénales. Les critiques, tant de la doctrine que des praticiens du droit, ne cessent de se multiplier ces dernières années à l’encontre de l’adoption hâtive et parfois inutile de normes, et de la qualité de rédaction qui en résulte. Ce constat se traduit dans les faits par différentes déclarations d’inconstitutionnalité et d’inconventionnalité. Les articles R. 233-1 et R. 234-7 du Code de la route prévoyant un comportement simple dans son appréhension mais ayant nécessité l’adoption de trois décrets en est une nouvelle illustration.

     

    En second lieu, une incertitude subsiste quant à la réalité de la suppression de la sanction. L’article R. 233-1 du Code de la route prévoit que tout conducteur doit être tenu de présenter sur réquisition des agents différents documents énumérés (permis de conduire, certificat d’immatriculation du véhicule…) ainsi qu’un éthylotest. Si la sanction reste encourue pour les autres documents pouvant faire l’objet d’une demande de présentation sur réquisition, il est certain que le défaut d’éthylotest n’est pas sanctionné bien que le conducteur soit tenu de le présenter. En effet, cet article prévoit de sanctionner la non-présentation des documents obligatoires par une amende prévue pour les contraventions de la première classe « hors le cas prévu au 6° du I », c’est-à-dire la présentation d’un éthylotest. Cependant, le professeur Jacques-Henri ROBERT souligne que « la présentation d’un éthylotest ne se confond pas avec sa possession »[6]. Dès lors, si le défaut de présentation de l’éthylotest sur réquisition ne peut plus être sanctionné, sa possession (exigée par l’article R. 234-7) reste obligatoire et peut sans doute se voir sanctionner si les forces de police en ont connaissance dans d’autres circonstances, « par exemple au moyen de l’interrogatoire du conducteur trouvé ivre »[7]. En effet, la répression peut alors être envisagée sur le fondement de l’article R. 610-5 du Code pénal qui dispose que « la violation des interdictions ou le manquement aux obligations édictées par les décrets et arrêtés de police sont punis de l’amende prévue pour les contraventions de la 1ère classe ». Des discussions existent quant à l’utilisation de cet article pour les décrets postérieurs à l’entrée en vigueur de la Constitution de 1958[8], mais la Cour de cassation a précisé que la sanction édictée par l’article R. 610-5 du Code pénal s’attache aux règlements de police pris par les autorités administratives pour assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques[9].

     

     

    Une personne pourra ainsi éventuellement se voir condamner sur le fondement d’une obligation que la volonté affichée du Gouvernement aura été de dépénaliser. Dès lors, il peut apparaître opportun de supprimer la prévision des « décrets » dans l’article R. 610-5 du Code pénal puisque l’on peut raisonnablement penser que tout décret prévoira une sanction déterminée, dès lors que le Gouvernement souhaite sanctionner le comportement. Ce décret supprimant la sanction de l’obligation de présentation d’un éthylotest soulève donc plus d’interrogations qu’il n’en résout…

     


    [1] Décret n° 2012-284 du 28 février 2012 relatif à la possession obligatoire d’un éthylotest par le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, J.O.R.F. n° 0052, 1er mars 2012, p. 3935, texte n° 12.

    [2] Décret n° 2012-1197 du 29 octobre 2012 modifiant le décret n° 2012-284 du 28 février 2012 relatif à la possession obligatoire d’un éthylotest par le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, J.O.R.F. n° 0253, 30 octobre 2012, p. 16807, texte n° 14.

    [3] Décret n° 2013-180 du 28 février 2013 modifiant l’article R. 233-1 du Code de la route, J.O.R.F. n° 0051, 1er mars 2013, p. 3823, texte n° 11.

    [4] « Ethylotests et radars : le coup de théâtre du Conseil national de la sécurité routière », Le point, 12 février 2013 ; « Le Conseil national de la sécurité routière recommande la détention d’un éthylotest dans la voiture », La Croix, 13 février 2013.

    [5] DELSENY Damien, HACQUEMAND Eric, SCHUCK Nathalie, SELLAMI Stéphane et VERNET Henri, avec la collaboration de KASTLER-LE SCOUR Elisabeth, « Vidéo. Manuel Valls : « Oui, j’ai des ambitions, sinon je ne serais pas là ! », Entretien vidéo avec le ministre de l’Intérieur, Le parisien, 15 février 2013.

    [6] ROBERT Jacques-Henri, « La demi-mesure de l’alcoolémie », JCP Ed. G. n° 13, 25 mars 2013, 338.

    [7] Ibidem.

    [8] ROBERT Jacques-Henri, « Contraventions. – Décrets et arrêtés sanctionnés (art. R. 610-5) », in J-Cl. Pénal Code, fasc. 20, 15 juin 2012, §32.

    [9] Cass. Crim., 25 avril 2001, Bull. crim. n° 102.

  • La juridictionnalisation de l'enquête pénale

    L’Université de Bordeaux et l’Ecole nationale de la magistrature (ENM) organisent conjointement un colloque intitulé "La juridictionnalisation de l’enquête pénale" le 30 avril 2014 à Bordeaux.

     

    Ouverture par M. Jean-Christophe SAINT-PAU, professeur à l'Université de Bordeaux, directeur de l'ISCJ; M. Xavier RONSIN, magistrat, directeur de l'ENM; M. Olivier DECIMA, professeur à l'Université de Bordeaux

     

    Matinée : les sources de la juridictionnalisation
    sous la présidence de M. Patrice Davost, procureur général honoraire

    • La Cour européenne des droits de l’Homme et la juridictionnalisation de l’enquête par Mme Evelyne Bonis-Garçon, professeur à l'Université de Bordeaux
    • L’Union européenne et la juridictionnalisation de l’enquête par M. François-Xavier Roux-Demare, maître de conférences à l'Université de Brest
    • Le Conseil constitutionnel et la juridictionnalisation de l’enquête par M. Antoine Botton, professeur à l'Université de Toulouse

    • Table ronde : Modérateur : M. Djamil Kheireddine, magistrat ; intervenants : M. Pierre Vallée, président de chambre de l’instruction, M. Patrice Camberou, procureur de la République, M. Frédéric Chevallier, substitut général.

    Après-midi : Les manifestations de la juridictionnalisation
    sous la présidence de Mme Valérie Malabat, professeur à l'Université de Bordeaux

    • Quelle étendue de la juridictionnalisation ? par Mme Haritini Matsopoulou, professeur à l'Université de Paris-Sud
    • Quel juge pour l’enquête ? par Mme Pauline Le Monnier de Gouville, maître de conférences à l'Université de Paris 2
    • Quelle place pour le ministère public ? par M. François Fourment, professeur à l'Université de Tours
    • Quelle place pour le suspect ? par M. Yannick Capdepon, maître de conférences à l'Université de Bordeaux

    • Table ronde : Modérateur : M. Jérôme Hars, magistrat ; intervenants : M. Claude Mathon, avocat général près la Cour de cassation, Me Daniel Lalanne, avocat au barreau de Bordeaux, Mme Hélène Mornet, magistrate, juge des libertés et de la détention

    Coordinnateur scientifique : olivier.decima@u-bordeaux4.fr

    PROGRAMME PDF prog_colloque_Juridictionnalisation.pdf

  • Publication sur les paradoxes de la politique pénale

    François-Xavier ROUX-DEMARE, « Entre lutte et bienveillance : paradoxe d’une approche du phénomène délinquant », Revue pénitentiaire et de droit pénal, n° 3, juillet-septembre 2013, pp. 555-564.

     

    Cet article traite de l’ambigüité de la politique législative française en mettant en exergue ses incohérences.

     

     I) Incohérence de la lutte contre certains comportements infractionnels

    A) Moyens prohibés pour une activité licite

    B) Moyens licites pour une activité prohibée

     

     II) Tolérance déterminante d’une politique pénale orientée

    A) Approche sociale de la réponse pénale

    B) Approche pratique de l’absence de réponse pénale

     

    Bonne lecture !

  • AGENCE DE GESTION ET DE RECOUVREMENT DES AVOIRS SAISIS ET CONFISQUES (AGRASC)

     

    Document sur la base de la circulaire du 3 février 2011 CRIM-11-2/G1-03.02.2011

    Missions impératives de l’agence :

    -          Gestion centralisée des sommes saisies :

    Gestion centralisée de toutes les sommes saisies lors de procédures pénales : scellés numéraires (art. 706-160 2° CPP), sommes inscrites au crédit d’un compte (art. 706-154 CPP), créances saisies (art. 706-155 CPP). Les sommes sont inscrites sur le compte de l’agence tenu à la Caisse des dépôts et des consignations (CDC).

    Saisie des sommes sur compte : en enquête, les saisies des sommes sur comptes bancaires impliquent une décision de saisie pénale du Procureur  après autorisation du JLD. Dans le cadre d’une instruction, elle nécessite une ordonnance du juge d’instruction. Pour cela, la décision doit expressément inviter l’établissement de crédit à procéder au virement sur le compte de l’agence à la CDC avec mention des références de ce compte. Une copie certifiée conforme de la décision doit faire l’objet d’une transmission à l’agence pour permettre une traçabilité et un suivi des sommes saisies.

    Saisies de numéraires : elles s’analysent comme la saisie d’un bien meuble corporel avec placement sous scellés réalisés par les OPJ (art. 54, 56, 76, 94 et 97 CPP). La procédure doit permettre de ramener l’argent sur les comptes de l’agence, tout en assurant sa traçabilité. Dès lors, on distingue les saisies antérieures à la création de l’agence versées sur les comptes des directeurs de greffe (stocks) de celles postérieures (flux).

    Flux : après autorisation par le magistrat en charge de la procédure et l’attribution d’un numéro de Parquet, les dépôts des sommes s’effectuent sur le compte du directeur de greffe ouvert à la CDC ou la Banque de France. Le directeur des greffes transmet une copie de la déclaration de recette remise par la CDC avec différentes mentions (numéro identifiant, de Parquet, de scellés et les montants des sommes). Cet envoi s’accompagne d’un soit transmis contenant les coordonnées de la juridiction d’origine et d’une impression d’écran des affaires concernées par les dépôts (avec nom des mis en cause et victimes, et les codes NATINF et NATAF). Si le dépôt est effectué par un OPJ, il transmet le duplicata de la déclaration de recette au directeur des greffes qui effectue cette même procédure. Les sommes sont alors virées automatiquement chaque soir du compte du directeur de greffe sur le compte de l’agence. Celle-ci pourra éventuellement procéder à une restitution par autorisation au teneur de compte selon la décision prise par la juridiction.

    Stocks : cette gestion des stocks concerne les sommes saisies pour les affaires en cours et non celles confisquées sujettes à un plan d’apurement. Pour cela, l’agence doit recevoir un certain nombre d’informations relatives aux sommes pour permettre une traçabilité optimale. Chaque somme doit pouvoir être associée à une affaire. De plus, l’agence doit avoir connaissance du solde de chaque compte ouvert par le directeur de greffe (CDC, Banque de France) par copie du dernier relevé de compte arrêté au 31 décembre 2010. Le directeur de greffe atteste du montant des sommes justifiées par certificat administratif, accompagné d’un inventaire, et sollicite leur virement sur le compte de l’agence. Les sommes identifiées et justifiées devaient faire l’objet d’une transmission dans les 3 mois de la diffusion de la circulaire en date du 3 février 2011. Les sommes exceptionnellement non identifiées restent sur le compte du directeur du greffe pour devenir propriété de l’Etat à l’issue du délai de prescription.

    Abondement du fonds de concours « Stupéfiants » : l’article 760-161 al. 3 CPP prévoit cette mission de l’agence. L’agent comptable donnera l’ordre au teneur du compte d’abonder le budget général de l’Etat ou le fonds de concours « Stupéfiants » géré par la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) pour les affaires qui relèvent du champ du décret du 17 mars 1995, c’est-à-dire le produit des recettes provenant de la confiscation des biens mobiliers ou immobiliers des personnes reconnues coupables d'infractions en matière de trafic de stupéfiants qui est assimilé à un fonds de concours pour dépenses d'intérêt public (art. 1er du décret).

     

    -          Aliénation des biens vendus avant jugement en vertu des articles 41-5 et 99-2 du Code de procédure pénale :

    L’agence possède le monopole de l’exécution des ventes avant jugement des biens meubles dont la conservation n’est plus nécessaire à la manifestation de la vérité et qui ne peuvent pas faire l’objet d’une restitution (propriétaire inconnu ou bien non réclamé après mise en demeure) ou dont la confiscation est prévue par la loi si le maintien de la saisie pourrait entraîner une diminution de valeur du bien. Cette disposition offre les avantages d’une baisse des frais de justice et la préservation de la valeur du bien. Cette préservation bénéficie tant au budget de l’Etat et du fonds de concours « Stupéfiants », qu’à la personne bénéficiant d’une décision en sa faveur par la restitution du prix (avant toute perte de valeur…).

    Après réception du soit transmis et des copies des ordonnances définitives prononcées par le JLD ou le JDI en vertu des articles 41-5 et 99-2 CPP, l’agence met à exécution ces ordonnances en recourant au service du Domaine ou à tout autre prestataire mieux qualifié pour l’opération. Une importance doit être donnée aux documents transmis à l’agence pour procéder à ces aliénations, avec certains particularismes pour certains biens à l’image des véhicules terrestres à moteur (extrait de fichiers selon le pays national ou étranger d’immatriculation).

    Les sommes actuellement consignées au titre de ces articles font l’objet d’un transfert sur le compte de l’agence dans le délai de 3 mois de la diffusion de cette circulaire.

     

    -          Publication au bureau des hypothèques, au nom du procureur ou du magistrat instructeur, des décisions opérant des saisies pénales immobilières :

    La saisie immobilière fait l’objet d’un formalisme précis dont certaines mentions sont impératives au risque d’empêcher la publication de l’acte de saisie et par voie de conséquence une opposition aux tiers.

    Le bien est désigné précisément : physiquement (maison, garage), géographiquement (adresse), à l’aide du cadastre ou l’état descriptif de division pour les copropriétés. Les indications du propriétaire (personne physique ou morale) doivent être mentionnées (nom, prénom, date de naissance, siège social…) ainsi que la nature du droit de propriété (indivision, usufruit, nue-propriété…). Mention est aussi faite de l’origine de la propriété par référence directe à la formalité figurant sur le fichier immobilier.

    La saisie portera sur la valeur totale de l’immeuble. Il convient de ne pas faire figurer de valeur du bien en raison de possible contentieux en cas d’accroissement de cette valeur. Dès la publication de saisie, le bien est indisponible et ne peut plus faire l’objet de procédure civile d’exécution.  Le propriétaire du bien ou son détenteur est responsable de son entretien et conservation, dont il supporte la charge. Toute modification pouvant modifier le bien ou altérer sa valeur reste soumise à l’autorisation du magistrat à l’origine de la saisie.  Ce dernier est aussi compétent pour les requêtes relatives à l’exécution de la saisie (art. 706-151, 706-145, 706-143 et 706-144 CPP).

    Le magistrat ordonnant la saisie opère une certification de la conformité de la formule de publication de la décision originale de saisie avec mention du nombre de pages et une certification de l’identité des propriétaires de l’immeuble, transmission étant faite à l’agence. En pratique, le magistrat ordonnant la saisie reproduit intégralement sa décision de saisie dans la formule de publication 3265-SD (Doc. Cerfa n° 11196*02). Puis, les formalités de publication de saisie au bureau des hypothèques sont effectuées par l’agence au nom du procureur ou JDI (art. 706-151 CPP). 

     

    -          Information des administrations publiques et des victimes et de l’indemnisation des parties civiles :

    L’agence informe les administrations publiques susceptibles de détenir des créances fiscales, douanières ou sociales de l’existence de biens qui lui ont été confiés par mandat de justice, pour leur permettre de mettre en œuvre les voies d’exécution pour le payement de leurs créances, avant toute restitution du bien à la personne suite à une décision judiciaire. L’agence met en œuvre un rôle identique à l’égard des victimes et parties civiles (art. 706-161 al. 4 CPP). En plus, les personnes physiques constituées partie civile bénéficiant d’une décision définitive attribuant des dommages et des frais au titre de la procédure, non indemnisable par la CIVI ou le SARVI, peut obtenir de l’agence un payement des sommes prioritairement sur les biens confisqués définitivement au débiteur art. 706-164 CPP). Pour faciliter ce travail de l’agence, les juridictions doivent transmettre la copie conforme des décisions accordant des dommages et intérêts à la partie civile dès lors que l’affaire a donné lieu à un transfert de numéraires ou biens à l’agence. Dans les autres cas, l’agence fera la démarche auprès de la juridiction à réception d’une demande d’indemnisation.

    L’agence se rapprochera du SADJAV*, FGTI* et INAVEM* pour accomplir cette tâche.

     

    -          Mise en place d’un fichier informatisé des saisies et des confiscations :

    L’agence met en place un traitement de données à caractère personnel centralisant les décisions de saisie et de confiscation qui lui ont été transmises (peu importe la nature des biens) et les informations utiles sur les biens (localisation, propriétaires…).

     

    Missions facultatives de l’agence :

    -          Aide et assistance aux juridictions :

    L’agence se présente comme un outil au service des juridictions. Elle possède un rôle d’aide et d’orientation à leur égard dans leurs démarches sur les saisies, les confiscations et la gestion des biens en faisant l’objet. A ce titre, elle est joignable par courrier, téléphone et courriel. Elle propose, via son site Internet, des documents de bonnes pratiques.

     

    -          Gestion, sur mandat de justice, de certains biens :

    La loi du 9 juillet 2010 introduit dans le CPP deux cas de transmission de la gestion d’un bien à l’agence.

    Art. 706-143 CPP : le propriétaire ou le détenteur du bien saisi ou confisqué doit assurer son entretien et sa conservation. Dans le cas où ces individus sont défaillants ou indisponibles, le procureur ou le JDI peuvent autoriser un transfert auprès de l’agence pour qu’elle assure cette mission. Cette disposition reste une simple possibilité encadrée.

    Art. 706-160 1° : ce sont les biens saisis, confisqués ou sous le coup d’une mesure conservatoire qui nécessitent pour leur conservation ou valorisation des actes d’administration (biens complexes et non les biens faisant le simple objet d’un gardiennage).

    L’agence doit être saisie, pour la gestion d’un bien, par un mandat de justice, par décision ou ordonnance (pas un simple soit transmis). Avant le transfert d’un bien, une discussion entre magistrats et agence doit permettre de conseiller et indiquer les modalités de transfert. De même, pour que l’agence puisse procéder à une aliénation ou destruction d’un bien, le service de l’exécution des peines transmet la décision définitive de confiscation pour qu’elle agisse.

     

    -          Missions relevant de la coopération internationale :

    L’agence peut procéder à son action (gestion, aliénation, destruction, répartition des produits de la vente) sur mandat de justice dans le cadre d’une demande d’entraide ou de coopération internationale. Elle ne sera pas saisie directement par l’autorité étrangère ni par subdélégation d’une autorité judiciaire saisie. La saisie par les magistrats passe par une demande à l’adresse amo@agrasc.gouv.fr .

     

    Notons que pour permettre de remplir ses fonctions efficacement, les juridictions sont invitées à transmettre à l’agence un certain nombre de pièces ou documents pour faciliter son action. Une transmission dématérialisée doit être privilégiée.

     

    *SADJAV Service de l'accès au droit et à la Justice et de l'aide aux victimes

    *FGTI Fonds de Garantie des victimes des actes de Terrorisme et d’autres infractions

    *INAVEM Institut national d'aide aux victimes et de médiation

     

  • Proposition de loi relative à l’atténuation de la responsabilité pénale en cas d’altération du discernement

    Le 12 janvier 2011, la Présidence du Sénat a enregistré une proposition de loi relative, selon son intitulé, à l’atténuation de responsabilité applicable aux personnes atteintes d’un trouble mental ayant altéré leur discernement au moment des faits (Proposition de loi n° 217 session 2010-2011).  Ce texte fait suite au dépôt en juillet 2010 d’une précédente proposition déposée par MM. Les Sénateurs Jean-René LECERF, Gilbert BARBIER et Mme la Sénatrice Christiane DEMONTES (Proposition de loi n° 649 session 2009-2010) ; permettant de prendre en considération les travaux contenu dans un important rapport du groupe de travail mené conjointement par la commission des lois et la commission des affaires sociales sur la prise en charge des personnes atteintes de troubles mentaux ayant commis des infractions ; rapport intitulé « Prison et troubles mentaux : comment remédier aux dérives du système français ? » (Rapport d’information n° 434 session 2009-2010).

    Le droit pénal français prévoit que seule la personne douée de discernement, lors de l’accomplissement de l’acte délictueux, peut être tenue pour responsable. Il existe dès lors une cause dite de non-imputabilité en raison de l’existence d’un trouble psychique ou neuropsychique. Il n’est pas possible d’imputer un acte à un individu n’étant pas en mesure de le comprendre. L’individu ne possède pas, dans ce cas, d’une volonté dans l’accomplissement de son acte puisqu’il ne le comprend pas.

    L’Ancien Code Pénal prenait déjà en compte cette situation. L’article 64 de l’Ancien code disposait que « Il n’y a ni crime ni délit, lorsque le prévenu était en état de démence au temps de l’action, ou lorsqu’il a été contraint par une force à laquelle il n’a pu résister ». La seconde partie de cet article concerne une seconde cause de non-imputabilité : la contrainte. Pour cette cause, reprise aussi par le nouveau Code pénal, l’individu ne possède aucune volonté sur l’acte qu’il réalise (tout comme pour le trouble), à la différence qu’il le comprend (mais ne peut s’y opposer).

    Si l’Ancien Code pénal parle de démence, le Nouveau Code pénal reprend cette cause subjective de non-responsabilité à l’article 122-1, en renvoyant à la notion de trouble psychique et neuropsychique :

    « N’est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes.

    La personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes demeure punissable ; toutefois, la juridiction tient compte de cette circonstance lorsqu'elle détermine la peine et en fixe le régime ».

    Notons tout d’abord que cette rédaction n’a pas encore fait l’objet de modification depuis cette rédaction du Nouveau Code pénal. S’agissant de l’évolution de la terminologie, de la démence au trouble, elle permet d’englober toutes les formes d’aliénation mentale qui enlève à l’individu le contrôle de ses actes. La nouvelle expression semble plus adéquate en renvoyant à l’idée de « facultés mentales ». Cela concerne les maladies qui atteignent le développement des facultés mentales (crétinisme, idiotie, imbécillité, débilité, faiblesse d’esprit) comme les maladies qui les affaiblissent (folie). Par contre, les maladies de la volonté sont exclues : kleptomanie, pyromanie, neurasthénie, psychasthénie... Le juge fera alors appel à des experts pour prendre sa décision.

    Puis, il s’agit de bien reprendre la distinction entre les deux alinéas de cet article. Il existe une importance fondamentale entre les termes « aboli » et « altéré ».  Pour effectuer une brève présentation… lorsque le discernement est aboli (prévision du 1er alinéa), il a totalement disparu. Dans ce cas, la responsabilité est de facto exclue. Il faut cependant que l’on retrouve les deux conditions : un trouble suffisamment grave pour abolir le discernement ou le contrôle des actes ; abolition contemporaine à l’acte délictueux. La personne pourra seulement voir sa responsabilité civile engagée pour réparer le dommage causé, comme le prévoit l’article 414-3 du Code Civil (Ancien article 489-1 du Code Civil) : « Celui qui a causé un dommage à autrui alors qu'il était sous l'empire d'un trouble mental n'en est pas moins obligé à réparation ». Bien sûr, la personne ne sera pas forcément remise en liberté pour autant : elle pourra faire l’objet d’une hospitalisation d’office, selon des procédures prévues.

    Le second alinéa parle d’altération. C’est à cet alinéa que renvoie le nouveau texte. Dans ce cas, le discernement n’a pas totalement disparu. Sous l’Ancien Code pénal, on a alors pu parler de « demi-fous » pour les caractériser. Cela renvoie aux maniaques, névrosés, pervers… Ces individus bénéficiaient alors d’une atténuation de responsabilité. Le juge tenait compte de cet état pour déterminer la peine. L’article du Nouveau Code pénal souligne que l’individu demeure punissable. Toutefois, le juge peut en tenir compte pour la détermination de la peine et de son régime. La Cour de Cassation est venue préciser que cette prise en compte n’était qu’une faculté pour le juge, indiquant que l’article ne prévoit pas dans ce cas de cause légale de diminution (Par exemple : Cass. Crim. 5 sept. 1995 : Bull. Crim. n° 270 ou Cass. Crim. 31 mars 1999 : Bull. Crim. n° 66). Pire, comme la personne constitue une menace, cette altération des facultés devient en pratique une cause d’aggravation des peines. Ce constat est largement démontré par le rapport d’information n° 434 cité ci-dessus. Dès lors, des critiques ont pu être soulevées sur cette situation aboutissant à emprisonner dans des établissements pénitentiaires des personnes souffrant de troubles, sans pour autant bénéficier de soins adéquates. D’ailleurs, le rapport accompagnant la proposition de loi faisant l’objet de cet article constate que « près de 10% des personnes détenues souffriraient de troubles psychiatriques graves » !  (Rapport du Sénat n° 216 session 2010-2011, présenté par M. Jean-Pierre MICHEL, p : 7).

    Cette proposition de loi veut répondre à ce paradoxe qui entraîne une irresponsabilité pour les graves troubles mais une éventuelle prise en compte des troubles moins sévères, prise en compte aboutissant bien souvent à une plus lourde peine. Pour reprendre les propres termes du rapport sur l’objectif de cette proposition : « La présente proposition de loi tente de répondre à cette préoccupation : elle reconnaît de manière explicite l’altération du discernement comme un facteur d’atténuation de la peine tout en renforçant les garanties concernant l’obligation de soins pendant et après la détention ».

     

    Pour cela, elle propose que l’article 122-1 du Code pénal envisage expressément une réduction de peine privative de liberté. Selon la nouvelle rédaction proposée, « la peine privative de liberté encourue est réduite du tiers. En outre, la juridiction tient compte de cette circonstance pour fixer le régime de la peine. Lorsque le sursis à exécution avec mise à l’épreuve de tout ou partie de la peine a été ordonné, cette mesure est assortie de l’obligation visée par le 3° de l’article 132-45 après avis médical et sauf décision contraire de la juridiction ». Sur le fondement de cet article 132-45 du Code pénal, la juridiction de condamnation ou le juge d’application des peines peut imposer spécialement au condamné l’observation de certaines obligations, en l’espèce, « se soumettre à des mesures d'examen médical, de traitement ou de soins, même sous le régime de l'hospitalisation ».

     

    Les autres articles de la proposition de loi se veulent plus stricts quant à la conduite à tenir par l’individu concerné. Celui-ci se doit de respecter les soins qui lui sont proposés. Le refus de soins pourra alors être pris en compte lors de l’application de sa peine. En vertu de l’article 721 du Code de procédure pénale, chaque condamné bénéficie d'un crédit de réduction de peine. Cet article définit les modalités de cette réduction. La proposition de loi prévoit la possibilité pour le juge de l’application des peines de ne pas appliquer le régime des réductions de peine de l’article 721 du Code de Procédure pénale lorsque l’individu « refuse les soins qui lui sont proposés ». Pour la même raison, il paraît logique que les réductions de peine supplémentaires envisagées à l’article 721-1 du même code soient aussi écartées. Compte tenu que ces dernières réductions concernent les condamnés qui manifestent des efforts sérieux de réadaptation, il va de soit que le condamné refusant les soins qui lui sont proposés, n’entre pas dans cette catégorie (article 2 de la proposition).  

     

    Le troisième et dernier article de la proposition propose l’introduction d’un nouvel article 706-136-1 dans le Code de procédure pénale, ainsi rédigé : « Art. 706-136-1. - Le juge de l'application des peines peut ordonner, à la libération d'une personne condamnée dans les circonstances mentionnées au second alinéa de l'article 122-1 du code pénal, une obligation de soins ainsi que les mesures de sûreté visées à l'article 706-136 pendant une durée qu'il fixe et qui ne peut excéder dix ans en matière correctionnelle et vingt ans si les faits commis constituent un crime ou un délit puni de dix ans d'emprisonnement. Les deux derniers alinéas de l'article 706-136 sont applicables ». Avec cet article, elle permet un suivi médical de l’individu après sa libération et la prise de mesures de sûreté. S’agissant de ces mesures de sûreté, ce sont celles qui étaient déjà prévues lors de la prise d’un arrêt ou d’un jugement de déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental : Interdiction d'entrer en relation avec la victime de l'infraction ou certaines personnes ou catégories de personnes, et notamment les mineurs, spécialement désignées ;  Interdiction de paraître dans tout lieu spécialement désigné ; Interdiction de détenir ou de porter une arme ;  Interdiction d'exercer une activité professionnelle ou bénévole spécialement désignée, dans l'exercice de laquelle ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise ou impliquant un contact habituel avec les mineurs, sans faire préalablement l'objet d'un examen psychiatrique déclarant la personne apte à exercer cette activité ; Suspension du permis de conduire ; Annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis. Cet article permet donc d’imposer un encadrement et un suivi par les soins de l’individu remis en liberté.

    Par cette proposition, on observe une véritable volonté de prendre en compte la situation mentale de l’individu dont le discernement a été altéré lors d’un fait infractionnel. Il est mis l’accent sur la nécessaire prise en compte de cet état mental pour y remédier, notamment par des soins. Par contre, l’individu peut se voir en quelque sorte « imposer » ces soins, au risque de perdre le bénéfice des réductions de peine voire d’être condamné à une nouvelle condamnation. Rappelons que la méconnaissance des mesures de sûreté prévues à l’article 706-136 est punie de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende… sous réserve de l’article 122-1 du Code pénal. Ce propre renvoi à cet article de départ permet de bien mettre l’accent sur l’importance des moyens qui seront mis en place, conjointement à cette proposition de loi, tant pour l’accès aux soins que pour le suivi des personnes concernées… Sans de véritables moyens, ces individus souffrant de troubles resteront confrontés à un système judiciaire aveugle à leur situation. Pour seule illustration en rapport avec cette proposition de loi : comment réagir quand l’individu n’est pas mentalement capable de comprendre l’importance et l’intérêt des soins ? Cela aboutira à un emprisonnement plus long, sans pour autant avoir un accès aux soins adéquats ; puis, à une libération en espérant un rétablissement ou en attendant un évènement plus dramatique. A contrario, le magistrat est partagé entre adoucir le quantum de la peine sur le fondement de la maladie et le réel risque de remettre en liberté plus rapidement une personne dangereuse. D’ailleurs, on peut dès lors logiquement se poser la question de savoir si ces individus doivent réellement dépendre du système judiciaire et pénitentiaire ; où si leur place ne devrait pas être, au même titre que les personnes déclarées irresponsables pénalement, dans des structures hospitalières adaptées. On en revient à un problème récurrent : un problème budgétaire en raison d’un manque de structures, un manque de places, un coût élevé pour la société, etc.

    Avant toute chose, il faut attendre l’adoption définitive de ce texte. Le Sénat a adopté cette proposition sous la référence textuelle n° 51, le 25 janvier 2011. Le texte est actuellement en première lecture devant l’Assemblée Nationale (Proposition de loi n° 3110).

     

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  • La Cour de Justice de la République

    En avril 2010, la Cour de Justice de la République rend son arrêt pour des poursuites à l'encontre de M. Charles PASQUA. Il est alors poursuivi pour des affaires de malversation qui se seraient déroulés lorsqu'il était Ministre de l'Intérieur (Casino d'Annemasse, GEC-Alsthom et Sofremi). Sixième ministres à comparaître devant cette juridiction, il est alors condamné pour complicité d'abus de biens sociaux et de recel à un an d'emprisonnement avec sursis.  

    A la suite de cette dernière affaire et compte tenu du nombre réduit d'affaires que cette juridiction connaît, on soulève la possibilité de la mettre en sommeil. Depuis sa création en 1993, elle n'a eu à connaître que de très peu d'affaires : la mise en cause de M. Laurent FABIUS, Mme Georgina DUFOIX et M. Edmond HERVE dans l'affaire du sang contaminé où seul Edmond HERVE sera condamné mais avec dispense de peine ; M. Michel GILLIBERT pour des faits d'escroquerie condamné à trois ans avec sursis ; Mme Ségolène ROYAL relaxée pour des faits de diffamation.

    La récente affaire dite « Affaire Woerth-Bettencourt » qui implique notamment le Ministre du Travail, M. Eric Woerth, relance l'intérêt pour cette institution. Il se pourrait donc que cette juridiction spéciale fasse l'objet d'une saisie. Dans ce cas, M. WOERTH serait le septième ministre à comparaître devant la Cour de Justice de la République.

    Assez méconnu, il semblait intéressant de revenir brièvement sur cette institution particulière de notre système judiciaire.

    Au sein des juridictions répressives de l'ordre judiciaire, la Cour de Justice de la République (CJR) est une juridiction d'exception qui se caractérise par son caractère politique. En effet, elle est compétente pour connaître des crimes et des délits commis par les membres du gouvernement dans l'exercice de leurs fonctions.

    Cette institution a été créée par la loi constitutionnelle n° 93-952 du 27 juillet 1993 qui introduit deux articles dans la Constitution. Aujourd'hui, on peut lire au Titre X de la Constitution, Titre intitulé « De la responsabilité pénale des membres du Gouvernement (articles 68-1 à 68-3) », trois articles ainsi rédigés :

    « Art. 68-1. - Les membres du gouvernement sont pénalement responsables des actes accomplis dans l'exercice de leurs fonctions et qualifiés crimes ou délits au moment où ils ont été commis.

    Ils sont jugés par la Cour de justice de la République.

    La Cour de justice de la République est liée par la définition des crimes et délits ainsi que par la détermination des peines telles qu'elles résultent de la loi.

    Art. 68-2. - La Cour de justice de la République comprend quinze juges : douze parlementaires élus, en leur sein et en nombre égal, par l'Assemblée Nationale et par le Sénat après chaque renouvellement général ou partiel de ces assemblées et trois magistrats du siège à la Cour de cassation, dont l'un préside la Cour de justice de la République.

    Toute personne qui se prétend lésée par un crime ou un délit commis par un membre du gouvernement dans l'exercice de ses fonctions peut porter plainte auprès d'une commission des requêtes.

    Cette commission ordonne soit le classement de la procédure, soit sa transmission au procureur général près la Cour de cassation aux fins de saisine de la Cour de justice de la République.

    Le procureur général près la Cour de cassation peut aussi saisir d'office la Cour de justice de la République sur avis conforme de la commission des requêtes.

    Une loi organique détermine les conditions d'application du présent article.

    Art. 68-3. - Les dispositions du présent titre sont applicables aux faits commis avant son entrée en vigueur. ».

    Notons simplement qu'avant cette réforme, les ministres étaient responsables pénalement devant la Haute Cour de Justice, compétence désormais limitée au seul chef de l'Etat. Le fonctionnement de cette Haute Cour avait suscité des critiques, ce qui a alors entrainé cette révision aboutissant à une Haute Cour de Justice et une Cour de Justice de la République. Nous allons donc nous attacher au fonctionnement de cette dernière.

    •1)     Instruction devant la CJR

    La CJR possède deux commissions : une commission des requêtes et une commission d'instruction.

    •a)     La Commission des requêtes :

    Cette commission est composée de sept membres titulaires et de sept membres suppléants. Ils sont désignés pour une durée de cinq années par leur juridiction d'appartenance. Sur ces sept membres, on retrouve trois conseillers à la Cour de Cassation dont l'un exerce des fonctions de président, deux conseillers d'Etat et deux conseillers-maîtres à la Cour des comptes.

    Cette commission apprécie si la plainte déposée contre le ministre doit faire l'objet de poursuite. La décision prise par cette commission n'est pas soumise à un recours. En cas de classement, l'affaire s'arrête donc à ce premier stade. Au contraire, la commission peut qualifier les faits et renvoyer au Procureur Général de la Cour de Cassation. Ce dernier va saisir la commission d'instruction par un réquisitoire visant le ministre (ou secrétaire d'Etat) en question.

    Notons que le Procureur Général de la Cour de Cassation peut saisir d'office la Commission d'instruction, mais il doit avoir obtenu l'avis conforme de la Commission des requêtes.

    •b)     La Commission d'instruction :

    Cette commission est composée de trois membres titulaires et de trois membres suppléants désignés parmi les magistrats de la Cour de Cassation. Ils sont en place pour une durée de trois ans. Un des membres doit avoir des fonctions de président.

    Cette commission procède à l'instruction de façon collégiale. Elle effectuera l'ensemble des actes dans le respect des principes de la procédure pénale. Elle devra notamment respecter les droits de la défense comme le secret de l'instruction...

    Notons qu'à l'image de la procédure pénale de droit commun, si la commission d'instruction souhaite instruire sur de nouveaux faits, elle devra obtenir un réquisitoire du Procureur Général, qui le délivrera après l'avis conforme de la Commission des requêtes. Par contre, sur les faits dont elle est saisie, la Commission d'instruction n'est pas tenue par la qualification proposée et peut requalifier.

    De plus, on remarque que la constitution de partie civile devant cette juridiction n'est pas recevable, alors que la personne qui se croit victime d'un crime ou délit peut porter plainte devant la Commission des requêtes.

    A la fin de l'instruction, la Commission d'instruction transmet l'affaire au Procureur Général de la Cour de Cassation. Celui-ci va alors prendre ses réquisitions. Le mis en examen a un délai de vingt jours pour soulever des nullités. La Commission d'instruction peut alors prendre deux types de décision : classer l'affaire ou poursuivre. Un pourvoi est possible devant la Cour de Cassation en formation plénière. En cas de poursuite, la juridiction de jugement sera saisie.

    •2)     Jugement devant la CJR

    Il faut exposer sa formation avant d'envisager son fonctionnement.

    •a)     Formation de la CJR

    La formation de jugement est composée de quinze juges :

    • - Douze parlementaires: six députés et six sénateurs, élus par leur assemblée (Assemblée Nationale et Sénat) après chaque renouvellement général ou partiel.
    • - Trois magistrats du siège de la Cour de Cassation, élus par leur Cour. Un de ces magistrats préside la Cour de Justice. Actuellement, la CJR est présidée par M. Henri-Claude LE GALL.

    Un juge peut se récuser ou peut être dans l'impossibilité de juger. Dans ce cas, un suppléant prend sa place.

    Les fonctions de greffiers de la CJR sont effectuées par le Greffier en chef de la Cour de Cassation.
    De même, les fonctions de parquet sont dévolues au Procureur Général près la Cour de Cassation, appuyé par le Premier Avocat Général et de deux avocats généraux.

    •b)      Fonctionnement

    La formation de jugement siège après renvoi d'une procédure par la commission d'instruction. Elle applique alors les règles de la procédure pénale, à l'exception du fait qu'elle procède selon la procédure applicable aux jugements en matière correctionnelle (même en cas de crime).

    Les délibérations peuvent être comparées à celles d'une Cour d'assises. Le vote s'effectue à bulletins secrets à la majorité absolue pour chaque chef d'accusation. Après avoir délibérés sur la culpabilité, le même procédé est utilisé pour délibérer sur la peine.

    L'arrêt doit être motivé. Il est susceptible de faire l'objet d'un pourvoi devant l'Assemblée Plénière de la Cour de Cassation. Si elle casse l'arrêt, l'affaire sera renvoyée devant la CJR autrement formée.     

     

    Il est possible de contacter la Cour de Justice de la République, dont voici les coordonnées :

    Adresse : 21, rue de Constantine 75007 Paris 
    Téléphone : +33 1 44 11 31 00
    Télécopie : +33 1 44 11 31 39
    Courriel : courdejustice.courdecassation@justice.fr

     

  • PROCEDURE PENALE --- Exemple de partiel

    En mars 2009, les services sociaux du quartier Bellerive signalent au procureur de la République des suspicions d'agressions sexuelles sur la jeune Lou âgée de 8 ans. Dans le même temps, une plainte des parents de l'enfant est déposée auprès des services de police, dans laquelle le nom de M.Legrin, oncle de la fillette est mentionné. Sur la base de ces différents éléments, une enquête est diligentée à la demande du procureur.

    Dans le cadre des investigations menées, un officier de police judiciaire et deux agents se rendent le 27 avril à 10 heures au domicile de M.Legrin où, en sa présence, ils effectuent une perquisition à laquelle M.Legrin est opposé. Après plusieurs mois d'enquête le dossier est finalement classé sans suite, les investigations menées et les auditions effectuées n'ayant permis de réunir aucun élément contre M.Legrin.

    Le 25 août 2009, les parents de la jeune Lou décident de se constituer partie civile en saisissant le juge d'instruction. Là encore, M.Legrin est expressément visé dans la plainte.

    • 1. Dans quel cadre d'enquête les investigations policières ont-elles été diligentées?
    • 2. Au regard des éléments visés dans l'énoncé, la mesure de perquisition est-elle régulière?
    • 3. Les parents de la jeune Lou pouvaient-ils contester la décision de classement selon une voie?
    • 4. La constitution de partie civile sera-t-elle déclarée recevable et quels seront ses effets?
    • 5. Pendant l'instruction, quel sera le statut de M.Legrin? Quelles en seront les conséquences?

     

     

    Article 222-27 du Code Pénal :

    Les agressions sexuelles autres que le viol sont punies de cinq ans d'emprisonnement et de 75000 euros d'amende.

    Article 222-28 du Code Pénal :

    L'infraction définie à l'article 222-27 est punie de sept ans d'emprisonnement et de 100 000 euros d'amende :

    1°Lorsqu'elle a entraîné une blessure ou une lésion ;

    2° Lorsqu'elle est commise par un ascendant légitime, naturel ou adoptif, ou par toute autre personne ayant autorité sur la victime ;

    3° Lorsqu'elle est commise par une personne qui abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ;

    4° Lorsqu'elle est commise par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice ;

    5° Lorsqu'elle est commise avec usage ou menace d'une arme ;

    6° Lorsque la victime a été mise en contact avec l'auteur des faits grâce à l'utilisation, pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, d'un réseau de télécommunications ;

    7° Lorsqu'elle est commise par le conjoint ou le concubin de la victime ou le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité ;

    8° Lorsqu'elle est commise par une personne agissant en état d'ivresse manifeste ou sous l'emprise manifeste de produits stupéfiants.

     

    CORRECTION

    Deux points sont alloués à la présentation, à l'écriture, à l'orthographe, à la syntaxe et au vocabulaire juridique.

    Cette correction reprend les éléments dans le détail. Tous ces éléments ne sont pas attendus par les étudiants avec autant de précision, bien que les idées principales doivent évidemment se retrouver. Rappelons aussi que les étudiants sont limités à une copie double, les obligeant à un esprit de synthèse.

    D'autres éléments peuvent aussi donner lieu à notation, sans être inscrit dans cette correction. Ceci n'est donc qu'une base de correction devant permettre une notation des plus objectives.

    •1)      Dans quel cadre d'enquête les investigations policières ont-elles été diligentées ? 
    (3 points)

    Cette question vise à savoir si les investigations se déroulent en enquête de flagrance ou en enquête préliminaire.

    Alors que l'enquête de flagrance se définit à travers des critères temporels (se commet, vient de se commettre, temps voisin, clameur publique) ou d'apparence (traces et indices)  laissant penser que l'infraction s'est réalisée peu de temps avant que les services de police soient prévenus (Art. 53 CPP) ; l'enquête préliminaire est ouverte en-dehors des conditions de la flagrance pour permettre la réunion de renseignements relatifs à des évènements susceptibles de constituer une infraction (1 point).
    En l'espèce, il est indiqué que les services sociaux signalent des suspicions d'agressions sexuelles, donc pas de faits flagrants constatés (« suspicions »). De même, la plainte des parents intervient dans « le même temps », sans attache avec des faits précis (1 point).
    Particularité de l'enquête préliminaire (Art. 75 CPP), elle peut être ouverte d'office par les OPJ ou sur les instructions du Procureur de la République. En l'espèce, il est indiqué que l'enquête est diligentée à la demande du Procureur de la République, ce qui conforte que le cadre juridique est l'enquête préliminaire (1 point)

     

    •2)      Au regard des éléments visés dans l'énoncé, la mesure de perquisition est-elle régulière ? (1 point)

    La perquisition est l'acte qui permet la recherche, dans un lieu clos, d'éléments de preuve devant permettre « la manifestation de la vérité ». Pour être régulière, une perquisition doit répondre à des conditions précises qui peuvent varier selon le cadre d'enquête. 

    Selon l'article 59 CPP, les perquisitions doivent débuter entre 6h et 21h. Ici, les fonctionnaires de police effectuent la perquisition à partir de 10h00, donc  pas de difficulté à constater (0.25 point).
    Selon l'article 57 CPP, la perquisition doit se dérouler en présence de la personne chez qui elle se réalise (ou en présence de témoins), or, M. Legrin est présent (0.25 point).
    En enquête préliminaire, la perquisition nécessite le consentement écrit de la personne, sauf si les nécessités de l'enquête l'exigent en cas d'enquête sur un délit punissable de plus de 5 ans d'emprisonnement si une autorisation écrite et motivée du JLD est obtenue (Art. 76 CPP - Loi Perben II).  En l'espèce, M. Legrin est suspecté d'avoir commis une infraction puni de 7 ans d'emprisonnement (Art. 222-28 CP, l'auteur est l'oncle de la victime) : l'exception est ouverte. En l'espèce, il est indiqué que M. Legrin se voit « opposé » ces opérations. Pour être valable, il faudra cependant avoir obtenu, à la requête du Procureur de la République, l'autorisation du JLD (0.5 point).

    Les autres conditions semblent moins pertinentes à évoquer, comme le formalisme avec les procès-verbaux, les auteurs de la perquisition (OPJ et APJ de l'article 20 CPP), les conditions tenant au secret professionnel (Art. 56-1 et s. CPP), la lecture des documents par les seuls OPJ (Art. 56 al. 2 CPP), l'accès aux services informatiques, ni les éléments tenant aux saisies. 

    •3)      Les parents de la jeune Lou pouvaient-ils contester la décision de classement selon une autre voie ?
    (2 points)

    Le classement sans suite est une décision qui permet au Procureur de la République de ne pas poursuivre une infraction à la suite d'une plainte, la dénonciation par la victime ou un tiers, ou à la suite d'une enquête (non identification de l'auteur).

    Cette décision est une mesure d'administration judiciaire. Elle a un caractère administratif et provisoire. Le caractère provisoire indique que le ministère public peut reprendre une poursuite ultérieurement (sous réserve de prescription), mais ce caractère a peu d'intérêt pour cette espèce.  Le caractère administratif souligne que cette décision n'a pas d'autorité de la chose jugée (0.5 point). La décision de classement sans suite n'est donc pas soumis à un recours judiciaire ou juridictionnel : donc insusceptible d'appel. Les parents ne pourront introduire un tel recours (0.5 point)
    Cependant, un recours hiérarchique peut être envisagé. La loi du 9 mars 2004 consacre ce recours dans l'article 40-3 CPP : « toute personne ayant dénoncé des faits au procureur de la république peut former un recours auprès du procureur général contre la décision de classement sans suite à la décision de cette dénonciation ... ». Le Procureur général peut enjoindre au procureur de la République d'engager des poursuites ou rejeter la demande (0.5 point). En l'espèce, les parents ayant déposés plainte peuvent donc faire ce recours (0.5 point).

    •4)      La constitution de partie civile sera-t-elle déclarée recevable et quels seront ses effets ?
    (6 points)

    L'action civile se définit comme une action en réparation, qui devant les juridictions pénales se trouve être l'accessoire de l'action publique marquée par un impact sur son déclenchement.

    Conditions :
    Pour pouvoir déclencher l'action civile, la victime doit être capable d'agir et avoir un intérêt à agir.
    - Pour l'intérêt à agir, la victime doit avancer un préjudice certain, actuel (donc non hypothétique ni un préjudice seulement éventuel), personnel (préjudice dont la victime a été atteinte par l'infraction) et direct (en lien direct avec l'infraction) (1 points).
    Ici, l'intérêt à agir ne semble pas poser des difficultés. L'enfant a subi des agressions sexuelles : préjudice certain et actuel représenté par une atteinte à l'intégrité physique et morale, ressortant directement de l'atteinte sexuelle (0.5 point)
    - Pour la capacité à agir, Lou est âgée de 8 ans. Elle est mineure. Dans ce cas, le mineur est représenté par l'administrateur légal dans tous les actes civils (Art. 389-3 C.civ.). L'action peut donc être faite par ses parents (pas de conflit d'intérêts) ou son tuteur. Elle pourra agir en son nom propre à sa majorité. En l'espèce, les parents agissent en qualité de parents. (Notons que les parents peuvent éventuellement agir comme victimes par ricochet, mais pas d'intérêt en l'espèce) (0.5 point).

    Modalités :
    - Ici, on ne parle pas d'action civile devant les juridictions civiles. De même, les parents n'ont pas effectué une constitution civile par voie d'exception, puisque le ministère public n'a pas engagé les poursuites. Enfin, ils ne font pas non plus une action civile par voie d'action par citation directe devant le tribunal correctionnel.
    - La victime (ou son représentant) peut se constituer partie civile par voie d'action. Ce procédé est utilisé lorsque le ministère public ne déclenche pas l'action publique, notamment pour lutter contre l'inertie des parquets. 
    L'article 85 CPP offre la possibilité à une personne lésée par un crime ou un délit de se constituer partie civile :
                    * à la condition que la personne justifie que le procureur lui a fait connaître, à la suite du dépôt d'une plainte déposée devant lui ou les services de police judiciaire, qu'il n'engagera pas les poursuite  (0.5 point) ;
                    * ou à la condition qu'un délai de trois mois s'est écoulé depuis qu'elle a déposé plainte devant ce magistrat ou des services de police, plainte n'ayant pas connu de réponse judiciaire (0.5 point).
    (Notons que ces conditions sont exclues en cas de crimes, délits prévus par la loi de 1881 sur la presse et certains délits électoraux ; mais nous ne sommes pas dans ces cas, donc pas d'intérêt de l'indiquer).  
    En l'espèce, les parents ont connaissance que le procureur a classé sans suite alors qu'ils ont effectué un dépôt de plainte. En outre, on peut aussi indiquer qu'avant même cette décision de classement sans suite, les parents auraient pu se constituer partie civile trois mois qui ont suivi leur dépôt de plainte en mars 2009, soit au mois juin 2009 (0.5 point)
    - Sur le formalisme, une simple lettre au juge d'instruction suffit, dès lors qu'elle est datée et signée. Elle contient les faits dénoncés, la qualification pénale, les textes d'incrimination, le préjudice et la demande d'indemnisation. En l'espèce, les parents de l'enfant doivent avoir indiqué ces mentions dans leur courrier au juge d'instruction (1 point).

    Effets :
    L'instruction est obligatoire en matière criminelle, facultative en matière de délit, sur réquisition du procureur en matière de contravention. L'infraction d'espèce étant un délit, les parents peuvent donc saisir le juge d'instruction. Si cette voie aurait été exclusive pour un crime, elle était ici une possibilité (exclu si cela avait été une contravention) (0.5 point).
    Cette constitution oblige le juge d'instruction de mettre le dossier en état, sauf en cas de refus d'informer (manque d'indication dans la plainte).
    Après payement d'une consignation, le doyen des juges d'instruction fait parvenir le dossier au procureur de la République pour que celui-ci requière la poursuite. La constitution de partie civile oblige alors le procureur à prendre un réquisitoire introductif d'instance, pour tout ou partie des faits, contre personne nommée ou dénommée (1 point).  

    La plainte avec constitution de partie civile devra respecter ces différents éléments pour être recevable et entraîner la prise d'un réquisitoire introductif d'instance provoquant le déclenchement de l'action publique.

    •5)      Pendant l'instruction, quel sera le statut de M. Legrin ? quelles en seront les conséquences ?
    (6 points)

    Notons que trois statuts sont envisageables pendant une instruction : un mis en cause (suspect), un témoin assisté et un mis en examen.

    Le « statut » de simple suspect ou de mis en cause est immédiatement exclu. En l'espèce, les parents nomme expressément M. Legrin dans leur plainte, laissant donc présager que le réquisitoire introductif d'instance le vise aussi. On peut vivement exclure ce « statut » (0.5 point).

    M. Legrin peut éventuellement être placé sous le statut de témoin assisté, ce qui évite les inconvénients de la mise en examen (Art. 113-1 et s. CPP). Tous les cas pour la mise sous ce statut ne sont pas évoqués, seuls ceux ayant un intérêt compte tenu des faits.
     C'est une obligation notamment  lorsque la personne est nommée dans le réquisitoire introductif d'instance (probable en l'espèce) ou sur sa demande lorsqu'elle est visée par une plainte (tel est le cas en l'espèce) (1 point).
    Sans cette demande, la mise sous le statut est une faculté dès lors que la personne est visée dans une plainte (le cas en l'espèce) ou lorsqu'il existe des indices rendant vraisemblables (mêmes légers) qu'elle ait pu participer à la commission d'infraction (discutable compte tenu du classement sans suite) (1 point).
    Ce statut offre des droits à M. Legrin, notamment d'être assisté d'un avocat ayant accès au dossier, formuler des requêtes en annulation et saisir la Chambre de l'instruction, droit de changer de statut. Cependant, il est tenu de comparaître et de déposer, mais ne peut être placé en détention provisoire ou sous contrôle judiciaire (1 point).

    M. Legrin peut éventuellement être placé en examen par le juge d'instruction (attention, on ne parle pas d'inculpation depuis le 4 janvier 1993 !).
    Pour cela, il doit exister à son encontre des indices graves et concordants de sa culpabilité ; après l'avoir entendu ou donner cette possibilité ; et si la mise sous le statut de témoin assisté n'est pas possible (par exemple, si M. Legrin placé sous le régime du TA demande sa mise en examen) (1 point)
    Ce statut offre aussi des droits : il est une partie à la procédure, possède l'assistance d'un avocat,  participe à l'information par la présentation d'observation ou la confrontation aux témoins, être entendu par le juge, etc. Cependant, la mise en détention ou sous contrôle judiciaire est possible. (L'étudiant doit cité les droits distincts de l'autre régime : partie à la procédure par exemple. Pondération entre le 0.5 point de ces droits et le 1 point des droits du TA)  (0.5 point).

     En l'espèce, il ne semble pas y avoir d'indices graves et concordants (expliquant le classement sans suite). Toutefois, M. Legrin est cité dans une plainte (voire le réquisitoire). La mise en examen semble pour l'instant exclu ; la mise sous le régime de témoin assisté facultative voire obligatoire (1 point).

     

     

  • POUVOIRS DU PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE PENDANT LA PHASE D’ENQUETE

    Voici ici une reprise des principaux pouvoirs (liste non exhaustive) qu'un Procureur de la République possède pendant la phase d'enquête. On remarque donc qu'il est l'autorité d'enquête la plus importante aux côtés des officiers de police judiciaire (OPJ).

    Enquête de flagrance :

    • - Information du Procureur: Le Procureur est immédiatement avisé d'un crime flagrant par l'OPJ (art. 54 CPP); ou de la découverte d'un cadavre lorsque la cause est inconnue ou suspecte (art. 74 CPP).
    • - Prolongation de l'enquête: Pouvoir d'autoriser la prolongation de l'enquête de flagrance pour une nouvelle durée de 8 jours (art. 53 CPP).
    • - Recours au Service pénitentiaire d'insertion et de probation: Le Procureur peut au service pénitentiaire pour obtenir des informations sur la situation matérielle, familiale et sociale d'une personne faisant l'objet d'une enquête. Avant toute détention provisoire, cette demande doit être effectuée (art. 41 CPP).
    • - Recours à une association d'aide aux victimes: il peut recourir à une association d'aide aux victimes pour favoriser l'aide apportée à la victime (art. 41 CPP).
    • - Arrivée sur les lieux: Informé, le Procureur peut se déplacer sur les lieux. Il dessaisit alors les OPJ et peut lui-même accomplir les actes de police judiciaire (art. 68 CPP). Idem en cas de découverte d'un cadavre (art. 74 CPP).
    • - Saisies: Il donne accord de la saisie des objets, documents et données informatiques utiles à la manifestation de la vérité. En cas de réalisation de copies informatiques, il est procédé sur son instruction, à l'effacement physique sur le support qui n'a pas été placé sous main de justice (pour les données informatiques illégales ou dangereuses). Pour les saisies d'argent en espèce ou de lingots, d'effets ou de valeurs, c'est le Procureur qui autorise la conservation par la Caisse des Dépôts et Consignation (art. 56 CPP).
    • - Perquisitions: Le Procureur peut déposer une requête pour obtenir l'autorisation du JLD pour perquisitionner en-dehors des heures légales en matière de criminalité organisée (art. 706-89 CPP). En matière de criminalité organisée, il peut aussi autoriser une perquisition en présence de deux témoins, sans la présence du gardé à vue, dont le déplacement serait dangereux (art. 706-94 CPP).
    • - Examens techniques et scientifiques: Le Procureur donne instruction aux OPJ pour donner connaissance des résultats d'examens aux personnes à l'encontre desquelles il existe des indices faisant présumer la commission d'une infraction (art. 60 CPP).
    • - Comparution de personnes ayant des renseignements: Le Procureur peut autoriser la force publique pour faire comparaître une personne ayant des renseignements (art. 62 CPP).
    • - Garde à vue: Le Procureur est immédiatement avisé d'une mise en garde à vue (art. 63 CPP), ainsi que de la qualification des faits retenue par les enquêteurs (art. 63-4 CPP); puisqu'il la contrôle au moyen de visites, par la tenue d'un répertoire et la remise d'un rapport au Procureur Général transmis au Garde des Sceaux (art. 41 CPP). Il peut y mettre fin. Il peut autoriser la prolongation pour 24 heures, après possible présentation préalable (art. 63 CPP). Il peut refuser que la personne prévienne une personne avec qui il vit habituellement, un parent ou son employeur (art. 63-2 CPP). Sur instructions du Procureur, les personnes contre qui il existe des éléments pouvant entraîner des poursuites, sont soit remises en liberté soit déférées devant lui (art. 63 CPP). Il peut désigner le médecin (art. 63-3 CPP). Les interrogatoires des personnes placées en garde à vue pour crime sont filmés, sauf si le Procureur écarte l'enregistrement de personnes quand leur nombre est trop grand. De même, le Procureur est avisé d'une impossibilité technique d'enregistrement (art. 64-1 CPP). En matière de criminalité organisée, cet enregistrement n'est pas obligatoire, sauf sur ordre du Procureur (art. 64-1 CPP). Son intervention se montre aussi décisive dans le cadre des procédures dérogatoires, comme les gardes à vue des mineurs où la prolongation de la retenue ou de la garde à vue nécessite la présentation au Procureur.
    • - Déplacement en-dehors de son ressort: Le Procureur peut se déplacer en-dehors de son ressort, dans les ressorts limitrophes; en avertissant le Procureur compétent (art. 69 CPP).
    • - Mandat de recherche: Il décerne mandat de recherche (art. 70 CPP) pour les infractions puni d'au moins 3 ans.
    • - Interceptions téléphoniques: Le Procureur peut requérir, auprès du JLD, l'interception de communications en matière de criminalité organisée (art. 706-95 CPP).
    • - Sur les lieux avec le Juge d'instruction: Sur les lieux de l'enquête, le Procureur peut requérir l'ouverture d'une information, en saisissant le juge d'instruction qui peut être présent sur les lieux (art. 72 CPP).
    • - Ouverture d'une information: En cas de découverte d'un cadavre ou d'une disparition d'un mineur ou d'un majeur protégé, le Procureur peut requérir l'ouverture d'une information (art. 74 et 74-1 CPP).

     

    Enquête préliminaire :

    • - Ouverture de l'enquête: Le Procureur peut demander l'ouverture d'une enquête préliminaire (art. 75 CPP) dont il fixe la durée (art. 75-1 CPP). Si l'enquête est ouverte d'office par les OPJ, le Procureur est tenue informé au bout de 6 mois de son avancement.
    • - Information du Procureur: Il est informé par les OPJ dès qu'une personne contre qui il existe des raisons plausibles de penser qu'elle a commis une infraction est identifiée (art. 75-2 CPP).
    • - Perquisitions: En cas de refus de la personne d'être perquisitionner, le Procureur peut requérir l'autorisation auprès du JLD, en cas d'infractions punies d'une peine d'emprisonnement de 5 ans au moins (art. 76 CPP).
    • - Examens techniques ou scientifiques: Le Procureur peut avoir recours aux personnes qualifiées ou autoriser ce recours aux OPJ (art. 77-1 CPP).
    • - Informations auprès d'un établissement ou organisme privé ou public: Le Procureur peut requérir ou autoriser l'OPJ de requérir de toute personne les informations utiles et contenues dans un système informatique ou un traitement de données (art. 77-1-1 CPP), y compris en matière bancaire (art. 77-1-2 CPP).
    • - Garde à vue: Le Procureur joue un rôle identique qu'en enquête de flagrance (art. 77 CPP).
    • - Mandat de recherche: Il décerne mandat de recherche contre les personnes contre qui il existe des indices (art. 77-4 CPP).
    • - Prélèvements externes: Le Procureur peut procéder ou faire procéder aux OPJ sur son autorisation aux prélèvements externes prévus à l'article 55-1 CPP (en enquête de flagrance, pouvoirs propres des OPJ) (art. 76-2 CPP).
    • - Comparution de personnes ayant des renseignements: Le Procureur peut autoriser la force publique pour faire comparaître une personne ayant des renseignements, qui refuse ou dont on peut craindre qu'elle ne se présente pas (art. 78 CPP).

     

     

    De façon assez générale...

    • - Contrôle sur l'enquête: Il procède ou fait procéder à tous les actes nécessaires à la recherche et à la poursuite des infractions à la loi pénale (art. 41 CPP). Il dirige les activités des OPJ de son ressort. Il possède l'ensemble des pouvoirs et prérogatives d'un OPJ. Idem en cas de découverte d'un cadavre avec mort suspecte ou de disparition (art. 74 et 74-1 CPP).
    • - Interrogation du Procureur par le gardé à vue: A l'issue de sa garde à vue non suivie de poursuites, le gardé à vue peut demander à l'expiration d'un délai de 6 mois (y compris en enquête de flagrance), la suite donnée à l'affaire (art. 77-2 CPP).
    • - Intervention publique: dans le but d'éviter la propagation d'informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l'ordre public, le procureur de la République peut, d'office et à la demande de la juridiction d'instruction ou des parties, rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause (art. 11 CPP).
    • - Opportunité des poursuites: de façon générale, le Procureur peut mettre fin à l'enquête à tout moment. Il peut pour cela utiliser les différentes voies ouvertes par l'opportunité des poursuites... en ouvrant une information, recourant à un mode de poursuites...