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  • L'embryon en droit civil (Partie 2 - Embryon in vitro)

    B) L’embryon in vitro

    Biologie. L’embryon in vitro est un œuf fécondé qui est issu d’une femme mais conservé hors de son corps, d’où l’expression « bébé éprouvette ». Il sera par la suite transféré in utero pour permettre une grossesse, soit immédiatement soit après une éventuelle conservation par congélation. Cela permet donc une assistance médicale à la procréation, soit des pratiques cliniques et biologiques pour favoriser la conception in vitro, la conservation des gamètes, des tissus germinaux et des embryons, le transfert d'embryons et l'insémination artificielle (article L. 2141-1 du Code de la santé publique). C’est pour cette raison que l’on parle de fécondation in vitro (FIV). Ces techniques ont pour but de permettre à des couples, ne pouvant avoir d’enfants pour cause d’infertilité ou avec un risque de transmission de maladies génétiques, de procréer (art. L. 2141-2 du Code de la santé publique).

    Procréation médicalement assistée. En matière de procréation assistée, les lois sur la bioéthique de 1994 renvoient à la notion de « couple ». Selon cette loi, le couple est composé « d'un homme et d'une femme, tous deux vivants, en âge de procréer, mariés ou en mesure d'apporter la preuve d'une vie commune d'au moins deux ans ». Cette notion concerne l’ensemble des unions avec une assimilation au mariage. On doit donc retrouver ces conditions pour les couples pacsés. En outre, il faut noter que l’on parle d’un couple mais que l’on n’utilise pas une expression telle que « les parents ».

    Il y a donc plusieurs conditions (art. L. 2141-6 et L. 2141-10 du Code de la santé publique) :

    - de sexe, un homme et une femme, ce qui exclut les couples homosexuels ;

    - en âge de procréer, ce qui induit un âge ;

    - formant un couple uni (mariage ou 2 années de vie commune) ;

    - avoir un projet parental ;

    - le consentement des deux membres du couple ;

    - ainsi qu’une décision de l’autorité judiciaire.

    La condition du consentement est extrêmement importante puisque la contestation de filiation est impossible (article 311-20 du Code civil) et la reconnaissance obligatoire (sinon responsabilité possible… sauf si l’on apporte la preuve que l’enfant a été conçu en-dehors de la FIV).

    L’embryon. Physiquement, il faut souligner que l’embryon possède la taille d’un grain de riz. Le don et l’échange d’embryon sont encadrés par la loi. La vente est strictement interdite.

    L’embryon congelé n’est pas juridiquement une personne. Cette solution est logique et est une application classique du principe selon lequel un enfant conçu n’est pas titulaire de droits subjectifs tant qu’il n’est pas né. De la même façon, l’enfant conçu n’est pas protégé par le droit pénal des personnes.

    L’embryon doit être rangé dans la catégorie des choses, comme le souligne l’utilisation par le Tribunal administratif d’Amiens, dans sa décision du 9 mars 2004, de la terminologie « matériel ». Il faut donc faire attention dans l’utilisation des termes utilisés. L’embryon in vitro peut être considéré comme un être humain, mais cette expression ne renvoie à aucune réalité juridique précise. De son côté, le TA exclut aussi la qualification d’être à l’embryon congelé. L’utilisation du terme « matériel » par le TA laisse penser que l’embryon est un matériau mais qui ne peut avoir de valeur patrimoniale en raison de l’article 16-1 du Code Civil. L’embryon se qualifie alors de chose mobilière (meuble).

    Défaut d’affection à l’embryon. De la même façon, un animal est une chose qui a un prix. Néanmoins, les juges reconnaissent un rapport d’affection entre l’homme et l’animal pouvant justifier un préjudice moral. Dans l’espèce, le TA refuse de voir dans l’embryon « un être cher », ni un « être chéri » avec l’existence d’un rapport d’affection. Il n’y a pas ce type de rapport avec un embryon… d’ailleurs, il n’y a pas de relation entre le couple et l’embryon !

    Valeur de l’embryon. Le corps humain n’a pas de valeur pécuniaire (malgré les nombreuses exceptions). L’embryon est inestimable, donc pas de valeur pécuniaire. En revanche, l’indemnisation peut compenser toutes causes confondues le préjudice matériel subi, soit les troubles divers dans la condition d’existence des « futurs parents ».

    A des fins de recherche. La conception d’embryons destinés à l’étude ou la recherche est interdite sauf sur les embryons conçus in vitro avec l’énumération de conditions (acceptation des membres du couple).

    Destruction des embryons surnuméraires. Les embryons peuvent faire l’objet d’une destruction dès lors que les deux parents sont d’accord.

    Ne doit-on pas parler de « choses sacrées » ? L’embryon ouvre peut-être la voie à la découverte ou redécouverte d’une nouvelle catégorie de biens… à l’image des œuvres d’art ou plus classiquement de la dépouille mortelle.

  • L'embryon en droit civil (Partie 1 - Embryon in vivo)

    I)                  L’embryon en droit civil

    Plusieurs questions ont été levées concernant le statut de l’embryon et du fœtus. Actuellement, le statut de personnalité juridique est refusé, notamment pour protéger le droit à l’avortement ; problème sous-jacent à ce débat (A). Le développement de la fécondation in vitro (FIVETE), impliquant un transfert d’embryon (connaissant un stockage par congélation), remet à jour cette question en raison des embryons surnuméraires (pouvant être supprimés ; la recherche sur l’embryon étant interdite sauf sur les embryons conçus in vitro avec l’énumération de conditions) (B). 

     

    A)    L’embryon in vivo (in utero)

    Naissance. Il va de soi que la fécondation ne donne pas lieu à déclaration en mairie ou autres mesures… Il n’y a pas de date connue d’un point de vue juridique. Seule la naissance fait l’objet d’une déclaration, soit d’une indication précise. L’article 55 du Code civil dispose que « les déclarations de naissance sont faites dans les trois jours de l’accouchement, à l’officier de l’état civil du lieu ». Le moment de la naissance apparaît donc primordial. Dès lors, tout homme acquière la personnalité juridique au moment où il nait. L’enfant nait sujet de droit s’il nait vivant et viable.

    Viabilité. L’enfant doit naître vivant mais aussi viable. Il s’agit de la capacité naturelle de vivre. L’enfant ne doit pas être dépourvu d’organe essentiel à la vie. L’enfant doit être apte à vivre.

    Filiation. La filiation de la mère ne pose en général pas de difficulté. A la naissance, on présume la filiation du père (paternité). La loi présume que l’enfant conçu pendant le mariage à pour père le mari. En-dehors des liens du mariage, l’attention se porte sur les relations entretenues au moment de la conception. On détermine alors la date de conception par renvoi à la période du 300ème jour au 180ème jour avant la naissance, ce que consacre l’article 311 du Code civil.   

    Personnalité rétroactive ou l’infans conceptus. Toutefois, l’acquisition de cette personnalité peut remonter avant la naissance, à partir de la conception. « Infans conceptus pro nato habetur quoties de commodo ejus agitur », c’est-à-dire « l’enfant conçu est considéré comme né chaque fois que tel est son intérêt ». Tel est le cas pour succéder (art. 725 c.civ.) ou recevoir par testament ou donation (art. 906 c.civ.). On présume à nouveau cette naissance pendant la période du 300ème au 180ème jour avant celle-ci (art. 311 c.civ.).

    La maxime « Infans conceptus » engendre un principe et une exception. En principe, un enfant n’acquiert la personnalité juridique qu’à partir du moment où il est né vivant et viable. L’exception qui complète ce principe veut que l’enfant simplement conçu soit considéré comme une personne juridique chaque fois qu’il y va de son intérêt. Ceci étant, le droit en cause n’est effectif que quand les conditions de sa réalisation sont réunies à savoir quand l’enfant sera né vivant et viable.

    Exemple de l’assurance décès. La question se pose notamment dans le cadre d’un contrat d’assurance décès. En répondant par l’application de cette maxime, les juges permettent alors à une personne de contracter une assurance décès au bénéfice d’enfants à naître.

    Droit de la mère face à l’embryon (IVG). La mère possède le droit de disposer de son corps. Elle est la personne la plus concernée par la conception, ayant un droit sur le sort de l’embryon. Elle peut notamment réaliser une interruption volontaire de grossesse (IVG). Peut-on opposer un éventuel droit à la vie de l’enfant à naître ? La question est résolue par la loi Veil de 1975 qui détermine un délai pour pouvoir réaliser un avortement. Initialement fixé à 10 semaines, la durée pour pouvoir interrompre la grossesse est fixée à 12 semaines. Cette période initiale de 10 semaines renvoie en fait à l’embryon (0 à 8 semaines). Soit on prend 8 semaines à partir de la conception, soit on parle de 10 semaines à partir de l’aménorrhée (absence de règles ; 2 semaines entre le premier jour des dernières règles et la fécondation, c’est-à-dire du pic d’ovulation fixé au dernier jour des règles qui intervient 14 jours plus tard)[1]. Cette possibilité ouverte à la mère d’interrompre la grossesse lui permet de détruire l’embryon. Cette action n’est plus possible à l’encontre du fœtus. L’IVG ne pourra intervenir à tout moment que dans deux cas précis : le péril grave pour la santé de la femme ou la forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic (art. L. 2213-1 du Code de la santé publique).    

    Notons que le premier article dans le livre consacré à l’IVG, l’article L. 2211-1 du Code de la santé publique, dispose : « Comme il est dit à l'article 16 du code civil ci-après reproduit : "La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l'être humain dès le commencement de sa vie " ».

    Puis l’article L. 2212-1 du Code de la santé publique : « La femme enceinte que son état place dans une situation de détresse peut demander à un médecin l'interruption de sa grossesse. Cette interruption ne peut être pratiquée qu'avant la fin de la douzième semaine de grossesse ».

    Commercialisation et procréation - gestation pour autrui. Cette présentation doit cependant être complété par la maxime « res extra coercium » (= l’embryon ne peut pas être commercialisé). De plus, il faut rappeler que la procréation (femme portant l’enfant est la mère génétique) ou la gestation pour autrui (femme portant l’enfant n’est que la gestatrice, l’enfant est conçu qu’avec les gamètes du couple, c’est-à-dire le recours à la mère porteuse) est interdite en France, qu’elles soient gratuites ou payantes (ce qui entraîne des problèmes pour la reconnaissance des enfants de couple français ayant fait appel à ce procédé à l’étranger où cette procédure est légale, comme aux Etats-Unis).



    [1] La gestation totale comptabilise donc 41 semaines d’aménorrhée ou 9 mois de grossesse.